Démence

Un lien entre risque CV et Alzheimer ?

Par
Publié le 25/10/2021
Article réservé aux abonnés

Certains travaux retrouvent une corrélation entre Alzheimer et facteurs de risque cardiovasculaires, laissant espérer de nouveaux leviers de prévention. Mais de nombreux biais existent et, pour le moment, aucun lien de causalité n’a été établi.

Crédit photo : SPL/PHANIE

Depuis plusieurs années, les données suggérant un lien entre facteurs de risque ou pathologies cardiovasculaires (CV) et Alzheimer s’accumulent. Ainsi, l’HTA mais aussi le diabète, l’hypercholestérolémie ou le tabagisme se sont avérés statistiquement associés à un surrisque d’Alzheimer. Au contraire, des habitudes hygiénodiététiques ou des médicaments à visée cardiovasculaire semblent protecteurs vis-à-vis d’Alzheimer.

Une étude très médiatisée parue au début du mois dans Nature Aging a ainsi suggéré que le bumétanide (un diurétique utilisé dans l’insuffisance cardiaque), pourrait s’avérer efficace pour prévenir la maladie d’Alzheimer.

Cependant, le Pr Bruno Dubois, directeur de l’Institut de la mémoire et de la maladie d’Alzheimer (Paris), attire l’attention sur les limites de ces travaux épidémiologiques. « Il existe des facteurs confondants », détaille le neurologue. Par exemple, si le régime crétois a été associé à un sous-risque d’Alzheimer, ce lien pourrait davantage s’expliquer par « la réserve cognitive des individus qui suivent un régime crétois, au niveau socioculturel et éducationnel souvent élevé », que par une action directe de ce type d’alimentation.

Et, pour le moment, aucun consensus ne semble établi autour du rationnel physiologique qui pourrait sous-tendre une origine CV de la maladie d’Alzheimer, même si quelques hypothèses sont avancées. Une fragilité des vaisseaux cérébraux pourrait notamment favoriser l’accumulation de protéine amyloïde dans l’encéphale. « C’est du moins ce qu’on constate dans l’angiopathie amyloïde », avance le Pr Frédéric Blanc, coresponsable du Centre Mémoire de ressources et de recherche des Hôpitaux universitaires de Strasbourg. L’inflammation liée, par exemple, à l’athérome pourrait également favoriser le développement des anomalies cérébrales associées à Alzheimer. « D’ailleurs, on sait que les macrophages de la microglie sont activés dans cette maladie », rappelle Frédéric Blanc. Enfin, une activité physique insuffisante pourrait participer à l’atrophie hippocampique décrite chez les malades.

Mais pour Bruno Dubois, des facteurs CV pourraient surtout impacter indirectement le développement d’Alz­heimer. Le plus souvent, les malades souffrent d’une démence mixte, relevant à la fois d’un Alzheimer et d’un déclin cognitif d’étiologie autre, rappelle-t-il. « Or c’est sur cette dernière composante que des facteurs CV pourraient jouer, avançant ou au contraire retardant l’apparition des premiers symptômes de démence, sans pour autant réduire les lésions spécifiques à l’Alzheimer. » Et ce, en entravant le fonctionnement normal du cerveau, notamment par accumulation de scléroses artériolaires et réduction de l’oxygénation du tissu nerveux.

D’autres facteurs semblent plus clairement impliqués dans la genèse de la maladie d’Alzheimer. Au-delà de l’âge et de la génétique, Bruno Dubois évoque surtout une réserve cognitive insuffisante. D’où l’importance d’étoffer au maximum ce « matelas synaptique capable de tamponner l’entrée dans la maladie » en renforçant les stimulations cognitives.


Source : Le Généraliste