« Ce résultat démontre pour la première fois que la circoncision masculine appliquée à grande échelle est efficace pour lutter contre le VIH au niveau d’une communauté », souligne l’ANRS. Coordonnée par Bertran Auvert (INSERM U1018/Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines) et menée par Dirk Taljaard (Progressus, Afrique du Sud) et David Lewis (Institut national des Maladies Contagieuses, Afrique du Sud), l’étude conforte les résultats de trois essais randomisés menés au Kenya (2007), en Ouganda (2007) et en Afrique du Sud (2005) qui avaient conduit l’OMS et l’ONUSIDA à recommander dès 2007 la circoncision comme stratégie de prévention dans les communautés ayant une forte prévalence du VIH et une faible prévalence de la circoncision.
L’étude présentée à Rome fait suite à l’étude de 2005 en Afrique du Sud déjà conduite par le Pr Bertran Auvert. Les auteurs soulignaient alors : « La diminution importante du risque de contamination par la circoncision observée dans l’essai ANRS 1265 a été obtenue dans des conditions expérimentales soigneusement encadrées : information sur la prévention, fourniture de préservatifs, pratique médicale de la circoncision. » L’enjeu était de vérifier que cette stratégie pouvait être efficace à l’échelle d’une population régionale.
C’est ce que vient de réaliser l’étude de l’équipe du Pr Auvert conduite entre 2007 et 2010 auprès de la population adulte (110 000 personnes) du bidonville d’Orange Farm, à 45 km de Johannesbourg. Une circoncision gratuite et médicalisée était proposée à tous les hommes volontaires âgés d’au moins 15 ans. L’intervention s’est aussi appuyée sur un programme d’information sur la prévention, incluant le dépistage, la distribution de préservatifs, et la promotion de la santé sexuelle et reproductive.
Baisse de 76 %.
Plus de 20 000 circoncisions ont été effectuées au cours des trois années de l’étude, ce qui a permis de faire passer la proportion d’hommes circoncis de 16 à 50 % parmi les 15-49 ans (59 % chez les 15-24 ans). Les résultats au bout de trois ans montrent que les comportements sexuels, notamment l’usage des préservatifs, ne sont pas différents chez les hommes circoncis et non circoncis. En revanche, la prévalence du VIH est 55 % plus basse et l’incidence du VIH est 76 % plus faible chez les circoncis que chez les non circoncis, une réduction d’incidence peu différente de celle observée dans les trois essais princeps (60 %).
Le Dr Dirk Taljaard, l’un des deux investigateurs sud-africains de l’étude, espère que ce changement de normes sociales introduites dans cette communauté soit « pérenne ». « Nous devrions bientôt détecter une réduction de l’infection des femmes », a-t-il ajouté. Le Pr David Lewis, l’autre investigateur sud-africain, s’est réjoui de ce « résultat extraordinaire » pour « une intervention qui coûte 40 euros, prend 20 minutes et ne doit être faite qu’une seule fois dans la vie ».
Le Pr Auvert « Réduire le nombre de nouvelles infections va réduire les décès dus au sida mais aussi les besoins en traitements antirétroviraux. Cette étude montre enfin que la généralisation de la circoncision devrait être une priorité de santé publique en Afrique australe et de l’Est et qu’un engagement politique fort est nécessaire », a souligné le Pr Auvert.
Enfin, le professeur Jean-François Delfraissy, directeur de l’ANRS, déclare : « Cette étude marque une étape importante qui confirme les données des essais randomisés princeps, mais cette fois-ci à l’échelle d’une communauté, dans la "vraie vie". » La généralisation de la circoncision se poursuit à Orange Farm.
Article précédent
Le message des scientifiques aux politiques
Article suivant
Des scientifiques envisagent la fin de l’épidémie à VIH
Les femmes méritent plus d’attention
Le message des scientifiques aux politiques
VIH/sida : la circoncision est efficace même dans la vraie vie
Des scientifiques envisagent la fin de l’épidémie à VIH
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature