Objets communicants

Le patient connecté, c’est déjà une réalité

Publié le 14/11/2011
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« C’EST DU VRAI textile et c’est un vrai capteur de pression ». Placé sur les fesses d’un blessé médullaire, ou tissé en chaussette pour le talon, le dispositif va permettre d’alerter sur les risques d’escarres. Francis Cannard, le président de Texisense, la société qui a pris trois brevets sur ce tissu intelligent capable de mesurer la pression qui s’exerce sur les tissus humains, a trouvé une niche dans le marché de l’escarre et ses importants coûts de prise en charge. La population des 40 000 blessés médullaires va l’aider à paramétrer son invention. Jusqu’à présent, il fallait faire des scanners fessiers pour mesurer les pressions, explique le Pr Djamel Bensmail, de l’hôpital de Garches, où va se dérouler l’étude clinique Presdie et c’était sur leur seule expérience que les soignants invitaient le patient à se soulager de temps en temps ou les tournaient. Demain, le jeune blessé médullaire va visualiser sur son iPhone le moment où il doit changer de position. Tandis que pour les personnes âgées, le tissu lancera l’alerte à partir d’une montre (Vigisaur).

Comment ça marche ? Pour communiquer, l’objet santé doit être doté de puce capable d’émettre ses informations vers une borne relais (c’est ce qui se passe pour la télésurveillance des porteurs de stimulateurs cardiaques), vers un smartphone ou directement vers Internet.

Simplicité d’usage.

« On s’est intéressé à connecter des capteurs santé à Internet parce que c’est une manière de les rendre utiles et simples à utiliser, sans être intrusifs », explique Cédric Hutchings, co-fondateur de Withings, qui a déjà à son actif une balance connectée, un tensiomètre sur iPhone (qui peut transmettre ses résultats sur un serveur) et un Babymonitor, qui, placé dans la chambre de bébé, restitue à distance, sur un iPhone par exemple, une vidéo sonorisée de l’enfant, ainsi que la température ambiante. Résultats : des objets utiles qui reçoivent des prix de design et une société en forte croissance.

Autour des smartphones et de l’iPhone en particulier, s’est développé tout un écosystème de dispositifs médicaux miniaturisés, au point que la FDA américaine a dû établir une nouvelle réglementation. Le patient peut donc communiquer à son médecin sa tension mais aussi sa fréquence respiratoire, sa courbe de température… et sa glycémie. Le nouveau lecteur de glycémie iBGStar de sanofi aventis se branche sur le connecteur d’alimentation de l’iPhone, qui télécharge l’application idoine. La languette est introduite dans le lecteur. Des codes de couleur permettent de visualiser si la valeur est conforme. Au salon Medica, la concurrence sera vive sur ces glucomètres communicants.

Le marché des seniors est clairement visé. Philips présentait récemment, lors de son Innovation Experience 2011, Lifeline, un dispositif de téléassistance, déjà commercialisé au Canada, qui regroupe les personnes âgées et tous ceux qui les soignent autour d’une unique application pour smartphone, disponible sur tablette pour les yeux fatigués. Doro se lance aussi. « On cherche à développer un écosystème dont le senior est le centre », explique Jérôme Arnaud, PDG du fabricant suédois de téléphones ergonomiques en train d’opérer sa révolution vers les services. Son premier mobile Java pour senior équipé d’un accéléromètre (pour détecter les chutes), le Doro Phone Easy 682 sort d’ici la fin de l’année et des terminaux Android seront disponibles en 2012. « Ces nouveaux boîtiers permettront à la fois de connecter les seniors avec leurs enfants et de centraliser vers le mobile les mesures des capteurs pour lancer des alertes vers un centre de téléassistance ». Doro a déjà passé des partenariats pour la gestion de la glycémie à distance et le rappel de médicaments (le service démarre en Finlande) et vient de racheter une société de téléassistance.

Machine to machine

La prochaine étape c’est de se passer de la box ou du téléphone et de faire communiquer les machines entre elles, c’est le M2M, le « machine to machine ». Les objets ou les appareils sont alors munis d’un module (une puce électronique) comprenant une carte MIM (Machine identification module), équivalent de la carte SIM des téléphones qui signe l’identité de l’objet, d’un module GSM comme on en trouve sur les téléphones mobiles, voire en plus d’un GPS pour localiser l’objet. C’est l’explosion dans le secteur automobile. Mais « ce n’est pas intégrable dans les dispositifs médicaux implantables comme les pacemakers et les défibrillateurs, explique Jean-Michel Gaillard, directeur de branche chez Cinterion (groupe Gemalto), car la puissance est trop forte pour une émission permanente ». Mais c’est ce qu’on trouve dans les montres portées par les personnes atteintes d’Alzheimer. Ou dans la balance de Withings. « On peut imaginer des boîtes de médicament avec des puces GSM connectés sur un serveur, poursuit M.Gaillard, cela permettra de vérifier que la personne prend bien son médicament et d’en recommander quand la boite est vide. »

Il n’y a plus de limite, puisque le nouveau protocole réseau d’Internet dit IPv6 actuellement en cours de déploiement permettra de gérer jusqu’à 500 milliards d’adresses Internet. L’Internet des objets médicaux ne fait que commencer.

MARIE-FRANÇOISE DE PANGE

Source : Le Quotidien du Médecin: 9040