Cet été a marqué une étape supplémentaire dans l’escalade identitaire qui taraude actuellement la société française. Un collectif, crée en 2016, baptisé « Globule noir » a entrepris, au prétexte de la lutte contre le racisme et se déclarant « racisées afro-descendantes », de publier sur Twitter une annonce pour le moins étonnante : « Nous recherchons une infirmière à domicile racisée pour des soins à domicile, dans le 13e arrondissement de Paris », terminant le texte par le hashtag #Soignantnoir. Dans la même veine, des comptes Twitter ont proposé des listes de médecins noirs, adresses et coordonnées à l’appui. La LICRA a immédiatement dénoncé ces pratiques et ce pour plusieurs raisons.
La première tient au principe fondateur de notre République : l’indivisibilité du peuple français. Il n’est pas admissible que, sous couvert de lutte contre le racisme, on se mette à faire des listes de citoyens en fonction de leur couleur de peau. Il n’est pas admissible non plus que la fourniture de soins à un patient soit conditionnée par la couleur de peau du médecin et nous avons entrepris de saisir la justice pour que cette pratique discriminatoire soit sanctionnée comme telle.
La seconde tient au sort qu’il faut faire à cette idée que le raciste aurait une couleur de peau invariable. Ce n’est pas parce qu’un médecin est blanc qu’il est raciste. Ce n’est pas parce qu’un médecin est noir qu’il ne l’est pas. Cette dichotomie inepte, qui vise à organiser le monde, relève d’une essentialisation inacceptable des groupes en fonction de la couleur de leur peau. Dieudonné M’Bala M’Bala, multirécidiviste des condamnations pour incitation à la haine raciale, est la preuve vivante que le racisme, la haine de l’autre n’a pas de couleur.
Notre système de santé n'est pas raciste
La troisième tient au combat que nous devons mener collectivement contre ceux qui distillent l’idée d’un racisme systémique dans notre pays. Notre système de santé n’est pas raciste. Nos facultés de médecine ne sont pas des incubateurs d’on en sait quel racisme d’État.
Pour étayer leur démarche, ces collectifs, appuyés par des soutiens nombreux sur les réseaux sociaux, ont expliqué que chacun avait le droit de choisir son médecin comme il l’entendait et nous avons reçu des témoignages de personnes noires indiquant qu’elles préféraient être soignées par des médecins noirs et des personnes juives par des médecins issus de leur communauté.
Il est bien évident que la liberté individuelle dans le choix d’un personnel de santé, en fonction de critères intimes et personnels, est absolue. Mais il y a une différence singulière entre l’exercice de cette liberté individuelle et le fait de faire des listes collectives et publiques de médecins noirs, qui plus est à leur insu, ou de publier une annonce de service interdite aux blancs.
De même, on nous a opposé le fait qu’il existait des associations regroupant des médecins juifs et que cela ne choquait personne. On aurait pu aussi citer des associations communautaires comme les Médecins Africains de France. Ces regroupements associatifs et affinitaires sont évidemment naturellement acceptables dans la mesure où l’adhésion à ces collectifs repose sur le choix des médecins concernés. Là encore, il y a une différence de nature singulière entre ces pratiques, qui ne retirent rien à personne et n’interdisent rien à quiconque, et celles qui consistent à installer dans l’opinion le postulat raciste et politique qu’un médecin blanc ne pourrait pas soigner une personne noire parce qu’il serait forcément, en tant que blanc, raciste.
Cette affaire estivale montre une chose : le repli identitaire rend fou et conduit, sous les applaudissements de certaines organisations syndicales minoritaires, à indexer toutes nos pratiques à la couleur de la peau et à dresser fièrement des listes de médecins en fonction de leur épiderme, comme si, d’ailleurs, leur qualité professionnelle était meilleure à raison de cette appartenance. Cette logique doit être combattue avec la dernière énergie afin que nos enfants ne grandissent pas dans une société en noir et blanc et qui serait, et pour cause, l’échec de l’universalisme républicain.
EXERGUE : Il y a une différence entre l’exercice de la liberté individuelle et le fait de faire des listes collectives et publiques de médecins noirs
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