Le collège de médecine générale (CMG) publie un document détaillé de réflexions visant à amender sensiblement le système de rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP), tout en saluant les bénéfices de cette démarche en médecine de ville.
Au moment où démarrent les négociations conventionnelles 2016, ce travail scientifique souligne que la ROSP « à la française », généralisée dans la convention 2011, a « fait la preuve de son utilité » à plusieurs égards (amélioration des pratiques, organisation du cabinet, évolution de la rémunération) mais qu'il convient de la réformer.
Contexte et points positifs
La ROSP actuelle repose sur cinq indicateurs d'organisation du cabinet (tenue du dossier informatisé, information sur les plages horaires, utilisation des LAP certifiés, taux de télétransmission d'au moins deux tiers des feuilles de soins et synthèse annuelle pour le médecin traitant) ; neuf indicateurs cliniques pour la prise en charge des patients diabétiques et l'HTA (dont six indicateurs de suivi et trois de résultats) ; huit indicateurs de prévention et de santé publique ; et enfin sept items portant sur l'efficience (visant à doper la prescription en générique).
Quatre ans après cette petite révolution, le collège salue la pertinence de ce processus ouvert à tous les spécialistes de médecine générale, son caractère incitatif (par exemple pour renseigner les données médicales dans le dossier patient), la modification rapide des comportements obtenue sur les items d'organisation, la diversification bienvenue de la rémunération, l'autoévaluation de la pratique individuelle ou encore la mixité des éléments factuels et déclaratifs.
« La ROSP est essentielle pour faire survivre un cabinet médical de soins primaires de qualité en l'absence d'évolution des honoraires, tranche le collège. Elle ne doit en aucun cas diminuer, elle doit être plus exigeante à la hausse. »
Plusieurs écueils
Une fois posé ce diagnostic positif, le collège cite plusieurs biais dans le système de paiement à la performance : éléments pas assez dynamiques au regard des données de la science et de l'évolution des cadres d'exercice (les indicateurs étant figés depuis des années), adaptation « incomplète » des logiciels métiers (par exemple, au recueil d'éléments psychosociaux) ou encore objectifs cibles « inadaptés » dans certains territoires (profil de patientèle).
Ce qu'il faut conserver, ce qu'il faut changer
Au chapitre de l'organisation du cabinet, le collège de médecine générale recommande de conserver plusieurs indicateurs utiles : taux de télétransmission, équipement pour le dossier informatisé et les téléservices, logiciels certifiés, affichage des horaires ou encore volet de synthèse. Mais il suggère d'y ajouter d'autres items comme le secrétariat physique, l'utilisation d'une messagerie sécurisée ou encore la rédaction d'une lettre lors de l'adressage à un médecin correspondant.
Le collège préconise surtout de compléter ce volet « organisation » par des thèmes déclaratifs mesurant l'implication du médecin dans l'organisation des soins sur un territoire : continuité des soins, coordination avec les paramédicaux, regroupement d'équipes de soins primaires, participation à des groupes d'échanges, élaboration des plans de santé/soins…
S’agissant du suivi des pathologies chroniques, le CMG procède à un aggiornamento. Outre la suppression souhaitable de plusieurs indicateurs dans le suivi du diabète (périodicité recommandée des dosages de l'hémoglobine glyquée, taux LDL CH déclaratif…), le collège plaide pour l'ajout d'items comme la consultation de podologie ou la micro-albuminurie une fois par an. Pour le suivi des hypertendus, le collège envisage de nouveaux critères tels que l'évaluation de la fonction rénale, le pourcentage de patients à haut risque cardio-vasculaire sous statines ou encore la prescription d'activité physique.
De nouveaux thèmes sont par ailleurs suggérés portant sur l'insuffisance rénale, l'insuffisance cardiaque ou la mise en œuvre et la coordination de soins palliatifs à domicile.
Sur le volet prévention, le collège ne remet pas en cause les indicateurs sur le cancer du sein (mammographie tous les deux ans de 50 à 75 ans) et sur le cancer du col de l'utérus (dépistage tous les trois ans) mais il en ajoute plusieurs sur le cancer colorectal, le dépistage de l'obésité chez l'enfant, le tabac (conseil, taux de prescriptions de substituts nicotiniques…) ou encore les vaccinations chez le nourrisson et l'enfant.
Quant à l'efficience, autrement dit le pourcentage de prescriptions dans le répertoire, le collège n'envisage pas de modifications « sauf à envisager la répartition des rôles entre médecins et pharmaciens ».
Garde-fous
D'une façon générale, le collège met l'accent sur le caractère trop figé du système actuel de rémunération sur objectifs. Il défend une réévaluation des seuils chaque année, la prise en compte de cas particuliers et une réflexion sur les exceptions (incidence de l'âge moyen de la patientèle). Le CMG réclame d'être associé à l'actualisation des indicateurs.
Surtout, le collège rappelle que la ROSP « vendue aux médecins libéraux comme une revalorisation de la consultation » doit maintenant évoluer vers une démarche qualité stricto sensu. Pour autant, note le collège, il est indispensable d'augmenter la ROSP pour « motiver la jeune génération à s'investir et s'installer ». À bon entendeur… Pour 2014, les médecins généralistes avaient perçu une prime moyenne de 6 264 euros.
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