Les rhumatismes inflammatoires chroniques comme les maladies auto-immunes systémiques majorent le risque infectieux, qui est encore augmenté par les traitements de fond, que ce soient les corticoïdes, le méthotrexate, les traitements ciblés (biomédicaments et inhibiteurs de JAK) ou les immunosuppresseurs. C’est pourquoi il faut vacciner avec soin en tenant compte de la réponse possiblement amoindrie sous traitement. Autant que possible, il faut également anticiper, c’est-à-dire vacciner avant l'initiation de ces thérapeutiques, quand cela est possible. Sans oublier le risque intrinsèque de la vaccination par vaccins vivants, à ce jour formellement contre-indiqués par le Haut Comité de la santé publique chez ces sujets sous traitements de fond.
Réévaluer tous les ans le statut vaccinal
« Tous les vaccins inactivés du calendrier vaccinal doivent être administrés sans réserve sous immunosuppresseurs. Mais les délais de revaccination doivent être réduits, vu la moindre réponse vaccinale et la décroissance accélérée des taux d’anticorps », résume le Pr Jacques Morel (CHU de Montpellier). Le DTPolio doit donc être refait tous les 10 ans et le vaccin acellulaire de la coqueluche tous les 20 ans. Il faut aussi penser à administrer le vaccin de l’hépatite B au plus tôt, et ajouter les vaccins inactivés supplémentaires formellement recommandés chez ces patients. Ainsi, il convient de vacciner tous les ans contre la grippe et le pneumocoque en utilisant le vaccin conjugué (Prevenar 13) à la première injection, puis, 2 mois après, le vaccin non conjugué à 23 valences (Pneumovax) avec un rappel tous les 3 ans par ce dernier.
Il faut en outre, depuis les nouvelles recommandations de l’Eular en 2017, réévaluer systématiquement tous les ans par l’interrogatoire le statut vaccinal, sans attendre un changement de traitement. De plus, il convient d'essayer de vacciner avant la mise sous immunosuppresseur, en particulier avant l’introduction du rituximab. Enfin, chez les patients n’étant pas sous traitement de fond à l’exception de la sulfasalazine et de l’hydroxychloroquine, il faut envisager les vaccins – vivants – contre le zona et contre la rougeole, les oreillons et la rubéole (ROR) (1).
Un essai original rebat les cartes
Une étude coréenne présentée il y a quelques mois au congrès de l’American College of Rheumatology (ACR) est venue rebattre les cartes : ses résultats montrent qu’interrompre quinze jours le méthotrexate permet d’améliorer l’efficacité vaccinale. Cet essai randomisé a en effet comparé l’efficacité d’un vaccin grippal, comportant quatre différentes souches virales, administré d’une part classiquement sous traitement de fond par méthotrexate et d’autre part après quinze jours d’arrêt. Résultat, l’interruption du méthotrexate est associée à une meilleure réponse vaccinale. Le taux d’anticorps, titré un mois après, est majoré pour chaque souche sans qu’il y ait plus de poussées que dans le groupe maintien. De plus, un bénéfice en pratique clinique est observé, puisque à 6 et 12 mois les patients du groupe vacciné après interruption décrivent, à l’interrogatoire, trois fois moins d’infections. « Cet essai devrait modifier rapidement les recommandations et les pratiques », assure le Pr Morel.
D’après un entretien avec le Pr Jacques Morel (CHU de Montpellier)
(1) Furer V., Rondaan C., Heijstek M. W.
et al. « 2018 Update of EULAR recommendations for vaccination in adult patients with autoimmune inflammatory rheumatic diseases »,
Annals of the Rheumatic Diseases,10.1136/annrheumdis-2018-213225 Published online first: 6 April 2018
(2) Park J. K., Lee Y. J., Shin K.
et al. « Impact of temporary methotrexate discontinuation for 2 weeks on immunogenicity of seasonal influenza vaccination in patients with rheumatoid arthritis: a randomized clinical trial »,
Annals of the Rheumatic Diseases, mars 2018, en ligne
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