« CE RAPPORT est une étape décisive pour mettre en évidence les préoccupations soulevées par la réaction disproportionnée à la grippe porcine en Europe, ainsi que l’influence possible des firmes pharmaceutiques dans le déclenchement des réponses », a estimé la députée européenne Michèle Rivasi (Verts/ALE), rapporteur du texte voté le 8 mars à une large majorité. Les députés se sont fendus d’un texte très critique sur la gestion de la grippe A (H1N1)v en Europe en 2009-2010. Dans leur résolution, ils exhortent l’Organisation mondiale de la santé (OMS) « à réviser la définition de pandémie en prenant en considération, outre le critère de l’extension géographique, celui de la gravité ». Michèle Rivasi fait observer que, dès le mois de mai 2009, l’OMS avait reconnu « la gravité modérée de la grippe A (H1N1) », ce qui n’a pas empêché qu’« un mois plus tard, elle (émît) une alerte maximale contre la pandémie - basée sur la capacité du virus à se propager et non sur sa gravité ».
Des coûts trop élevés.
Résultat : sur la base de cette alerte pandémique et des recommandations qui en découlent, les États membres ont « rapidement réagi, conformément au principe de précaution, à mesure des moyens dont ils disposaient », souligne la résolution. Prises dans un tel contexte, les décisions de santé ont été « parfois disproportionnées ». Selon le bilan établi à la fin d’avril 2010, le virus A (H1N1)v a causé 2 900 morts en Europe, des chiffres faibles « en comparaison de la mortalité liée à la grippe saisonnière, de 40 000 à 220 000 morts selon les années », commente Michèle Rivasi. Et tout cela pour des coûts significatifs en majeure partie liés à l’achat de grandes quantités de vaccins et de traitements antiviraux. Ces coûts sont par exemple « estimés à 1,3 milliard d’euros au Royaume-Uni et entre 700 et 760 millions d’euros en France ». « En comparaison la grippe saisonnière coûte 87 millions d’euros par an en France », poursuit la députée européenne.
Les critiques formulées dans cette résolution ne visent pas seulement l’OMS, puisque sont également mis en cause les plans nationaux eux-mêmes, la coopération limitée entre les États, les divergences au sein de l’Union des recommandations concernant les groupes prioritaires. Le rapport note que l’UE « était la région du monde la mieux préparée, grâce à un achat précoce des vaccins et à des stratégies de vaccination systématique, notamment parmi les groupes les plus vulnérables » et que « sont apparues, toutefois, de considérables différences de préparation entre États membres, tandis que le manque de coopération sincère affaiblissait la préparation d’ensemble de l’Union ». En particulier, l’absence d’achats groupés de vaccins, de stocks communs, de mécanismes de solidarité et de médiation entre les États ainsi que le fait que plusieurs d’entre eux n’avaient pas conclu d’accords préalables d’achat « ont été les principaux facteurs qui ont miné la meilleure préparation de l’Union ».
Impliquer les professionnels de santé.
Les députés insistent sur la nécessité d’une réévaluation des stratégies vaccinales et des plans mis en place au sein de l’Union, demandant qu’ils soient « révisés afin de gagner en efficacité comme en cohérence » et « suffisamment autonomes et flexibles pour s’adapter dans les meilleurs délais et au cas par cas au risque réel, sur la base de d’informations à jour ». L’ECDC (Centre européen de prévention et de contrôle des maladies) pourrait contribuer au réexamen des plans de préparation et des stratégies de vaccination et de communication. Dans le même ordre d’idées, la résolution appelle les États membres « à impliquer davantage les professionnels de santé dans toutes les étapes de l’élaboration et de l’application d’une stratégie de prévention et de lutte contre une épidémie ».
L’appel à plus de coopération se double d’une exigence plus grande d’indépendance et de transparence . Les députés considèrent que « la réticence des fabricants de vaccins à endosser la pleine responsabilité de leurs produits peut avoir contribué à réduire la confiance de la population dans la sécurité des vaccins » alors que, selon la législation européenne relative aux médicaments, ils sont responsables de la qualité, de la sécurité et de l’efficacité des molécules pour les indications autorisées leur incombe. Ils souhaitent que soient « garanties une vigilance accrue et une complète transparence dans l’évaluation et le suivi des médicaments recommandés en cas d’urgence sanitaire » et réaffirment « la nécessité de disposer d’études scientifiques, indépendantes des firmes pharmaceutiques, sur les vaccins et les antiviraux, y compris en ce qui concerne la couverture vaccinale ».
Un code pour les experts.
Le texte revient sur le problème des conflits d’intérêt. Il recommande l’élaboration d’un code de conduite européen relatif à l’exercice des fonctions d’experts scientifiques dans toute autorité européenne, chaque expert devant souscrire aux principes éthiques de code avant d’accepter sa mission. S’ils peuvent être consultés, « les experts qui ont des liens avec le secteur pharmaceutique (devront être) exclus de la prise de décision ».
Les députés estiment enfin qu’il est nécessaire d’élaborer de meilleures stratégies de communication, cohérentes au sein des États membres, en vue de construire la confiance dans les mesures de santé publique.
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