Sur les 47 089 effets indésirables enregistrés en 2015 en France par les centres régionaux de pharmacovigilance, seulement 2 338 étaient déclarés directement par des patients. Au niveau européen, les 48 782 notifications émanant de patients représentaient l’an passé à peine 4 % de l’ensemble des signalements à l’agence européenne des médicaments (EMA).
Dans ce contexte, le recours aux réseaux sociaux est très sérieusement envisagé dans la surveillance du médicament du côté des patients. Aujourd’hui, 50 % des Français sont présents sur ces réseaux – Facebook recensant à lui seul 31 millions d’utilisateurs actifs dans l'Hexagone. Avec le développement des technologies « big data » et de « machine learning » (apprentissage statistique), des solutions sont actuellement testées au niveau national et européen. L’objectif est de repérer, dans cet énorme flux des réseaux sociaux et forums santé, des signaux potentiels d’effets indésirables ou de mauvais usages de produits, exploitables dans le circuit réglementaire.
Remonter le temps
Soutenu par l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), le projet de recherche Vigi4med consiste en l’analyse de plus de 60 millions de messages extraits d’une vingtaine de forums santé en langue française. « Nous avons mis au point des méthodes efficaces de traitement automatique du langage capables de repérer des effets indésirables qui ne sont pas dans les dictionnaires », et servant de référentiels, explique Cédric Bousquet, pharmacien, praticien hospitalier au CHU de Saint Étienne et coordinateur du projet.
« Si l’on veut vraiment utiliser les réseaux sociaux comme système de surveillance du médicament, il faut mettre de gros tuyaux qui aspirent vite et bien l’info », précise le Dr Stéphane Schück, médecin de santé publique et président de Kappa santé. Sa société développe une « solution opérationnelle », « totalement automatisable », dans le cadre du projet ADR-PRISM. Ce dernier entend mettre à disposition des équipes de pharmacovigilance les messages des patients dans les forums et autres lieux de discussions sur Internet. « On va y trouver des corrélations, des signaux qui ont une certaine dynamique et qui peuvent être tracés au cours du temps », explique-t-il.
Très bonne spécificité
Ces signaux de pharmacovigilance intéressent l’industrie pharmaceutique, à l’image de Sanofi qui participe au projet Web-RADR. Ce consortium sous l’égide de l’EMA œuvre à la création d’algorithmes capables d’analyser automatiquement les échanges sur ces réseaux sociaux. Le laboratoire teste aussi une technologie de Kappa Santé dans le cadre d’un projet pilote autour de trois molécules. La détection de signaux à partir de forums de patients a montré une « sensibilité moyenne » et une « très bonne spécificité », relève le Dr Stéphanie Tcherny-Lessenot, responsable de l’unité de pharmacoépidémiologie chez Sanofi.
Selon Patrick Maison (ANSM), « l’espoir est de pouvoir combler certains pans où l’on manque de moyens d’information », comme le mésusage de produits. « Les retours seront peut-être limités, mais il n’est pas possible de se passer de cet outil-là ».
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