« AU DÉPART, certains professionnels ont vu arriver les outils de télémédecine avec une certaine méfiance. Mais une fois qu’ils ont commencé à les utiliser, ils ne pouvaient, en général, plus s’en passer. Dans mon équipe, par exemple, certains médecins préféreraient aujourd’hui qu’on leur enlève le téléphone plutôt que la télémédecine », relate, un sourire aux lèvres, le Dr Jacques Chanliau, néphrologue et médecin-directeur de l’Association lorraine pour le traitement de l’insuffisance rénale (ALTIR). Selon lui, il existe aujourd’hui deux grands axes de développement de la télémédecine en néphrologie. « Le premier concerne la mise en place d’unités de dialyse médicalisées et télésurveillées. Le second vise à améliorer le suivi à domicile de patients plus autonomes », explique le Dr Chanliau.
Des unités de dialyse télésurveillées.
La mise en place d’unités de dialyse médicalisées et télésurveillées va bien sûr s’appuyer sur les recommandations rendues publiques il y a quelques mois par la Haute Autorité de santé (HAS). « Il s’agit ici de structures de dialyse plus légères qui ne nécessitent pas la présence permanente d’un néphrologue. Celui-ci doit juste pouvoir intervenir dans un délai raisonnable. Cette exigence limitait jusque-là le développement de ces unités, qui ne pouvaient se trouver que près d’un centre de dialyse classique, pouvant alors compter sur la présence de néphrologues. Mais grâce à la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST) et à l’évolution de la télémédecine, ce blocage va pouvoir être levé. Désormais, on admet que des néphrologues peuvent intervenir à distance par le biais de la téléconsultation et de la télésurveillance », souligne le Dr Chanliau.
Les conditions de mise en place de ces structures ont été définies de manière précise par la HAS. « Il faut d’abord qu’elles comportent une télésurveillance, c’est-à-dire la récupération d’un certain nombre de données concernant le patient et leur mise à disposition des néphrologues. Il faut aussi prévoir un système de téléconsultation qui puisse permettre, si nécessaire, la mise en contact du patient avec le spécialiste », indique le Dr Chanliau, en précisant que quelques unités de ce type existent déjà en France, en particulier en Bretagne et en Rhône-Alpes. « Mais beaucoup de structures sont en cours de constitution. Elles pourraient voir le jour dans le cadre des schémas régionaux d’organisation sanitaire 2011. Les schémas précédents avaient limité ces installations du fait de l’absence de proximité des néphrologues », ajoute le Dr Chanliau.
Le suivi des patients à domicile.
Le deuxième grand axe de développement de la télémédecine en néphrologie concerne le suivi des patients à domicile. « Il s’agit d’une télésurveillance qui permet d’avoir des informations quasi quotidiennes de la part des patients, que ces derniers saisissent sur leur ordinateur ou qui sont saisies par une infirmière. Ce suivi permet au néphrologue d’intervenir très vite en cas de risque de complications. Le problème concerne surtout la quantité d’informations qui arrive par ce biais. Cela nécessite la mise en place d’un système de tri expert pour permettre au spécialiste de voir l’ensemble de la population traitée », souligne le Dr Chanliau, en ajoutant qu’il s’agit d’un défi à relever pour ce type de télémédecine. « En bref, si on commence à maîtriser la saisie et le transfert des données, on se retrouve actuellement face à un nombre important d’informations qu’il faut trier pour pouvoir les utiliser ».
Quoi qu’il en soit, la télésurveillance des patients à domicile apparaît d’ores et déjà fort prometteuse. « Pour la première fois, par exemple, on a pu installer des patients insuffisants rénaux à domicile à Mayotte où il n’y a pas de néphrologue. Ces patients sont télésurveillées depuis l’Île de la Réunion », indique le Dr Chanliau, en ajoutant que le principal atout de la télémédecine réside dans l’amélioration de la prise en charge des patients et la prévention des complications par le biais de la transmission de données auxquelles les néphrologues n’avaient, jusque-là, pas accès. « Secondairement, cela permet d’optimiser le temps médical ce qui est important lorsqu’on connaît notre problème de la démographie ».
Selon le Dr Chanliau, environ 500 à 600 patients bénéficient aujourd’hui de ce télésuivi. « Toute la région Lorraine est télésurveillée. C’est aussi le cas d’une partie de la région Rhône-Alpes, de Paris et de l’Île de la Réunion. Des structures se mettent aussi en place à Cayenne et Tahiti », indique le Dr Chanliau, en précisant que cette télésurveillance devrait permettre le développement de la dialyse péritonéale, qui est un des objectifs des actuels schémas régionaux d’organisation sanitaire.
D’après un entretien avec le Dr Jacques Chanliau, médecin-directeur de l’Association lorraine pour le traitement de l’insuffisance rénale (ALTIR).
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