Maladies auto-immunes

Le Pr Xavier Mariette récompensé par la Fondation pour la recherche médicale

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Publié le 17/01/2018
Syndrome de Sjogren

Syndrome de Sjogren
Crédit photo : Phanie

Les travaux de recherche du Pr Xavier Mariette (université Paris-Sud) se focalisent sur deux grandes maladies auto-immunes, le syndrome de Sjögren et la polyarthrite rhumatoïde, dont il étudie les mécanismes moléculaires pour aller, dans une approche translationnelle, vers de nouvelles pistes thérapeutiques.

Le syndrome de Sjögren est une maladie rare (0,3 -1‰ de la population) qui touche plus particulièrement les femmes et s’installe le plus souvent vers la cinquantaine. Suite à une infiltration par les cellules lymphocytaires des glandes lacrymales et salivaires, le syndrome de Sjögren se caractérise par une diminution des sécrétions de larmes et de salive avec constitution d’un syndrome sec. Mais cette infiltration par les lymphocytes peut s’étendre et entraîner des manifestations extraglandulaires systémiques : la plus fréquente d’entre elles étant l’atteinte articulaire. Les poumons, les reins peuvent aussi être atteints et il existe un risque accru de lymphome.

Vers une médecine personnalisée dans le syndrome de Sjögren

« Si de nombreuses avancées ont été faites au cours des dernières années, la physiopathologie du syndrome de Sjögren reste encore mal connue, mêlant facteurs environnementaux et prédisposition génétique », précise le Pr Xavier Mariette. Cependant, grâce à la constitution d’une cohorte nationale de patients atteints de syndrome de Sjögren et aux prélèvements associés, l’équipe du Pr Xavier Mariette a découvert les cascades cellulaires et moléculaires en jeu dans la maladie et dans le risque de lymphome associé. « L’excès de BAFF, cytokine activatrice des lymphocytes B et l’hyperactivité lymphocytaire B qui en résulte, caractéristique du syndrome, jouent un rôle essentiel », souligne le Pr Xavier Mariette. C’est ainsi qu’a été menée une première étude avec un anticorps monoclonal anti-BAFF (belimumab) avec des résultats préliminaires intéressants. « Ces données ont conduit à mettre en place une étude internationale de phase III visant à tester le rituximab en induction, suivi du belimumab en maintenance. Cette association devrait permettre d’avoir une action plus profonde sur l’ensemble de la lignée lymphocytaire B, le rituximab étant un anticorps monoclonal dirigé contre la molécule CD20 présente à la surface des cellules B du stade pré-B au stade de lymphocyte B mature ».

Une autre étude préliminaire, présentée à l’ACR, a montré l’intérêt d’un anticorps anti-CD40 qui ne provoque pas de déplétion des lymphocytes B.

« Enfin, notre équipe coordonne un vaste projet européen dans le cadre d’une IMI (Innovative Medical Initiative) pour effectuer pour la première fois dans une maladie auto-immune, un essai thérapeutique multi-bras, multi-stades, basé sur la stratification des patients. L’objectif est d’arriver, comme en cancérologie, à mettre en évidence des biomarqueurs et de pouvoir proposer un traitement ciblé pour une médecine personnalisée ».

Facteurs environnementaux et recherche thérapeutique dans la polyarthrite rhumatoïde

Le Pr Xavier Mariette s’attache à rechercher les facteurs environnementaux liés à la polyarthrite rhumatoïde dont l’origine est encore inconnue. Grâce à une collaboration avec la cohorte E3N (Étude épidémiologique auprès de femmes de l’éducation nationale), son équipe a mis en évidence pour la première fois, dans une étude présentée à l’EULAR, l’implication du tabagisme passif durant l’enfance sur la survenue de la maladie à l’âge adulte.

« Par ailleurs, le lien épidémiologique entre parodontopathie et polyarthrite rhumatoïde est bien établi et une étude est actuellement menée pour mesurer l’effet d’un traitement préventif de la parodontopathie (bain de bouche antiseptique et détartrage tous les six mois) sur l’évolution de la PR. Les résultats sont attendus prochainement », déclare le Pr Xavier Mariette.

Enfin, en ce qui concerne la recherche thérapeutique, le Pr Xavier Mariette a mis en place des registres nationaux de patients traités par les biothérapies qui permettent notamment de surveiller la tolérance de ces traitements et d’évaluer le risque d’infections sévères, de cancers et en particulier de lymphomes. « Le débat vient d’ailleurs d’être relancé avec une étude récemment publiée dans JAMA : les patients atteints de maladie de Crohn traités par thiopurine ou par anti-TNF ont un risque de lymphome 2,5 fois supérieur à celui de patients non traités. Le risque était six fois plus élevé avec le traitement combinant les deux. Nous menons une étude similaire dans la PR grâce à l’étude de la base de l’Assurance-maladie (SNIIRAM). Par ailleurs, nous développons un modèle de souris auto-immunes traités au long cours par différents anti-TNF, grâce à un nouveau procédé permettant de tolériser ces médicaments humains chez la souris, dans le but de savoir si des traitements prolongés par certains anti-TNF à forte dose pourraient augmenter le risque de lymphome ».

D'après un entretien avec le Pr Xavier Mariette, professeur à l’université Paris-Sud, chef du service de rhumatologie de l’hôpital Bicêtre, responsable du centre de référence des maladies auto-immunes systémiques rares IDF-Paris-Sud

Christine Fallet

Source : lequotidiendumedecin.fr