Devant une diarrhée aiguë du nourrisson

Prévenir la déshydratation

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Publié le 23/05/2016
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Crédit photo : PHANIE

La réhydratation peut représenter une urgence absolue. Un nourrisson qui double ses pertes par diarrhée et vomissements se déshydrate de 10 % en 24h (l’adulte de seulement 3 %). « Or 10 % c’est le collapsus, la menace vitale ! », rappelle le Dr Olivier Mouterde.

 

Attentifs aux signes d'alerte

 

La diarrhée aiguë du nourrisson peut être brutale et profuse. « Toute famille ayant un nourrisson à la maison devrait avoir des sachets de solutions de réhydratation orale (SRO) à portée de main (prescrits dès la sortie de maternité) et savoir s’en servir », estime le spécialiste. Apprendre aux parents la conduite à tenir en cas de diarrhée aiguë : faire boire le nourrisson à volonté du SRO (diluer chaque sachet dans 200 ml d’eau), la soif régulant les apports (sans limite de quantité ni délai minimal entre prises : un nourrisson déshydraté peut boire 300 ml/kg, l’équivalent de 21 l/j chez l’adulte). Ils doivent consulter en urgence en cas de signes d’alerte : vomissements, changement de comportement, diminution des mictions, yeux creux. Quant à la vaccination contre le rotavirus, les sociétés savantes d'infectiologie, de pédiatrie et de gastro-entérologie la recommandent, en informant et expliquant aux parents le risque (minime) d’invagination dans la semaine après le vaccin et les symptômes évocateurs imposant d’aller aux urgences (douleur abdominale, vomissements, pâleur). « Le vaccin remplace la 1re contamination (la plus sévère : déshydratations, hospitalisations, décès) et diminue de 80 à 90 % les formes graves. Avant 5 ans 100 % des enfants rencontrent le rotavirus. Les invaginations liées à la maladie sont beaucoup plus fréquentes que celles liées à la vaccination », rappelle le Dr Mouterde, soulignant les effets spectaculaires de la vaccination de masse des nourrissons pratiquée dans 80 pays.

 

Poursuivre l'allaitement maternel

 

« Bien examiner le nourrisson : il réagit par des vomissements et de la diarrhée à de nombreuses infections extra-digestives (otite, infection urinaire, hépatite A, méningite…). Attention à ne pas passer à côté », prévient le Dr Mouterde. La décision d’hospitaliser n’est pas toujours aisée. Interviennent le jeune âge, l’intensité de la diarrhée, les signes d’accompagnement (fièvre, vomissements…), la fiabilité de la famille, l’éloignement de l’hôpital, la dénutrition, l’infection systémique (rares salmonelles). En cas de traitement à domicile, réhydrater avec les SRO. Si le nourrisson refuse de boire, soit il va très mal ou vomit (l’hospitaliser immédiatement) soit il n’a pas encore soif (le forcer est inutile). L’allaitement maternel doit être poursuivi (pas d’arrêt) ; la reprise du lait artificiel se fera après un maximum de 6 h de réhydratation par SRO. « Le lactose favorise l’hydratation : prescrire un lait sans lactose serait inadapté en cas de diarrhée peu sévère », explique le Dr Mouterde. Réserver un lait pauvre en lactose aux diarrhées persistantes (+ de 5-6 jours) ou sévères du plus de 4 mois. Avant 4 mois on propose une préparation semi-élémentaire. Cette recommandation repose sur les risques d’intolérance aux protéines du lait de vache et au lactose dans les infections à rotavirus et la meilleure assimilabilité des triglycérides à chaînes moyennes sur tube digestif lésé.

Les antibiotiques ne sont pas indiqués (sauf shigellose) : sans effet sur la diarrhée, ils prolongent le portage des germes dans les selles (pas de coproculture, sauf arguments en faveur d’une diarrhée bactérienne invasive, l’antibiothérapie parentérale se discutant pour un enfant fragile atteint de diarrhée bactérienne avérée, ou en cas d'état septique sévère). Pas de recommandation des antiémétiques. Pour les antidiarrhéiques, « Certains ont fait la preuve d’efficacité sur le débit ou la durée mais ces adjuvants ne changent ni le pronostic, ni l’évolution sévère pour le nourrisson », note le spécialiste invitant à retenir que : « Le traitement qui sauve la vie de nourrissons menacés par une diarrhée aiguë, c’est la réhydratation ! ».

Dr Sophie Parienté

Source : Le Quotidien du médecin: 9498