« LA PRÉVALENCE du syndrome métabolique, associant une obésité centrale avec un périmètre ombilical de plus de 102 cm et des facteurs de risque cardio-vasculaires, est pratiquement similaire à celle de l’adénome de la prostate dans la population masculine d’âge moyen, 60 ans. Le syndrome métabolique est entre autres impliqué dans deux affections urologiques : l’impuissance et l’adénome prostatique », a expliqué le Pr François Desgrandchamps.
Le syndrome métabolique est associé à une inflation du tissu adipeux viscéral pouvant se traduire par une obésité de type androïde. Au niveau biologique, il regroupe un ensemble de troubles métaboliques incluant une résistance à l’insuline, un hyperinsulinisme, une intolérance au glucose ou un diabète, une hypertension artérielle et des anomalies du métabolisme lipidique et de la fibrinolyse. Sa gravité résulte de la fréquence des complications cardio-vasculaires : « De larges études ont montré que le risque relatif d’infarctus du myocarde est 2 à 3 fois plus élevé ainsi que le risque de développement d’un diabète. »
Tissu adipeux et hypotestostéronémie.
Le tissu graisseux n’est pas un tissu inerte, mais un tissu endocrine : les adipocytes sécrètent de la leptine et transforment la testostérone en estradiol grâce aux aromatases ; l’estradiol agit sur l’hypophyse en diminuant la sécrétion de LH qui, elle-même, provoque une baisse de sécrétion de la testostérone. « Ainsi, précise le spécialiste, l’abondance de tissu graisseux s’accompagne d’une augmentation de leptine qui, en se liant à ses récepteurs sur les cellules de Leydig testiculaires, induit une baisse de la sécrétion de testostérone et donc une baisse de la libido. » À cela s’ajoute l’insulinorésistance qui caractérise le syndrome métabolique ; cette insulinorésistance entraîne une sécrétion accrue d’insuline par les îlots pancréatiques ; l’insuline circulante a des effets directs sur les cellules de Leydig et donc sur la baisse de testostérone. « Le surcroît de tissu graisseux est donc un des facteurs responsable de la baisse de la libido et d’impuissance. » Le second facteur est la baisse du monoxyde d’azote (NO) sous l’effet de l’insuline circulante. Le NO est un très puissant vasodilatateur. « Un des mécanismes de la sécrétion du NO dans le bas appareil génital est la traction de l’urothélium. Cela est illustré en clinique par les patients qui, se plaignant de troubles mictionnels, expliquent qu’ils tirent sur la verge pour faire venir le jet, ils étirent ainsi l’urothélium et, de fait, une vasodilatation est induite via la sécrétion de NO, s’ensuit une relaxation du muscle prostatique qui déclenche le jet urinaire. »
Le NO est impliqué dans la relaxation des corps caverneux, l’insulinorésistance baisse le NO et donc le syndrome métabolique participe aux troubles de l’érection.
Périmètre abdominal et HBP.
« L’insulin-like growth factor (IGF1) est un facteur de croissance qui agit directement sur les cellules prostatiques en les faisant grossir, de même l’estradiol participe à cette croissance cellulaire. Il existe donc une corrélation entre le périmètre abdominal et la taille de la prostate : statistiquement, plus on est gros, plus la prostate est grosse ! », explique le Pr Desgrandchamps.
En population générale, les patients ayant des troubles urinaires modérés à sévères ont statistiquement plus de dyslipidémie, d’hypertension et de tour de taille élevé, alors qu’ils n’ont pas d’IMC plus élevé.
« Plus de 30 000 hommes ont été suivis dans l’étude de Framingham et ont déclaré, entre autres, le temps passé devant la TV en heures par semaine. L’analyse des résultats (1) montre que, plus on est sédentaire, plus on a un risque d’être opéré d’un adénome de la prostate et/ou de se plaindre de symptômes mictionnels. La sédentarité, vecteur de syndrome métabolique, est impliquée dans l’apparition des symptômes urinaires et dans l’augmentation du risque opératoire (x 1,5), souligne-t-il. En revanche, poursuit-il, la marche est inversement liée au risque d’adénome de la prostate : 2 à 3 heures de marche par semaine réduisent de 25 % le risque d’adénome de la prostate. Accompagner le patient pour lutter contre la prise de poids et la sédentarité pourrait permettre de différer le traitement médicamenteux. »
Que proposer en pratique ? Il faut donc conseiller une bonne hygiène de vie (2) avec perte de poids, sevrage tabagique et une activité physique (après évaluation cardio-vasculaire en cas de facteur de risque CV), prévenir et traiter les comorbidités (HTA, dyslipidémies, diabète…). Au moment de la prescription d’un médicament pour HBP : il faut se préoccuper de son éventuel retentissement sur la sexualité et privilégier les médicaments qui la respecteront (3-5) (les extraits de plantes ont peu de conséquences sexuelles [5]) et garder en mémoire le fort impact négatif de l’effet nocebo (6).
Réunion organisée avec le soutien institutionnel des Laboratoires Abbott.
Références :
1. Platz EA et al. Arch Intern Med 1998;158:2349-56.
2. Derby CA et al. Urology 2000 ; 56 : 302-6.
3. Giuliano F. BJU Int 2006 ; 97(Suppl. 2) : 34-8.
4. Rosen RC et al. Eur Urol 2005 ; 47 : 824-37.
5. Saussine C et al. Prog Urol 2005 ; 15 (Suppl. 1) : 192-6.
6. Silverstri A et al.Eur Heart J 2003 ; 24 : 1928-32.
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