Un an après le lancement du Grenelle des violences conjugales, le 3 septembre 2019, l'idée fait peu à peu son chemin : le combat sera perdu si la question des auteurs de ces violences reste sous silence.
Le gouvernement prévoit en 2020 le déploiement de quinze centres régionaux de suivi de prise en charge des auteurs de violences conjugales (CPCA), et d'une autre quinzaine en 2021. Pour ce faire, le ministère chargé de l’Égalité entre les femmes et les hommes a diffusé un appel à projet fin juillet. Ce dernier s'inspire du centre pionnier sur la thématique, le centre Clotaire d'Arras, au sein du dispositif global Le Home Des Rosati, ouvert en 2008.
Faire émerger une prise de conscience
L'objectif du dispositif est la « responsabilisation » des auteurs des violences conjugales (essentiellement des hommes). « Ils sont souvent dans le déni et la rationalisation. Une prise en charge psychothérapeutique classique est vouée à l'échec, car ils ne sont pas en demande. Il faut donc d'abord qu'émerge une prise de conscience de leur responsabilité, ce qu'on appelle la responsabilisation », explique au « Quotidien » Benoît Durieux, directeur du pôle hébergement insertion de l’Association Solfa, psychologue de formation.
Les auteurs de violence se présentent dans la plupart des cas sur injonction de la justice, parce que le Procureur, après une arrestation, leur propose une alternative aux poursuites judiciaires, ou parce qu'ils sont sous contrôle socio-judiciaire, en attente d'une audience, soumis à des obligations (soins, éloignement de la victime, etc.).
Après un pré-entretien pour s'assurer de sa capacité à participer au dispositif (sur le plan psychiatrique et social), et une journée d'accueil, l'auteur entre dans un groupe de parole de huit personnes maximum, pour 12 séances réparties en 4 semaines. Encadrés par une psychologue et une éducatrice spécialisée, les participants abordent plusieurs thématiques (la rencontre, la vie de couple, les représentations familiales, les enfants, la première scène de violences), supports de verbalisation à l'appui (questionnaire, vidéo, images). « Le processus de responsabilisation est parfois difficile à mener dans le cadre d'entretiens classiques. L'expérience du groupe génère une nouvelle dynamique », lit-on dans le rapport d'activité du Centre. Elle permet notamment d'aborder les violences conjugales sous l'angle individuel, mais aussi sociétal (en se penchant par exemple sur les représentations de la masculinité).
« Nous considérons que le travail a porté ses fruits lorsqu'il y a une remise en cause franche de la part de l'auteur des violences et de l'empathie vis-à-vis de la victime », considère Benoît Durieux. S'ils sont venus dans le cadre d'une alternative aux poursuites judiciaires, leur dossier est alors classé. « On les invite souvent à continuer le travail dans notre dispositif ou en libéral », précise le directeur.
Pas de profil unique
« Il n'y a pas Un profil d'auteurs de violences conjugales », assure-t-il. « Ce sont des individus lambda, 40 ans, deux enfants, mariés… Contrairement à ce qu'on pourrait penser, 70 % ont une situation professionnelle », décrit-il. Point commun, note-t-il : une « intolérance à la frustration, des représentations de genre et la tendance à banaliser le geste ».
La moitié des auteurs sont sous le coup d'une obligation de soins pour une addiction, prononcée dès lors que l'auteur est sous l'emprise d'une substance lors des faits. Mais attention aux amalgames, prévient le directeur. « Tous les alcooliques ne sont pas violents, et réciproquement. Et quand il y a violence, l'alcool n'est pas une excuse ».
Quant aux comorbidités, notamment psychiatriques, elles sont très rares, observe le psychologue, ce qui n'empêche pas le dispositif d'être en lien avec les généralistes et les structures locales de psychiatrie.
Le Centre Clotaire, de l'association Solidarité Femmes accueil (SOLFA), travaille par ailleurs en étroite collaboration avec l'Association socio-éducative du contrôle judiciaire (ASEJ) (dont ils partagent les locaux), ou encore l’association le coin familial et des associations de victimes, a reçu entre 800 et 850 auteurs, dont 100 l'an dernier. Une minorité seulement récidive.
Ses financements sont assurés par la Communauté urbaine d'Arras, le Service pénitentiaire d'insertion et de probation (SPIP), la préfecture du Pas-de-Calais. Mais restent insuffisants pour s'autoriser plus que les deux mi-temps de la psychologue et de l'éducatrice spécialisée.
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