Le Big Data, ou le passage systématique à l’analyse de données, a eu un impact majeur dans de nombreux domaines, la publicité, les marchés financiers ou l’industrie, mais son utilisation dans le domaine de la santé reste pour l’instant très limité. « La révolution numérique se cantonne dans un premier temps à faire plus vite ce que l’on faisait déjà, mais cela ouvre aussi les portes pour de vrais changements de paradigme », souligne le Pr Pierre-Antoine Gourraud. Dans le cadre de la médecine de précision, où le traitement « personnalisé » est idéalement choisi en fonction de multiples paramètres, l’analyse des données des patients colligées à grande échelle peut constituer une aide précieuse pour les praticiens.
Dans la sclérose en plaques (SEP), caractérisée par une hétérogénéité inter et intra-individuelle et pour laquelle il y a de nombreuses options thérapeutiques, l’une des difficultés est de choisir le bon traitement au bon moment. Quand commencer ? Quand interrompre ou changer ?
Un traitement personnalisé à partir des données des autres patients
« Nous avons travaillé sur un nouveau concept, celui de la contextualisation, où les données d’un patient sont interprétées en fonction du contexte populationnel qui s’y rapporte », indique le Pr Gourraud. À l’instar de ce qui se fait pour les courbes de croissance staturo-pondérale, la normalité des paramètres d’un patient donné souffrant de SEP peut être située sur une courbe. « L’application iPad, MS Bioscreen (1), que nous avons développée aux États-Unis au sein de l’université de Californie San Francisco permet d’interpréter la trajectoire d’un patient (motricité, cognition, imagerie, facteurs de susceptibilité génétique…) en fonction de celles des autres. Les données colligées portent sur une évolution de dix ans, ce qui peut permettre aussi d’anticiper le devenir d’un patient et de tester des scénarii de traitement. Ainsi, de façon paradoxale, le traitement est personnalisé en faisant appel aux autres. Il se crée une solidarité entre patients par le biais de leurs données », note Pierre-Antoine Gourraud.
L’application, mise à jour en permanence grâce à la méthode agile, est en cours de validation clinique, par une étude cross sectionnelle.
Pour l’instant, les données servant de base à l’application sont issues essentiellement de cohortes de recherche. L’équipe du Pr Gourraud travaille à établir une connexion directe entre les données électroniques médicales hospitalières et l’application sur tablette. La France pourrait d’ailleurs jouer un rôle leader grâce aux données de l’observatoire de la SEP et à ses systèmes de santé centralisés. Les données pourraient demain provenir aussi des patients inclus dans les essais cliniques.
« Les praticiens ne doivent pas avoir peur de ce type d’application ; c’est un outil qui donne accès à de nouvelles mesures et qui est conçu pour prolonger leur intuition, leur expérience », conclut le Pr Gourraud.
D’après un entretien avec le Pr Pierre-Antoine Gourraud, Université de Californie San Francisco, et CHU de Nantes
(1) Gourraud PA et al. Ann Neurol 2014;76:633 – 42
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