Insuffisance cardiaque aiguë

Un défi thérapeutique

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Publié le 02/05/2016
Insuffisance cardiaque

Insuffisance cardiaque
Crédit photo : Phanie

« Alors que l’insuffisance cardiaque chronique a bénéficié de nombreux progrès, la mortalité précoce liée à l’insuffisance cardiaque aiguë (ICA) n’a pas évolué en 20 ans », a rappelé le Pr Damien Logeart. L’ICA reste à l’origine de 210 000 hospitalisations par an en France, et est grevée d’une mortalité intra-hospitalière de 7 à 9 % et de 20 à 25 % à un an. 

Selon les recommandations de la Société européenne de cardiologie de 2012, sa prise en charge médicamenteuse est basée sur trois classes de molécules : « les diurétiques de l’anse, les vasodilatateurs chez les patients dont la pression artérielle n’est pas trop abaissée et les inotropes chez les plus hypotendus ou en état de choc », a précisé le Pr Logeart.

Les premiers essais avec les inotropes, qui datent de 25 ans (FIRST, PROMISE), avaient montré un risque accru de décès, sans doute lié à l’augmentation du travail du myocarde. De nouveaux inotropes ont ensuite été développés : le lévosimendan, un sensibilisateur au calcium des myofibrilles, avec des résultats décevants sur la mortalité dans les essais cliniques et qui est disponible en ATU ; et l’omecamtiv, chef de file des activateurs de la myosine, dont l’avantage est de ne pas entraîner d’augmentation énergétique du myocarde. L’essai de phase 2 ATOMIC HF, publié il y a quelques semaines et qui testait trois doses d’omecamtiv versus placebo, a montré les bénéfices cliniques de la dose la plus élevée : augmentation du volume d’éjection systolique et de la pression artérielle et, de façon étonnante, diminution de la fréquence cardiaque. Son développement se poursuit.

« Les vasodilatateurs restent une classe sous-utilisée : seuls de 20 à 50 % des patients en reçoivent, alors que théoriquement cette proportion devrait être de 75 % », a indiqué le Pr Damien Logeart, avant de souligner qu’ils ont pour limites un manque d’évaluation rigoureuse et un effet délétère sur le stress oxydatif.

 

Peptide natriurétiques, serelaxine… en évaluation

 

De nouvelles molécules sont en cours de développement, en particulier des peptides natriurétiques comme le nésiritide qui a fait la preuve de son intérêt sur des critères hémodynamiques dans différentes études. Il est commercialisé depuis 15 ans aux États-Unis, mais pas en Europe : deux méta-analyses publiées en 2005 avaient en effet suggéré une augmentation de la mortalité et un risque d’altération de la fonction rénale. Des données non confirmées par l’étude ASCEND-HF ayant inclus 7 000 patients, et qui a mis en évidence une amélioration de la dyspnée.

Autre peptide natriurétique : l’urodilatine, un ularitide de synthèse, qui a fait l’objet d’une évaluation de phase 2 positive puis d’une étude de phase 3 sur 4 000 patients (TRUE-HF), dont on attend les résultats, qui auraient dû être présentés lors de la dernière session de l’American College of Cardiology.

Autre molécule, la serelaxine, une relaxine de synthèse, hormone surtout étudiée au cours de la grossesse et qui agit selon un mécanisme complexe via un récepteur spécifique, le RXFP1. Un premier essai publié il y a 3 ans (RELAX-AHF) avait montré une amélioration des symptômes cliniques et suggéré une baisse des décès à 6 mois. L’étude en cours RELAX-AHF 2, qui a inclus 6 800 patients, a pour critère primaire la mortalité à 6 mois.

Des activateurs de la guanylate cyclase sont également en évaluation, notamment le vericiguat et le riociguat.

La recherche est active, mais le traitement de l’insuffisance cardiaque aiguë reste un défi. « La réalisation d’essais cliniques est rendue difficile par l’inhomogénéité des patients, le choix du critère d’évaluation (décès ou amélioration clinique) et par l’absence de critères intermédiaires pour guider la stratégie », conclut le Pr Logeart.

D’après la communication du Pr Damien Logeart (Paris)

Dr Isabelle Hoppenot

Source : Le Quotidien du médecin: 9493