Mme A., 45 ans, se plaint de douleurs épigastriques à type de brûlures, intermittentes et indépendantes des repas, avec éructations, ballonnements et parfois nausées. Il n’y a pas de notion de perte de poids, pas d’antécédents personnels ou familiaux de néoplasie gastrique, l’examen clinique est normal.
LES CRITÈRES DE ROME III
Cette symptomatologie entre dans le cadre d’une dyspepsie qui doit comprendre au moins un des symptômes suivants : plénitude post-prandiale gênante, satiété précoce, douleur ou brûlure épigastriques, présents depuis au moins 3 mois et dont le début date de plus de 6 mois.
› L’interrogatoire précise les signes les plus marqués, leur fréquence et recherche d’éventuels facteurs déclenchants ou aggravants, l’association à des troubles du transit, la limite étant parfois ténue avec le SII.
› On distingue deux sous-groupes en fonction de la symptomatologie. Celui de Mme A correspond plutôt au syndrome douloureux épigastrique intermittent (EPS), indépendant des repas voire soulagé par lui, avec douleurs ou brûlures localisées à l’épigastre. L’autre sous-groupe, le syndrome de dyspepsie post-prandiale ou « détresse » post-prandiale (PDS) associe plutôt sensation de plénitude et satiété gastrique précoces, éventuellement accompagnées de ballonnements, nausées, éructations post-prandiales. Les signes appartenant à chacun de ces sous-groupes peuvent co-exister.
ÉLIMINER UNE PATHOLOGIE ORGANIQUE
Plus de deux tiers des dyspepsies sont fonctionnelles, d’autant plus fréquemment que le sujet est plus jeune. Les étiologies organiques relèvent essentiellement de l’UGD, rarement des cancers gastriques ou œsophagiens, éventuellement de pathologies pancréatiques.
Les mécanismes physiopathologiques sont divers : vidange gastrique accélérée pour les liquides et ralentie pour les solides, hypersensibilité viscérale, défaut d’accommodation gastrique. On peut retrouver une composante post-infectieuse ou psychologique.
› L’endoscopie digestive haute est demandée d’emblée si la personne a plus de 50 ans ou devant des signaux d’alarme tels que amaigrissement involontaire, dysphagie, odynophagie, anémie ferriprive, antécédents familiaux ou personnels de néoplasie digestive ou d’H. Pylori, une origine asiatique. L’examen doit être réalisé de préférence avec une simple anesthésie locale, en utilisation un endoscope fin et en passant par voie nasale : la tolérance est bonne, la réalisation de biopsies possible, et le coût acceptable. Les biopsies sont réalisées sur les éventuelles lésions ainsi qu’au niveau antral et fundique à la recherche d’H.Pylori. Ce n’est qu’en cas d’intolérance et d’échec de cette procédure qu’une gastroscopie sous anesthésie sera envisagée.
UN TRAITEMENT MÉDICAL « D’ÉPREUVE » EN PREMIÈRE INTENTION
Mme A. ne présente pas de facteurs de risques et la dyspepsie est très vraisemblablement fonctionnelle aussi l’endoscopie n’est pas requise en première intention. Après avoir éliminé un trouble du comportement alimentaire, une anomalie du métabolisme glucidique ralentissant la vidange gastrique ou un RGO , on peut lui proposer soit un traitement par IPP à simple dose pendant 8 semaines, associé à la suppression des éventuels facteurs déclenchants retrouvés à l’interrogatoire : aliments gras, épicés, acides ou riches en fibres, alcool, tabac, prise d’AINS ou aspirine.
Autre alternative, la recherche d’H.Pylori par un test non invasif, sérologie ou test respiratoire à l’urée, à choisir en fonction des souhaits du patient et des disponibilités locales.
à la fin du traitement par IPP, en l’absence d’amélioration probante, une endoscopie digestive haute est réalisée chez Mme A. Elle ne montre pas de lésion muqueuse et les biopsies ne retrouvent pas la présence d’H.Pylori. L’échographie abdominale s’avère normale. Il s’agit donc d’une dyspepsie fonctionnelle.
PEU D’ALTERNATIVES THÉRAPEUTIQUES
› Devant la persistance de la plainte dyspeptique, on peut proposer d’associer à l’IPP ou de lui substituer un traitement type anti-acides, siméticone, pansement gastrique réduisant le météorisme, antispasmodiques, etc.
› Les prokinétiques type dompéridone font maintenant l’objet de restrictions d’usage au regard du risque d'allongement de l'intervalle QT et d'arythmies.
› Les autres traitements sont pour la plupart hors AMM et assortis d’effets secondaires, qu’il s’agisse de l’érythromycine à faible dose (accélérateur de la vidange gastrique), de la buspirone (anxiolytique avec effet stimulant l’accommodation gastrique) ou de l’amitryptiline (anti-dépresseur modulant la sensibilité viscérale).
› Le contexte psychologique doit être évalué et peut être pris si nécessaire en charge par des anxiolytiques et/ou antidépresseurs, des traitements non pharmacologiques type hypnose, psychothérapie ou thérapie comportementale.
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