ENVIRON 58 % des Français meurent dans un établissement de santé : plus de 49 % dans un hôpital, public ou privé, et 8 % en clinique. Au niveau international, ces statistiques placent la France dans une position intermédiaire, tant pour le pourcentage de morts à domicile (27 %) que pour celui des morts en établissements de soins, indiquent les auteurs du rapport de l’IGAS, le Dr Françoise Lalande et Olivier Veber. La grande majorité (86 %) des décès qui surviennent en établissement de soins ont lieu dans des services de courte durée, 12 % en soins de suite et de réadaptation et 2 % en hospitalisation à domicile. Alors que les hôpitaux publics assurent 62 % des séjours globaux des malades, ils comptabilisent près de 78 % des décès.
Un peu plus de 22 % des personnes qui meurent dans un établissement de soin trépassent dans un service de réanimation ou dans une unité de soins intensifs, des services dans lesquels « les exigences techniques l’emportent largement sur les besoins de confort des malades et d’accueil des proches ». Cette proportion s’élève à 36 % en CHU. « Plusieurs études montrent que le décès a lieu de plus en plus souvent après que les réanimateurs ont décidé d’arrêter les soins, mais que des thérapeutiques agressives et des gestes diagnostics invasifs sont encore trop souvent entrepris alors qu’on a perdu l’espoir d’une amélioration clinique », notent les auteurs. Seulement 20 % des malades qui meurent à l’hôpital bénéficient de soins palliatifs financés, et il s’agit dans plus de 80 % des cas de cancéreux. Parmi eux, 3 % ont été accueillis dans des unités de soins palliatifs « qui constituent un réel progrès ».
Un échec.
À l’exception des réanimateurs et des responsables de soins palliatifs, le personnel hospitalier, « et notamment médical », vit la mort comme « un échec ». Les morts d’origine inconnue sont trois à six fois plus fréquentes en France qu’en Grande-Bretagne ou aux États-Unis et celles qui ont lieu à l’hôpital ne donnent pratiquement pas lieu à autopsies. La mortalité provoquée par les actes médicaux et les soins hospitaliers n’est pas connue avec précision et ne fait pas l’objet d’une « information transparente ».
De manière générale, la prise en charge de la mort ne figure pas « explicitement » parmi les missions de l’hôpital. L’essentiel des moyens nécessaires à l’accompagnement des patients et des familles n’est jamais évalué. « Cette situation freine les initiatives, dans la mesure où ces charges sont perçues par les services comme un surcroît de travail qui n’est pas pris en considération ».
Pour les deux rapporteurs, mourir dans la dignité est une « aspiration essentielle » que l’hôpital doit rendre possible. Ils préconisent de confier aux hôpitaux, par une disposition législative, la mission de s’assurer que « la mort des malades (...) se passe le mieux possible, en permettant au mourant, s’il le souhaite, de prendre les décisions le concernant, en respectant ses croyances et en accueillant ses proches ».
Bonnes pratiques.
Comment améliorer la prise en charge des personnes en fin de vie dans les établissements de soins ? Il ne s’agit pas d’imposer des pratiques précises,répondent les auteurs. Mais il conviendrait « d’inviter les établissements à élaborer et généraliser à l’ensemble des services des bonnes pratiques concernant des éléments majeurs d’un accompagnement de qualité » : annonce de la fin de vie, rôle des proches et des bénévoles, soins de support, hypothèse d’un retour à domicile, traçabilité du suivi des patients en fin de vie, modalités des prises de décision d’arrêt ou de limitation de traitement, etc.
Dans cette perspective, le périmètre des soins palliatifs doit être redéfini « et, par là-même, les modes de financement des soins des personnes en fin de vie ». Les services accueillant le plus de mourants pourraient s’organiser pour offrir « des conditions de fin de vie acceptables pour les malades et un accueil décent pour leurs proches ». Il faudrait, par conséquent, « humaniser les services de réanimation » et adapter les services d’urgence à l’accueil des patients en fin de vie. Les rapporteurs vont même plus loin en estimant nécessaire « d’encourager les établissements à assumer des fonctions mortuaires ». Enfin, ils proposent que les établissements de soins aient une obligation de prévention des deuils pathologiques et de suivi des soignants confrontés régulièrement à la mort.
Sur la base de ce rapport, la ministre de la santé Roselyne Bachelot devrait présenter, début février, un plan d’action.
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