L’évocation des urgences renvoie inévitablement, dans l’imaginaire collectif, vers des images de chaos, de tension, de dysfonctionnements ; un quotidien qui s’improvise au fil des débordements, des pics d’affluence où médecins et soignants, des heures durant, se trouvent submergés d’activité et à qui l’on demande de pallier toutes les carences de la ville et de l’hôpital. Telle semble être l’affligeante et immuable litanie des urgences. Le paradoxe est que les usagers, conscients de la qualité du service rendu, sont de plus en plus nombreux à plébisciter le recours aux urgences.
Un service d’accueil des urgences, de par la nature des conditions de travail, est un lieu stressant aussi bien pour le personnel soignant que pour le patient et son entourage : les nuisances sonores, l’affluence de patients dans un endroit clos, les lumières allumées en permanence et l’activité incessante sont systématiquement présentes. Il est demandé au soignant de revêtir alors un rôle protecteur renforcé pour rassurer le patient. Les soignants travaillent dans des situations de crise dont la gestion exige une adaptabilité maximale du fait de la complexité et de la polyvalence des soins. Tout ceci dans un contexte de ressenti émotionnel, dans une relation qui demeure éphémère. Le taux de turn over et d’absentéisme est d’ailleurs considéré comme relativement élevé dans ce type de service. Pris dans ce tumulte, les urgentistes semblent devoir subir ces contraintes comme une fatalité. Des amplitudes horaires trop longues, le travail de nuit de week-end, l’agressivité de certains consultants, la prise en charge simultanée de plusieurs patients, leur stagnation prolongée sont responsables d’un stress permanent dont les conséquences sur les équipes ont été bien évaluées. Ils seraient plus de 50 % en souffrance, que celle-ci soit verbalisée ou non, contre 38 % dans les autres spécialités. Une vaste enquête européenne avait permis d’identifier les modes organisationnels, les facteurs de santé et les conditions de travail liés à la satisfaction des urgentistes ou liés au souhait de quitter leur profession prématurément. Ce qui leur semble le plus difficile, reste les conditions de travail, le manque de temps, de personnel, d’ergonomie des locaux et, surtout, de reconnaissance, tant de l’administration ou des collègues que des patients. Ils sont près de 15 % à déclarer leur intention d’abandonner leur profession et 36 % à souhaiter changer de lieu ou de mode d’exercice.
Chef de service des urgences, CHU Bicêtre, Le Kremlin-Bicêtre.
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