En septembre, le ministre de la Santé Olivier Véran présentait le 5e plan national pour les soins palliatifs (2021-2024), doté de 171 millions d'euros, visant à « combler les inégalités d'accès » et à développer l'accompagnement de la fin de vie à domicile.
Son objectif est notamment de garantir « une prise en charge adaptée et de proximité », en fonction des besoins des territoires, alors que la demande sera de plus en plus forte dans les prochaines années. Près de 5 millions d’euros seront mobilisés dès 2021 pour renforcer les équipes mobiles de soins palliatifs. Malgré ces enjeux, peu d’informations existent sur les besoins potentiels en soins palliatifs, constate l'Observatoire régional de santé (ORS) francilien, qui se propose d'y voir plus clair, à la faveur d'une étude* récente.
Environ deux tiers des décès auraient nécessité des soins palliatifs
De fait, les statistiques sont lacunaires. Selon des enquêtes sur ce sujet menées dans plusieurs pays, « entre 41 % et 69 % de l’ensemble des décès en France auraient pu bénéficier de soins palliatifs ». Le Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie (CNSPFV) estimait, de son côté, qu'en 2014, 343 500 patients auraient nécessité des soins palliatifs en fin de vie (soit 62 % des décès).
Pour évaluer les besoins potentiels à l'échelle de l'Île-de-France, l'ORS s'est donc penché sur les causes médicales de décès pour la période 2013-2015. Il s'avère que plus de six Franciliens décédés sur dix auraient eu besoin d'une prise en charge en soins palliatifs (« entre 61 % et 79 % », selon les critères d'analyse). Plus précisément, 31 % présentaient une fin de vie avec une période de déclin rapide, typique des cancers, 21 % des périodes de déclin graduel, typiques des défaillances d’organes et 9 % des déclins longs, associées aux personnes âgées et démentes. Près de la moitié des décès (48 %) auraient nécessité une prise en charge de la douleur, essentiellement pour des cancers et des maladies cardiovasculaires. Les besoins potentiels se révèlent particulièrement importants en Seine-et-Marne et dans le Val-d’Oise, et dans une moindre mesure en Essonne et en Seine-Saint-Denis.
L'Observatoire régional de santé s'est ensuite employé à quantifier la prise en charge de soins palliatifs en milieu hospitalier (établissements, HAD), grâce au Système national des données de santé (SNDS) chez les personnes de plus de 18 ans décédées en 2015. Ainsi, parmi les Franciliens « dont la cause initiale de décès suggère qu’ils auraient pu avoir besoin de soins palliatifs », 43 % en ont effectivement bénéficié à l'hôpital au cours des 12 mois précédant la mort. Parmi ces personnes, ce sont les moins de 75 ans et les personnes avec « une trajectoire de fin de vie typique des cancers » qui ont le plus bénéficié de soins palliatifs hospitaliers.
À l’inverse, les patients avec une trajectoire évoquant des défaillances d’organes étaient moins susceptibles de recevoir des soins palliatifs à l'hôpital (19 %), tout comme les patients âgés et atteints de démence (24 %). Et les données disponibles ne permettent pas de savoir si ces personnes ont été davantage prises en charge par la médecine de ville ou pas du tout. D'où la nécessité de quantifier les soins palliatifs dispensés en libéral pour comprendre les trajectoires de fin de vie dans les territoires, plaide l'étude.
Le domicile encore peu mobilisé
L'étude s'attache aussi à observer le lieu de décès des patients qui auraient eu besoin de soins palliatifs, toujours sur les données 2015 du SNDS. Si, à l’échelle nationale, 85 % des individus (sans maladie grave) déclarent vouloir vivre leur fin de vie à domicile, dans la réalité, 64 % des personnes avec des besoins en soins palliatifs décèdent… à l’hôpital, seulement 22 % à domicile et 11 % en institution (Ehpad par exemple).
En Île-de-France, ce sont même 75 % des personnes ayant besoin de soins palliatifs qui décèdent à l’hôpital. « La grande majorité de la population nécessitant des soins palliatifs les reçoit à l’hôpital, du moins en ce qui concerne leurs derniers jours ou heures de vie », indique l'Observatoire. Les décès à domicile et en institution sont beaucoup plus rares (11 % dans les deux cas). Cependant, ils sont plus élevés chez les personnes habitant les communes les plus favorisées de la région et chez les personnes âgées dépendantes. « Si l’évaluation des lieux de décès est un critère utile, il n’est pas suffisant pour estimer la qualité de la prise en charge en fin de vie », nuance l'ORS. Il invite toutefois les politiques publiques à « questionner la capacité de l'offre libérale à proposer des soins médicaux et des supports sociaux » pour une fin de vie à domicile, au vu de la très forte proportion de décès à l’hôpital.
* Réalisée à la demande du conseil régional et soutenue par l'agence régionale de santé (ARS)
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