Ce jeudi 23 juin, la cour d’appel de Paris devra trancher un conflit entre une patiente, Laura Nataf, et la caisse primaire d'assurance-maladie (CPAM) de Paris, portant sur un refus important de remboursement de soins. La patiente, victime d'un choc septique, a été greffée des deux mains et des deux avant-bras par un chirurgien français aux États-Unis. L'Assurance-maladie, condamnée en première instance et qui a fait appel de la décision, refuse de prendre en charge cette opération.
Les circonstances de l'affaire remontent à 2007. La patiente, alors en stage à Barcelone, est victime d’un choc septique. Plongée dans un coma artificiel, l’étudiante de 19 ans est rapatriée en France à l’hôpital Cochin (AP-HP). « À mon réveil je ne comprenais pas, puis je me suis rendu compte que j’avais un plâtre qui s’arrêtait à la moitié des bras », se remémore-t-elle dans « Le Parisien ».
Laura reprend dans un premier temps ses études avec des prothèses et, en septembre 2011, se rapproche de deux pontes – le Pr Laurent Lantieri, chirurgien plasticien à l'hôpital européen Georges-Pompidou (HEGP, AP-HP) et spécialiste de la greffe, et le Pr Jean-Michel Dubernard, chirurgien lyonnais à l'origine de la première greffe de main – aujourd’hui décédé.
Donner de l'espoir
En 2012, l'agence régionale de santé (ARS) donne son accord pour financer « des greffes composites de tissus vascularisés » au sein de l'HEGP, et Laura Nataf est inscrite sur la liste nationale d’attente en 2013. Durant trois ans, elle attendra qu'on l'appelle pour l'intervention mais cela n'arrivera pas. Faute de donneur compatible, l'opération ne peut finalement pas être pratiquée et l’hôpital se désengage de l’intervention.
Le Pr Lantieri se tourne alors vers le Pr Scott Levin, chirurgien au prestigieux hôpital Penn Medicine à Philadelphie, à qui il suggère de faire l'opération de Laura, ce qu'il accepte. Mais l’Assurance-maladie refuse de financer l’opération et propose en retour une prise en charge dans le cadre d'un programme expérimental français, aux Hospices civils de Lyon (HCL). La jeune femme, radiée de la liste nationale d’attente de greffe, décide malgré tout d'aller outre-Atlantique pour tenter l'opération. Grâce à une donneuse américaine, celle-ci est réalisée avec succès en août 2016.
Sauf qu'un an plus tard, l'hôpital de Philadelphie lui réclame plus de 900 000 dollars ! La patiente et son avocate entament des démarches pour demander un remboursement à l'Assurance-maladie, qui refuse de payer la lourde facture. L'avocate s'emploie à prouver « qu'en 2015-2016, la double greffe était irréalisable en France » et contacte le ministère de la Santé et le Défenseur des droits. « Je veux donner de l’espoir à d’autres, dire que, déjà, on peut être indemnisé et que, même lorsqu’on nous dit qu’une opération n’est pas possible, on a le droit d’aller chercher ailleurs », explique la jeune femme dans « Le Parisien ».
Refus motivé
En juillet 2021, la CPAM de Paris est condamnée à verser plus de 664 000 euros à la patiente, au titre d'une partie de ses soins. Un jugement dont elle a fait appel quelques semaines plus tard. Contactée au sujet de ce dossier délicat, l'Assurance-maladie estime toujours que son refus de prise en charge est « suffisamment motivé ». « En réponse à la demande d’accord préalable pour la prise en charge des soins aux États-Unis, introduite fin 2015, le médecin chef de la Cnam, en lien avec le ministère et l’agence de biomédecine, a dirigé Mme Nataf vers un programme expérimental ouvert aux HCL », rappelle l'Assurance-maladie.
Ce programme, souligne la Cnam, portait sur l’allogreffe bilatérale de mains et d’avant-bras, et lui aurait permis d’obtenir les soins nécessaires en France et l’assurance d’une prise en charge, mais « Mme Nataf a fait le choix de ne pas recourir à cette option ».
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