Le risque de démence (et de maladie d’Alzheimer) augmente avec le nombre et la sévérité des traumatismes crâniens (TC), d’après une large étude prospective menée sur une cohorte danoise, et dont les résultats sont publiés dans le « Lancet Psychiatry ».
Cette étude a en effet été menée sur près de 2,8 millions de personnes, pour un total de 27 632 020 personnes-années. Elle montre que les personnes ayant subi un TC voient leur risque de démence augmenter de 24 %, et le risque spécifique de maladie d’Alzheimer augmenter de 16 %. Le risque est aussi augmenté même quand il s’agit d’un TC de sévérité moyenne (commotion cérébrale), avec une augmentation de 17 %.
Une étude très robuste
Le lien entre TC et démence avait déjà été suggéré, principalement pour les vétérans des guerres d’Irak et d’Afghanistan, et pour certains sportifs (football, football américain, hockey, boxe). Mais les études sur le sujet manquaient de robustesse (échantillons et durée de suivi trop peu importants, manque d’information sur le nombre, la sévérité et la date du TC, manque de population témoin comparative) et les résultats étaient contradictoires.
Cette étude est la première à suivre pendant un temps long un échantillon de taille suffisante. Elle a ainsi considéré dans les registres danois les cas de TC qui avaient entraîné une hospitalisation ou un passage aux urgences entre 1977 et 2013. L’association de la sévérité, du nombre et de la date des TC avec la survenue d’une démence a été ajustée en fonction d’autres facteurs de risque tels que le diabète, une maladie cardiaque, la dépression et l’usage de drogues.
En revanche, d’autres facteurs de risque tels que le niveau d’éducation n’ont pas été pris en compte. « Il est important de comprendre à quel point cette étude est robuste », insiste dans un commentaire, dans le même numéro du « Lancet Psychiatry », Carol Brayne, de l’école de médecine de l’université de Cambridge.
Un risque qui augmente avec le nombre de traumatismes crâniens
Entre 1977 et 2013, 4,7 % des 2,8 millions de personnes considérées ont subi au moins un TC. Et entre 1999 et 2013, ce sont 4,5 % des personnes de plus de 50 ans qui ont déclaré une démence (avec un âge moyen au diagnostic de 80,7 ans). Le risque de démence augmente avec le nombre de TC, de 22 % avec un seul TC, jusqu'à 183 % (près de trois fois plus) avec 5 TC ou davantage. L’étude révèle aussi qu’un TC sévère unique augmente le risque de démence de 35 % alors qu’un TC de sévérité modérée l’augmentait de 17 %.
Par ailleurs, plus l’individu subit un TC tôt dans sa vie, plus le risque de démence s'élève. Le sexe a aussi une influence puisque les hommes ayant subi un TC sont légèrement plus à risque de développer une démence que les femmes dans la même situation. Enfin, les auteurs montrent que les personnes qui ont eu des fractures traumatiques en dehors des sites de la tête et du cou ne présentent pas de surrisque de démence.
Des implications majeures
Chaque année, ce sont 50 millions de personnes dans le monde qui subissent un TC, et les causes principales en sont les chutes, les accidents de voiture et les agressions. Et la démence touche actuellement 47 millions de personnes dans le monde, un chiffre prévu pour doubler dans les 20 prochaines années.
« Il est important de signaler que même si le risque relatif de démence augmente après un TC, le risque absolu reste faible », tempère Jesse Fann, professeur de psychiatrie et de sciences du comportement à l’école de médecine de l’université de Washington, à Seattle, et qui a mené cette étude. « Nos résultats ne signifient pas du tout que toutes les personnes qui ont subi un TC vont développer une démence plus tard », ajoute-t-il. Cependant, conclut-il, « nos résultats suggèrent que des programmes de prévention des TC pourraient permettre de réduire le poids de la démence dans le monde ».
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