Alors qu’un comité d’experts américains vient de donner un avis favorable à une autorisation de mise sur le marché du Truvada, combinaison de deux antirétroviraux, pour un usage préventif, le Conseil national du sida (CNS) publie des recommandations sur une éventuelle stratégie PrEP dans le contexte français. « Le CNS a souhaité rendre public cet avis aujourd’hui, au moment où l’Agence américaine des médicaments (Food and Drug Administration ou FDA) s’apprête, suite aux recommandations d’un comité d’experts rendues publiques le 10 mai 2012 à délivrer une première autorisation de mise sur le marché pour l’usage préventif d’un traitement antirétroviral (Truvada produit par Gilead Sciences) ».
L’avis était attendu depuis la saisine par la direction générale de la santé en mars 2011 sur l’intérêt de promouvoir la stratégie PrEP, nouvel outil dans la prévention de l’infection à VIH, objet de nombreuses recherches scientifiques mais qui suscitent aussi des controverses.
Une impérieuse nécessité
Le CNS, dans son avis, dresse un état des lieux des connaissances et débats sur le sujet et formule des recommandations. Tout comme les experts américains (voir encadré), le CNS souligne le fort consensus qui existe aujourd’hui autour de « l’impérieuse nécessité, trente ans après l’identification des premiers cas de sida, de réduire drastiquement le nombre de nouvelles contaminations » pour stabiliser puis faire régresser une pandémie « dont l’expansion, au Nord comme au Sud, n’a pas pu être contenue par les efforts de prévention menés jusqu’à présent ». Un tel enjeu justifie « qu’aucune piste nouvelle ne soit négligée », insiste le conseil.
Toutefois si les experts américains se sont prononcés par 19 voix contre 3 en faveur du traitement préventif chez hommes homosexuels séronégatifs, par 19 voix contre 2 et une abstention, pour les couples hétérosexuels dont l’un des partenaires est séropositif et par 12 voix contre 8 et 2 abstentions, pour les « autres individus risquant d’être infectés en raison de leurs activités sexuelles », le CNS se montre plus prudent et souhaite, sous réserve des résultats de recherche en cours en Europe, que l’usage de la PrEP soit encadré. En France, l’essai IPERGAY de stratégie PrEP orale à la demande lancé en janvier 2012 ne produira de résultats que dans quelques années.
Dans ses recommandations, le CNS indique que l’offre de PrEP devra s’inscrire dans une approche globale articulant prévention, dépistage et traitement, afin d’intégrer l’outil PrEP dans la palette des moyens de prévention. Cala nécessitera de reconstruire le discours de prévention en fonction des situations et des publics concernés. Selon le conseil, la stratégie PrEP est un outil complémentaire des moyens classiques de prévention utilisée dans une stratégie de prévention combinée.
Le CNS souhaite par ailleurs que l’antirétroviral utilisé dans une stratégie PrEP soit « matérialisé par une présentation du médicament sous un nom commercial distinct et accompagné d’une notice spécifique à son indication préventive ». Pour le conseil, « un packaging incluant des préservatifs apparaît souhaitable ».
Prévention médicalisée
La PrEP n’est pas « un outil de prévention universel à destination de la population générale », souligne le CNS. Son intérêt concerne les personnes les plus fortement exposées au risque d’infection par le VIH « en raison de leur appartenance à un groupe de population particulièrement touché par l’épidémie et/ou de pratiques sexuelles à risque ».
Elle exige par ailleurs une prescription médicale initiale, puis lors des renouvellements, ainsi qu’un suivi médical rapproché. « La PreP est un outil exigeant et contraignant pour l’utilisateur, qui suppose des contacts répétés avec le dispositif de prévention et de soins », poursuit le CNS.
Elle nécessite donc un fort investissement dans la prévention. Pour donner aux utilisateurs les moyens de faire une utilisation maîtrisée et raisonnée de l’outil, « l’offre de PrEP doit impérativement s’organiser dans un cadre garantissant une approche globale de prévention et un accompagnement adapté », insiste le CNS qui souhaite le développement de structures de type « centre de santé sexuelle ».
La mise en place d’une telle stratégie devra aussi s’accompagner d’une évaluation de son impact à la fois sur le plan médical et sanitaire (pharmacovigilance, surveillance virologique et épidémiologique) et sur le plan comportemental et social.
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