LE PR VINCENT MEININGER, 65 ans, professeur de neurologie à la Pitié-Salpêtrière, est l’une des références mondiales de la SLA, à laquelle il se consacre depuis 30 ans. La maladie de Charcot, il la découvre au centre diagnostic de l’Hôtel-Dieu. « En 1981, j’ai été amené à voir plusieurs patients et je me suis progressivement rendu compte qu’il n’existait ni annonce diagnostique, ni prise en charge. Les neurologues laissaient les malades livrés à eux-mêmes, ou à peu près, dans le non-dit, sans leur expliquer la gravité du pronostic. Et puis, j’ai rencontré un malade, Guy Serra, qui voulait fonder une association. »
En1985 naissait l’ARS, association pour la recherche sur la SLA, avec le soutien du Pr Jean Émile, au CHU d’Angers. C’est un parent de malade, Gérard Benéteau, qui succédera comme président à Guy Serra, à la mort de ce dernier. Car les malades meurent inexorablement. En 1986, le Pr Meininger met en place une prise en charge multidisciplinaire. En 1989, s’ouvre à l’hôtel Dieu (Paris) le premier centre SLA, suivi en 1991 d’un deuxième au CHU d’Angers. Il en existe aujourd’hui 17 en France où les malades et leurs familles sont accueillis. Ils suivent 4 900 malades (soit 90 % des SLA), dont 1 250 nouveaux chaque année. L’annonce de la maladie est codifiée et la prise en charge sociale immédiate.
L’amélioration de la survie.
Deuxième volet du combat anti-SLA, il fallait montrer que la survie des patients avait un intérêt, comme en cancérologie. « J’ai convaincu Rhône-Poulenc de mener un premier essai thérapeutique avec 150 malades. » C’est ainsi que le Pr Meininger découvre l’action neuroprotectrice significative du riluzol. Les essais s’enchaînent. Le Rilutek (riluzol), associé à la prise en charge précoce des patients, notamment de leurs difficultés respiratoires, permet d’accroître leur espérance de vie de 20 %. Certains patients, dont la forme est moins agressive, obtiennent presque dix ans de survie.
Mais pour le clinicien, fondateur du Groupe français des maladies du motoneurone, l’espoir des malades se tourne aujourd’hui vers la recherche fondamentale, comme celle menée par Séverine Boillée, 37 ans. La jeune chercheuse de l’INSERM va bénéficier de l’installation du centre de recherche de l’Institut du cerveau et de la moelle épinière au sein de la Pitié-Salpêtrière. L’ICM vient en outre d’obtenir un titre d’Institut hospitalo-universitaire (IHU) pour son projet de centre de neurosciences translationnelles, destiné à amplifier les liens de la recherche fondamentale et de la recherche clinique et industrielle. Les motoneurones, c’était déjà son sujet de thèse, passée en France en 2001 et dirigée par Marie-Pierre Junier, dans le laboratoire de Marc Peschanski. « On travaillait sur des souris qui présentaient une dégénérescence juvénile des motoneurones, en s’intéressant aux facteurs trophiques protecteurs des motoneurones au cours du développement de la maladie. »
Un coup de pouce.
Séverine Boillée en tire un nouveau sujet, celui de la réaction des cellules gliales face à la dégénérescence des motoneurones. Ce qui lui permet d’être acceptée en 2002 en stage postdoc dans le laboratoire de Dan W. Cleveland, à San Diego, en Californie. « En utilisant des modèles de souris transgéniques (mutation SOD1 découverte en 1993), plus proche de la SLA, nous avons montré que les cellules microgliales des macrophages du système nerveux central étaient impliquées dans la dégénérescence des motoneurones, ainsi que les astrocytes. Je suis rentrée en France en 2008 avec un projet de recherche sur les facteurs provenant de ces cellules impliqués dans la SLA et un poste INSERM à la clé. »
La jeune chercheuse monte un petit groupe de recherche de cinq personnes tandis qu’une autre équipe se penche sur les aspects génétiques. « Notre chance, c’est de travailler auprès de l’équipe clinique la plus reconnue mondialement dans le domaine de la SLA. Pour le prix de l’Institut, qui cette année concernait la SLA, nous avons fait le dossier ensemble avec le Pr Meininger. Le prix couronne sa carrière et pour moi, c’est un coup de pouce. C’est la première fois que je reçois un prix, C’est un encouragement pour le laboratoire, toujours en quête de crédits pour financer les achats de produits et la location, à la journée, des cages à souris… C’est un espoir pour les patients. J’en rencontre dans le cadre des portes ouvertes, où les associations qui nous financent leur proposent de visiter les laboratoires. Nous n’avons pas encore de réponse à leur donner mais je suis frappée de voir combien les personnes atteintes de SLA restent optimistes et prêtes à participer à la recherche. »
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