LA VITAMINE D interagit avec plus de 200 gènes et les récepteurs à la vitamine D sont trouvés sur un grand nombre de cellules de notre organisme. Cette vitamine intervient donc vraisemblablement sur de nombreux métabolismes. Un lien de causalité existe entre certaines maladies et une insuffisance en vitamine D : ostéoporose, fractures, chutes… Pour d’autres pathologies, des études observationnelles ont montré une association statistique entre une insuffisance vitaminique D et un surrisque de cancers, d’infections, de maladies auto-immunes, de sclérose en plaques…
Son dosage systématique effectué dans certaines études a fait apparaître que des populations entières sont en dessous de la norme : 30 ng/ml (ou 75 nmol/l) (< 30 ng/ml = insuffisance et ‹ 10 ng/ml = carence). La vitamine D est essentiellement fabriquée par la peau, l’apport dû à l’alimentation étant négligeable. Le manque d’ensoleillement lié à l’âge, à une peau foncée, à la latitude, à la couverture de la peau pour des raisons religieuses ou culturelles, à certaines maladies, à l’utilisation d’écrans solaires… est à l’origine de l’insuffisance en vitamine D. Ainsi, dans le Nord de la France, plus de la moitié des femmes ménopausées et 100 % des sujets institutionnalisés ont une insuffisance en vitamine D nécessitant une supplémentation.
Quand faut-il doser la 25-OH vitamine D ?
« Les recommandations distinguent deux situations », rappelle le Pr Fardellone :
- pas de dosage préalable pour de larges fractions de la population non malade : personnes âgées (› 65 ans), personnes à la peau foncée ou à la peau couverte vivant dans le Nord de la France. Une supplémentation peut être prescrite d’emblée à titre préventif (800 UI/j) ;
- dosage préalable dans les maladies qui exposent à une carence ou à une insuffisance en vitamine D ou qui sont modulées selon des données épidémiologiques par une carence ou une insuffisance en vitamine D : ostéoporose, cancers, maladies auto-immunes, infections. Les personnes qui font des chutes sont aussi concernées. Le traitement d’attaque puis d’entretien qui sera mis en place dépend de la valeur de 25-OH-D. En pratique, le traitement d’attaque se fait le plus souvent avec des ampoules buvables de 100 000 UI de cholécalciférol (ou vitamine D3) données à 15 jours d’intervalle, et la dose dépend de la valeur de 25-OH D : entre 20 et 30 ng/ml : 2 ampoules - entre 10 et 20 ng/ml : 3 ampoules - ‹ 10 ng/ml : 4 ampoules. Chez le sujet obèse, le statut vitaminique D étant plus difficile à normaliser du fait de la séquestration de la vitamine D par les adipocytes, des doses plus importantes doivent être prescrites. Un contrôle de la 25-OH vitamine D est ensuite effectué à distance de la supplémentation. Si la cible n’est pas atteinte, le même processus est recommencé. En général, la normalisation est obtenue en deux dosages. Quand la cible est atteinte, une dose d’entretien est prescrite avec 800 à 1 000 UI/j : soit par une association avec du calcium (comprimés dosés à 1 g de calcium + 800 UI de vitamine D en une ou deux prises par jour), soit par une dose de charge (une ampoule de 100 000 UI tous les trois mois ou une ampoule de 200 000 UI tous les six mois). Pour le Pr Fardellone, « sauf chez les sujets qui ont une insuffisance hépatique, la vitamine D3 native doit être préférée à ses dérivés hydroxylés (25-OH-D3, 1 alpha OH D3 et 1-25 (OH) 2-D3) ».
Le surdosage de vitamine D est très rare. Il ne peut survenir que chez des personnes ayant un granulome comme la sarcoïdose. Chez le sujet sain, des doses de 10 000 UI/j pendant plusieurs semaines seraient nécessaires pour induire une intoxication. À noter cependant, qu’une valeur de 25-OH-D supérieure à 150 ng/ml est considérée comme un signe de possible intoxication.
Vitamine D et calcium : un combat commun.
L’intérêt de l’association calcium/vitamine D sur la prévention des fractures est démontré depuis plusieurs années, alors que la mise en évidence de l’efficacité antifracturaire de la vitamine D seule est plus récente (2). « Si le seul moyen de connaître le statut vitaminique D d’un individu est de faire un dosage sanguin, note le Pr Fardellone, pour le calcium, le dosage n’a pas d’intérêt, la calcémie étant toujours normale même dans l’ostéoporose. La seule approche possible chez la femme ménopausée est de lui faire remplir un questionnaire (voir site du GRIO : www.grio.org) afin de savoir si ses apports calciques alimentaires sont proches de 1 200 mg/j. S’ils sont insuffisants, il vaut mieux essayer d’augmenter les apports alimentaires que de donner en première intention un calcium pharmaceutique ». Le calcium alimentaire peut être apporté par des produits laitiers ou par des eaux minérales riches en calcium. Une supplémentation calcique avec ou sans vitamine D ne sera prescrite que si l’apport alimentaire ne peut être augmenté en sachant que des études d’observation suggèrent qu’un risque accru d’infarctus du myocarde pourrait être associé à des apports de calcium supérieurs à 2 g/j. « Aussi, précise le Pr Fardellone, les apports calciques alimentaires d’un individu doivent être calculés et ajustés en fonction des besoins. Pour un sujet qui absorbe déjà 700 mg/j de calcium, la prescription d’un seul comprimé à 500 mg est suffisante. Si le sujet est très carencé, 1 g peut être nécessaire ».
Les seules contre-indications à la vitaminothérapie D, sont les hypercalciuries, les lithiases. Dans ce cas, la vitamine D doit être prescrite seule, sans calcium. Les apports de calcium doivent être autour de 800 mg/j. S’ils sont supérieurs, il y a un risque d’hypercalciurie qui favorise la lithiase. S’ils sont inférieurs, le risque est l’hyperoxaliurie qui favorise aussi la lithiase…
D’après un entretien avec le Pr Patrice Fardellone, CHU d’Amiens.
(1) Benhamou CL et coll. La vitamine D chez l’adulte. Recommandations du GRIO. Presse Med. 2011 ;40:673-82.
(2) Bischoff-Ferrari HA et coll. Prevention of nonvertebral fractures with oral vitamin D and dose dependency: a meta-analysis of randomized controlled trials.Arch Intern Med 2009;169(6):5.51-61.
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