LE QUOTIDIEN : Qu’est-ce que l’inflammasome NLRP1 que vous venez d’identifier ?
ÉTIENNE MEUNIER : Les inflammasomes sont des complexes de plusieurs protéines situées à l’intérieur des cellules de notre organisme, et nous nous sommes aperçus, par hasard, que certains inflammasomes, les NLRP1, étaient présents dans les épithéliums pulmonaires. Nous les avons identifiés en travaillant sur des cellules épithéliales nasales et bronchiques de patients atteints de Covid, au moment du deuxième pic épidémique. Tout au long de nos travaux, ces échantillons nous ont été fournis par le CHU de Toulouse et l’institut Imagine. Au début, nous travaillions sur une cohorte d’une vingtaine de patients infectés et, aujourd’hui, nous en sommes à plus de 350 patients que nous continuons de « screener » les uns après les autres.
La question que nous nous posions au départ était : que se passe-t-il chez la majorité de patients qui ne développent pas de Covid sévère ? Pour essayer de comprendre, nous sommes allés regarder dans le répertoire de récepteurs immunitaires exprimés par ces cellules épithéliales. Parmi tous les récepteurs, nous avons donc trouvé le NLRP1 qui s’est avéré être un récepteur de l’infection au coronavirus.
Quelle est sa fonction ?
Ce capteur détecte l’infection par le Sars-CoV-2 puis se comporte comme un poison cellulaire, un leurre en quelque sorte qui se confond avec une protéine de coronavirus, tue la cellule et empêche ensuite la réplication du coronavirus.
Qu’apporte cette découverte sur la compréhension de la maladie ?
Selon notre hypothèse, il s’agit d’un récepteur présent chez les patients qui résistent aux formes graves du coronavirus. En effet, il empêche sa diffusion dans les parois nasales et bronchiques et limite l’inflammation à des symptômes plus bénins de type éternuements…
Aujourd’hui, nous cherchons à savoir s’il y a des altérations ou des pertes de fonction de ce récepteur chez les patients qui développent des formes graves ; et si, à l’inverse, les patients faiblement atteints ont des gains de fonction de ce récepteur. Notre hypothèse est que les cellules épithéliales pourraient potentiellement contrôler l’infection ou au contraire l’exacerber. Ce type de réactions a déjà été décrit chez des patients atteints d’autres pathologies, par exemple une grande réactivité à l’asthme, le développement de tumeurs cutanées et des inflammations cutanées ressemblant au psoriasis.
Cela fonctionne-t-il pour les différents variants ?
À ce jour, nous avons testé tous les variants et à chaque fois qu’un nouveau variant apparaît, nous le testons. D’ailleurs, pour Omicron, qui reste étrangement dans les voies supérieures, nous nous demandons s’il n’y a pas quelque chose dans cette nouvelle souche qui ferait que NLRP1 serait suractivé. Quoi qu’il en soit, nous sommes dans une stratégie d’adaptation immédiate, grâce à des tests rapides.
Quel est l’espoir en termes de traitements ?
Des molécules chimiques existent, mais elles n’ont pas encore été testées en modèle clinique. Il faudrait donc maintenant vérifier si elles sont capables de booster ou au contraire d’inhiber le récepteur NLRP1.
* R. Planès et al, Molecular Cell, mai 2022. doi.org/10.1016/j.molcel.2022.04.033
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