Le NEJM fait partie des revues médicales les plus cotées et influence à ce titre fortement les pratiques. Quelles garanties sont mises en place pour assurer la fiabilité des études publiées ?
Dr Éric Rubin : Il y a essentiellement deux critères d’acceptation des travaux : le travail est-il important et est-il très probable qu’il soit exact ? Pour déterminer ces deux facteurs, les articles de recherche sont évalués par au moins deux rédacteurs internes et, s’ils sont jugés convaincants, par des évaluateurs externes. Les manuscrits dont la publication est envisagée après examen externe sont discutés lors de réunions hebdomadaires rassemblant l’ensemble des éditeurs, où la décision provisoire de procéder à la publication est prise. La grande majorité des manuscrits font ensuite l’objet d’un examen statistique et, s’ils sont toujours considérés comme solides, sont renvoyés aux auteurs avec des commentaires spécifiques sur la modification du manuscrit. Après des cycles de révision impliquant des auteurs, des éditeurs adjoints et des éditeurs statistiques, chaque manuscrit est soumis à une révision linguistique avant sa publication.
Tous les manuscrits que nous considérons font donc l’objet d’un examen externe et interne approfondi. Nous pensons que ce système nous permet de considérer attentivement la qualité de ce que nous publions. Cependant, il n’est pas une assurance contre les rares cas de fraude délibérée. Nous n’avons aucune capacité d’enquête et comptons sur les examinateurs pour détecter les fraudes et erreurs avant et après la publication.
La crise du Covid et le LancetGate vous ont-ils amenés à modifier vos procédures ?
Dr É. R. : Rien n’a changé au journal, même face à l’épidémie actuelle. Nous travaillons toujours dur pour assurer la qualité de ce que nous publions. Et si nous avons été amenés à examiner certains manuscrits sur une base accélérée, cette pratique n’est pas nouvelle pour nous et la rigueur apportée à cet examen est identique, lequel est simplement exécuté plus rapidement. Concernant les données sources, nous formulons actuellement des exigences plus spécifiques aux auteurs.
Les critique émises ces derniers temps vis-à-vis de la fiabilité des grandes revues vous semblent-elles justifiées ?
Dr É. R. : Nous sommes soumis à un examen public et à la critique, ce dont nous nous félicitons, bien que nous ne soyons pas toujours d’accord avec les reproches qui nous sont faits.
Quant au débat sur l’accès aux publications, les travaux que nous publions sont largement disponibles via des abonnements institutionnels dans le monde entier. Nous avons toujours rendu tous les travaux de grande importance pour la santé publique disponibles gratuitement dès leur publication (dont ceux liés au Covid-19), toutes les recherches accessibles de manière gratuite dans la plupart des pays à faible revenu (comme le prévoit le programme Hinari mis en place par l’OMS, ndlr) et toutes les recherches disponibles gratuitement six mois après la publication. De plus, les lecteurs peuvent s’inscrire pour un accès mensuel gratuit à un nombre limité d’articles.
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