Dix-neuf chefs d’État, 24 premiers ministres, dont Manuel Valls, 800 000 fidèles et deux milliards de téléspectateurs sont annoncés pour les cérémonies de canonisation des deux souverains pontifes, dimanche à Rome.
À cette occasion, un événement peut en cacher un autre : selon les règles romaines, le cas du pape polonais s’est bien vu imputer deux guérisons miraculeuses, celle d’une religieuse française, guérie subitement en 2005 d’un Parkinson en stade 4, pour sa béatification, et celle d’une Costaricaine dont l’anévrisme cérébral s’est spontanément résorbé en 2011. En revanche, dans le cas du pape Jean XXIII, une seule guérison inexpliquée a été validée par la congrégation pour la cause des saints, celui d’une religieuse italienne atteinte d’une gastrique ulcéreuse hémorragique qui s’est rétablie contre toute attente médicale en 1966. Contrairement aux règles canoniques, le pape François a décidé de se contenter de cet unique miracle, en l’absence d’un deuxième dossier.
Une disposition discutable
« Nous connaissons tous les vertus et la personnalité du pape Roncalli, a expliqué le père Frédérico Lombardi, directeur de la salle de presse du Saint-Siège, il n’y a pas besoin d’expliquer les motifs de la décision sur sa sainteté. »
« Le pape François a très bien fait, commente le Pr François-Bernard Michel, président du Comité médical international de Lourdes (CMIL), qui est chargé d’instruire les dossiers de guérison survenue dans la cité des apparitions mariales. Poser la condition de deux miracles pour prononcer une canonisation était une disposition complètement farfelue et d’autant plus discutable que la notion de guérison miraculeuse et celle de son imputabilité sont devenues aujourd’hui discutables : en 1859, on pouvait estimer qu’une personne qui recouvrait subitement la vue à Lourdes, compte tenu des moyens thérapeutiques de l’époque, était justifiable d’un phénomène miraculeux, mais de nos jours, les patients cancéreux bénéficient de chimiothérapie, ceux qui sont atteints de maladies inflammatoires prennent des corticoïdes, si bien qu’en l’état actuel de la médecine, les notions de guérison soudaine, inattendue, durable et inexplicable ne sont plus celles des miracles observés en Palestine il y a deux mille ans. »
Effet placebo et désir
Le « diagnostic miraculeux » se heurte de plus à une double difficulté d’interprétation, souligne le président du CMIL : « Dans le cas d’une maladie qui évolue par poussée, on pourra objecter des situations de rémission et non de guérison ; dans celui d’une atteinte fonctionnelle, on se heurte à l’argument d’un trouble psychosomatique. »
« La recherche de la vérité pour faire la part du médical et celle du surnaturel est une démarche complexe », souligne aussi le Dr François Blin, président de la Fédération européenne des médecins catholiques (FEMC), qui se déclare « très éloigné des spéculations autour de ces questions ».
Le pape François, à travers le cas de son prédécesseur Jean XXIII, est-il en train d’opter pour une révision des usages associant sainteté et miracle ? « Il faut se garder d’anticiper à partir de ce qui est encore un cas unique », estime le Dr Blin, tandis que le Pr Michel discerne « une évolution de la position de l’Église ». Mais, insiste-t-il, « il ne s’agit pas, au passage, de remettre en cause la réalité des cas de guérisons miraculeuses, ces guérisons ne pouvant être assimilées à un simple effet placebo, c’est-à-dire à un remède vide qui permet de mobiliser les réactions de l’organisme ; pour l’Église, le miracle relève d’une mobilisation de la foi du patient, c’est une affaire de désir, selon la formulation de Françoise Dolto ».
Dans les cas des deux papes canonisés dimanche, le président du CMIL veut surtout retenir deux miracles devant l’histoire : celui de la convocation du concile Vatican II pour le premier, celui de la chute du mur de Berlin et du communisme pour le second.
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