Les hospitalisations pour insuffisance cardiaque (IC) sont fréquentes, répétitives et graves. L’IC est la principale cause d’hospitalisation après l’âge de 60 ans dans les pays occidentaux. Selon l’Institut de veille sanitaire (InVS), en 2008, près de 9 séjours sur 10 pour IC concernaient des personnes âgées de 65 ans et plus. Il s’agit le plus souvent d’hospitalisations non programmées, participant à l’engorgement des services d’urgences. En France, en 2010, (données extraites du PMSI), le nombre d’hospitalisations pour IC s’élevait à 210 490, intéressant 160 092 patients du fait des hospitalisations multiples (1). La sévérité de la maladie, l’âge avancé des patients, 79 ans en moyenne, la fréquence des comorbidités rendent compte d’un taux de mortalité intrahospitalière élevé, entre 7,5 et 8,2 %, et d’une durée moyenne d’hospitalisation longue, de 9,2 à 13 jours. La létalité intrahospitalière de l’IC à fraction d’éjection préservée, bien qu’importante, l’est moins que celle de l’IC à fraction d’éjection altérée, 5,2 % versus 8,3 % dans le registre OFICA. Cependant, dans l’étude de l’InVS, la mortalité intrahospitalière de la première hospitalisation a diminué de 2002 à 2008, passant de 8,9 à 7,5 %. Le coût annuel des hospitalisations pour IC en France est estimé à un milliard d’euros, soit 63 à 70 % des coûts de cette maladie. Ils ne pourront que s’élever avec le vieillissement de la population. Les analyses de l’InVS qui font ainsi état d’une augmentation du nombre de séjours et du taux de réhospitalisations pour IC de respectivement 35 % et 26 % entre 1997 et 2008 alors que le taux standardisé sur l’âge reste relativement stable durant cette période.
Le pronostic vital est engagé à court terme, le taux de décès entre J60 et J90 variant de 5 à 15 % selon les séries. Les données de Medicare aux États-Unis retrouvent un taux de décès à 30 jours de 11 % stable ces 15 dernières années, identique quel que soit le mécanisme de l’IC. Les données européennes sont similaires, avec en 2007 en Espagne une mortalité, après une première hospitalisation pour IC, de 12,1 % à 30 jours et de 28,8 % à 1 an. Les décès sont essentiellement d’origine cardiaque, 40 % liés à la défaillance cardiaque et 30 % secondaires à une mort subite. Cependant, dans l’IC à fraction d’éjection préservée, la part des décès non cardiaques est plus importante. Le taux de décès à un an est supérieur après une hospitalisation pour IC chronique décompensée qu’en cas d’hospitalisation pour IC de novo, respectivement de 27,7 et de 19,2 % dans un registre italien et le nombre cumulatif d’hospitalisations précoces pour IC est un puissant facteur prédictif de mortalité.
40 % de réhospitalisation à 6 mois
Le risque de réhospitalisation est particulièrement élevé après une première hospitalisation pour décompensation, en moyenne de 40 % à 6 mois, et juste avant le décès au stade d’IC avancé. En France, en 2010 (données extraites du PMSI), 55 % des patients hospitalisés pour IC aiguë étaient réhospitalisés la même année, 22 % pour IC aiguë et 33 % pour un autre motif. Dans le registre OFICA, dans les 6 mois suivant une hospitalisation pour IC, 34 % des patients étaient réhospitalisés pour IC aiguë et 16 % décédaient. En Europe, dans le registre EuroHeart Failure Survey, le taux de réhospitalisation est de 24,2 % à 3 mois. Les facteurs prédictifs de réhospitalisation dans la période suivant la sortie sont l’augmentation du poids, les symptômes et les signes de congestion, l’altération de la fonction rénale et l’élévation des peptides natriurétiques. Des facteurs différents sont associés au risque de décès, notamment une pression artérielle basse. La principale raison des réhospitalisations est donc la congestion liée à l’altération de la fonction ventriculaire gauche, 24 % des patients sortant de l’hôpital avec des signes de rétention pulmonaire et/ou périphériques. Elle précède de plusieurs jours, voire de plusieurs semaines, la survenue des signes cliniques. Ces patients, souvent cliniquement non détectables, ont des pressions de remplissage ventriculaire élevées qui contribuent à la progression de l’IC, en favorisant une ischémie du myocarde sous-endocardique et un remodelage ventriculaire gauche. De plus, chaque décompensation entraîne une souffrance viscérale, cardiaque, rénale et hépatique, créant un cercle vicieux auto-aggravant, comme le montre la valeur pronostique de l’élévation des biomarqueurs plasmatiques cardiaques (peptides natriurétiques de type B et troponine), rénaux (cystatine C) et hépatiques (transaminases) pour le risque de décès à 180 jours.
(1) Galinier M et al. Concours Médical 2013;135(6):443-7
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