Claude, 47 ans, est suivi depuis 9 ans pour un syndrome de Lynch avec mutation sur le gène MLH1 découvert suite à la survenue d’un cancer du côlon à 38 ans chez son frère et d’un double cancer du côlon chez son père ainsi qu’un cancer de l’intestin grêle à 63 ans. Claude apporte ce jour les résultats de sa coloscopie, annuelle du fait de la découverte régulière d’adénomes plans, et d’un scanner des voies urinaires justifié par une hématurie. Le scanner est en faveur d’une tumeur urothéliale gauche. Claude fait aussi part de son inquiétude pour ses 3 filles dont l’aînée a 18 ans.
UNE MALADIE GÉNÉTIQUE
La maladie de Lynch (ML) ou cancer colorectal héréditaire sans polypose (syndrome HNPCC) est une maladie génétique à transmission autosomique dominante avec une pénétrance comprise entre 70 à 80 %, liée à des mutations délétères des gènes du sys-tème MMR de réparation de l’ADN. Quatre gènes sont principalement incriminés : MSH2, MLH1, MSH6 et PMS2, ils confèrent à la tumeur un phénotype instable.
→ Un test réalisé sur la tumeur permet de suspecter la ML en montrant dans la tumeur soit la perte de la protéine correspondant au gène, soit un ADN instable qui est la caractéristique de cette prédisposition.
→ La ML est responsable de 3 à 4 % des cancers co-lorectaux et environ 50-70 % des sujets porteurs de la maladie présenteront un cancer colorectal au cours de leur vie, l’âge moyen de survenue étant de 44 ans. Elle est également impliquée dans l’apparition d’autres cancers constituant le « spectre » de la ML, avec, en premier lieu le cancer de l’endomètre chez la femme (risque cumulé supérieur à 50 %), puis d’autres cancers plus rares (risque cumulé 5 % environ) : cancer urothélial (bassinet et uretère), ce qui est le cas de Claude, cancers du grêle, adénome/carcinomes sébacés, cancer de l’ovaire, cancer de l’estomac. Il semblerait aussi exister un sur-risque de développer un cancer des voies biliaires et du pancréas.
→ Les adénomes coliques observés chez les patients atteints sont le plus souvent plans et ont pour parti-cularité d’évoluer rapidement.
UNE SURVEILLANCE RIGOUREUSE
Paul va être opéré avec ablation de sa tumeur urothéliale; le pronostic de ces tumeurs est habituellement bon.
→ Son suivi ultérieur sera strict :
- coloscopie totale, avec chromo-endoscopie à l’indigo-carmin qui permet de mieux détecter les adénomes plans, annuelle du fait de ses antécédents d’adénomes plans ;
- examen de l'estomac tous les 2 à 4 ans, recherche et éradication d’H. pylori systématique, en intégrant une visualisation de la partie distale du duodénum ;
- cytologie urinaire et échographie vessie pleine tous les deux ans et consultation de dermatologie tous les 4 ans.
QUAND ÉVOQUER CETTE MALADIE ?
→ En l’absence de polypose, le diagnostic est évoqué devant une agrégation familiale de cancer et/ou des âges jeunes au diagnostic. Une MLdoit systématique-ment être suspectée chez un patient en cas de cancer colorectal ou cancer du « spectre » diagnostiqué à un âge inférieur à 60 ans ; de la survenue de deux tumeurs du spectre large quel que soit l’âge chez le même patient ou chez deux patients apparentés au premier degré, de cancer du spectre quel que soit l’âge au moment du diagnostic pour toute personne ayant un apparenté au 1er degré atteint d’un cancer colorectal ou d’un cancer du spectre (urothélial, endomètre, ovaire) avant 60 ans,
→ La détection du syndrome de Lynch se base sur le test d’instabilité réalisé à partir d’un fragment conservé de tumeur et de muqueuse normale adjacente (ces prélèvements sont légalement conservés 20 ans par les services d’anatomie pathologique). Il ne faut pas hésiter à adresser ces patients, avec ou sans test sur tumeur, aux nombreuses consultations d’oncogénétique pour une recherche de mutation du gène MMR.
→ La ML est sous-diagnostiquée, 50 % des familles atteintes ne sont actuellement pas identifiées.
DÉPISTAGE ET PRÉVENTION POUR LES ENFANTS
→ Une consultation d’oncogénétique est recom-mandée à l’âge de 20 ans au cours de laquelle une recherche de la mutation en cause sera proposée aux enfants de Claude.
→ Ses enfants porteurs de la mutation (en théorie un enfant sur deux puisqu’il s’agit d’une transmission dominante) devront bénéficier d’une stratégie de dépistage et de prévention : endoscopie colorectale complète avec chromoscopie dès l’âge de 20 ans puis tous les deux ans au maximum si elle est normale ; à partir de 30 ans pour les femmes, une échographie endovaginale et un prélèvement endométrial tous les ans.
Une chirurgie prophylactique (hystérectomie et ovariectomie bilatérale) peut être proposée lorsque le projet parental est terminé ; l’identification par gastroscopie et l’éradication d’une infection par H. pylori vers 20 ans, ; recherche annuelle d’une hématurie à partir de l’âge de 35 ans ou 5 ans avant l’âge le plus jeune de survenue dans les ascendants ; examen cutané par un dermatologue tous les 3 ou 4 ans.
→ Il n’y a pas de chirurgie prophylactique recommandée sur côlon sain. Mais si une tumeur colorectale est diagnostiquée chez un sujet (relati-vement) jeune (< 60 ans) et nécessite une chirurgie, une colectomie sub-totale est recommandée avec anastomose iléo-rectale.
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