Le syndrome hémolytique et urémique (SHU) est une forme de microangiopathie thrombotique (MAT) qui touche essentiellement le rein. Le SHU se traduit par une insuffisance rénale aigue, une thrombopénie de consommation et une anémie hémolytique mécanique, traduisant la fragmentation des hématies au contact des thrombi intravasculaires. Les formes qui ne sont pas associées à une infection à germes sécréteurs de vérotoxines sont appelées SHU atypiques (SHUa). Le SHUa survient à tous les âges, de la période néonatale à l’âge adulte. Il peut être sporadique ou familial et son incidence est estimée à 0,3 cas par million d’habitants, soit entre 20 à 40 nouveaux cas par an en France. Les avancées dans la compréhension de la physiopathologie des SHU atypiques ont conduit à de profonds changements dans le diagnostic et surtout la prise en charge thérapeutique des patients atteints de cette maladie. Le SHUa est en effet associé dans plus de 60% des cas à des mutations sur un des cinq gènes codant pour le C3 et le Facteur B formant la C3 convertase alterne (mutations activatrices) et pour trois des protéines qui régulent cette convertase (le Facteur H, le Facteur I et MCP ou CD46). Le complément est normalement régulé de manière à ce que son activation n’ait lieu qu’au niveau des surfaces microbiennes, mais soit inhibée au niveau des surfaces intactes de l’hôte. Les mutations de ces protéines aboutissent à une perte de la protection des cellules endothéliales contre l’activation du complément. Cette dyrégulation du complément aboutit à la formation à la surface des cellules de l’hôte d’une C3 convertase, aboutissant en cascades au clivage de C5, étape finale avant la formation d’un complexe C5b9. La génération du complexe C5b9 à la surface des cellules endothéliales induit les lésions endothéliales à l’origine du SHUa. Ces avancées physiopathologiques ont débouché sur la mise d’un traitement spécifique et efficace du SHUa, l’inhibiteur du clivage du C5, l’eculizumab. L’eculizumab est un anticorps monoclonal qui a obtenu l’AMM pour le traitement du SHUa touchant les reins natifs et les greffons rénaux. Quatre études retrospectives non contrôlées ont montrés que l’eculizumab réduit le risque d’insuffisance rénale terminale de 80% à 15-20%.
Quels biomarqueurs de réponse au traitement ?
Le monitoring de l’efficacité du traitement par Eculizumab repose sur une évaluation clinique et biologique simple (thrombopénie, fonction rénale, hémolyse) et de tests biologiques permettant d’estimer si l’inhibition du complément par l’eculizumab est optimale : le CH50 (objectif : ‹ 10%) et dans un proche avenir le dosage du taux plasmatique résiduel de l’eculizumab libre. En-dehors des marqueurs classiques de thrombopénie, de fonction rénale, d’hémolyse et dans certains cas d’histologie rénale, nous ne disposons pas aujourd’hui de biomarqueurs fiables pour prédire la réponse du SHUa à l’eculizumab. Les marqueurs d’activation du complément (Ba, C5b-9 soluble, etc.) ou de souffrance endothéliale sont prometteurs mais nécessitent encore d’être évalués dans des études prospectives. La durée optimale du traitement du SHUa par eculizumab est une nouvelle question en suspens. L’idée d’un traitement par eculizumab à vie a été remise en question du fait des contraintes (perfusion/15 jours pendant des décennies), du risque de méningite à méningocoque du fait de l’inhibition du complément et du coût important du traitement. Par ailleurs, certains patients peuvent présenter des périodes longues de rémission sans aucun traitement particulier. La décision d’arrêter ou non l’eculizumab dépendra de plusieurs facteurs : présence ou non de mutations des gènes du complément et type de mutations, âge du patient, normalisation ou non des paramètres rénaux, souhait du patient, etc. Une étude prospective coordonnée par le groupe français d’étude du SHUa va évaluer le risque de rechute après l’arrêt de l’eculizumab au cours du SHUa et l’utilité de certains biomarqueurs dans la prédiction du risque.
Fremeaux-Bacchi V et al Clin J Am Soc Nephrol, 2013
Zuber J et al Nat Rev Nephrol, 2012
Noris M et al N Engl J Med 361:1676-87, 2009
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024