Ce pourrait être le premier instrument de riposte efficace pour lutter contre les redoutables coronavirus, y compris émergents. Il s'agit d'un antiviral à large spectre, le GS-5734, utilisé à titre compassionnel dans la maladie Ebola, comme le suggèrent les données chez l'animal d'une étude américaine publiée dans « Science Translational Medicine ».
Selon l'équipe dirigée par Timothy Sheahan de l'université de Caroline du Nord en collaboration avec l'université Vanderbilt et l'université de Cracovie et en partenariat public-privé avec les laboratoires Gilead, le composé « pourrait protéger les patients infectés par un coronavirus (CoV) de la progression vers une maladie grave et protéger à titre prophylactique les professionnels de santé dans les zones d'endémie de MERS-CoV ». Et plus intéressant encore, « son activité à large spectre pourrait se révéler précieuse lors de l'émergence d'un nouveau CoV à l'avenir », poursuivent les auteurs.
Une menace qui plane
Ce nucléotide analogue, qui inhibe une enzyme de réplication virale commune au virus Ebola et aux CoV, appelée RdRp (RNA-dependent RNA polymerase), est d'autant plus intéressant qu'il n'existe aucun traitement antiviral spécifique validé à ce jour. Les épidémies de coronavirus sont particulièrement difficiles à juguler, du fait de l'imprévisibilité des transmissions d'origine animale et des flux aériens de population.
Deux exemples récents en sont l'illustration, d'abord en 2002 avec la rapide propagation du virus SARS-CoV responsable du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS), initialement originaire de la région du Guangdong, avec près de 8 000 cas estimés pour une mortalité de 10 %. L'épidémie actuelle de MERS-CoV a touché 27 pays depuis 2012 avec une mortalité frôlant les 40 %.
« Avec le chevauchement grandissant des écologies humaines et animales, le risque d'émergence d'un nouveau CoV chez l'homme est grand », mettent en garde les chercheurs. Le MERS-CoV a été transmis à l'homme par la chauve-souris via un hôte intermédiaire, le chameau. Quant au SARS-CoV datant d'il y a plus de 10 ans, plusieurs virus SARS-like ont été identifiés chez la chauve-souris.
Prophylaxie et traitement précoce
Après avoir montré que le GS-5734 inhibe la réplication du SARS-CoV et du MERS-CoV in vitro, notamment sur des cellules respiratoires humaines, les chercheurs ont apporté la preuve de l'activité à large spectre en retrouvant des résultats positifs contre plusieurs coronavirus, des CoV isolés chez la chauve-souris, dont certains « prépandémiques » et des CoV déjà isolés chez l'homme.
Chez la souris, l'administration de GS-5734 a empêché la perte de poids et la détresse respiratoire à la fois en prophylaxie (un jour avant l'infection) et en traitement précoce (un jour après l'exposition au virus). Administré deux jours après l'infection, l'antiviral n'a pas modifié la gravité de la maladie mais le niveau de réplication virale pulmonaire était moindre. Les éléments de tolérance sont plutôt rassurants, puisque l'inhibition virale était obtenue en culture de cellules humaines pour des concentrations 100 fois inférieures à celles associées à une toxicité.
Le large spectre d'activité du GS-5734 est un atout inégalé. Alors que les antiviraux approuvés (ribavirine, lopinavir-ritonavir), et des immunomodulateurs (corticoïdes, interférons) n'ont pas été probants dans les essais cliniques, le développement d'antiviraux d'action directe spécifiquement anti-CoV s'est avéré compliqué. « Parce que le composé interfère avec un composant central de la machinerie de réplication virale, en opposition aux récepteurs de surface hautement variables ciblés par les autres antiviraux, le GS-5734 pourrait offrir une approche de traitement plus sûre et plus efficace contre le MERS du Moyen-Orient et les coronavirus émergents à l'avenir », résument les auteurs.
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