« Pour autant que nous sachions, il s'agit du premier outil personnalisé permettant d'estimer la survie globale des hommes après un diagnostic de cancer de la prostate. PREDICT Prostate est conçu pour les hommes qui ont le choix entre une simple surveillance ou un traitement (chirurgie, radiothérapie…). Près de la moitié des hommes chez qui un diagnostic de cancer de la prostate vient d'être posé sont confrontés à ce choix. Nous espérons que cet outil offrira une estimation objective et plus juste pour apporter une information éclairée aux hommes tout en dialoguant avec leur médecin », explique le Dr David Thurtle, chercheur en urologie à l’université de Cambridge et à l’hôpital Addenbrooke affilié (Royaume-Uni).
« Nous pensons que cet outil pourrait réduire considérablement le nombre de traitements inutiles et potentiellement dangereux que les patients reçoivent. Il ne s'agit pas de rationner les traitements. Il s'agit de donner aux patients et à leurs cliniciens le pouvoir de prendre des décisions établies sur les meilleures données possibles. Dans certains cas, le traitement sera la bonne option, mais dans de nombreux autres cas, les patients voudront évaluer la balance bénéfice/risque du traitement par rapport à la survenue d'évènements indésirables et à l'efficacité établie. »
« Pour les hommes chez lesquels un traitement est nécessaire, l’outil donnera aussi une estimation réaliste de leur survie après le traitement », ajoute le Dr Vincent Gnanapragasam (Université de Cambridge) qui a supervisé ce travail publié dans la revue PLOS Medicine.
Construction du modèle de prédiction de la survie
L’équipe a développé le modèle "PREDICT prostate" en utilisant les données d’un registre britannique du cancer (NCRAS) portant sur près de 10 100 hommes diagnostiqués avec un cancer de la prostate non métastatique (entre 2000 et 2010), ainsi que les données sur 2 546 hommes diagnostiqués à Singapour (cohorte de validation). Le modèle - qui estime la survie à 10 et 15 ans - a été construit et validé en utilisant les variables suivants : l'âge, le taux de PSA (antigène spécifique de la prostate), le grade histologique de la tumeur, les données de la biopsie, le stade de la maladie et le traitement principal. Ce nouveau modèle est capable de prédire la survie avec un taux d’exactitude de 84 % alors que celui des classifications actuelles est de l'ordre de 60 à 70 % des cas.
Les Drs Thurtle et Gnanapragasam ont depuis réalisé une étude randomisée avec la participation de près de 200 spécialistes du cancer de la prostate ayant un accès ou pas à cet outil. Dans la plupart des cas, le clinicien surestimait le risque du patient de décéder par cancer, en comparaison à l'estimation apportée par PREDICT ; il recommandait ainsi le traitement dans de nombreux cas et surestimait le succès de ce traitement. Lorsque les cliniciens avaient accès à l'outil, ils étaient moins enclins à recommander un traitement pour des cancers de bon pronostic.
Collaboration indispensable avec le clinicien
Les chercheurs préviennent qu’il est fortement recommandé de n’utiliser l’outil qu’en dialoguant avec un clinicien. De plus, l’outil n’a aucun intérêt pour les hommes ayant une maladie très agressive ou une atteinte métastatique au moment du diagnostic.
Le cancer de la prostate est aujourd’hui le cancer le plus fréquent chez l’homme, avec 71 000 nouveaux cas par an en France ; plus d’un homme sur neuf déclarera un cancer de la prostate au cours de sa vie (souvent entre 60 et 90 ans). La progression de ce cancer est très variable : lente et d'évolution favorable dans la plupart des cas, mais dans d’autres cas, le cancer agressif et d'évolution rapidement défavorable. C’est la 3e cause de décès par cancer chez l’homme.
« Nous décrivons cet outil comme une méthode d'aide à la décision pour les hommes placés devant le choix entre une surveillance active et un traitement radical du cancer de la prostate récemment diagnostiqué. Il est destiné à personnaliser les informations, à aider un homme à contextualiser son nouveau diagnostic et à fournir des estimations sur sa survie à long terme », précise au « Quotidien » le Dr David Thurtle.
« Nous travaillons à sa traduction dans d’autres langues et j’imagine que le français et l’espagnol seraient parmi les premières langues choisies, confie-t-il. Nos prochaines étapes consisteront à réaliser d'autres validations externes dans des cohortes indépendantes, nous espérons dans des cohortes d'hommes non caucasiens également. Nous travaillons également sur un modèle avancé pour les hommes chez qui on a diagnostiqué une maladie avancée nécessitant une hormonothérapie », laisse-t-il entrevoir.
D. Thurtle et al., PLOS Medicine, 10.1371/journal.pmed.1002758, 2019
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024