Pierre-Louis, 42 ans, consulte car il a été mordu 48 heures auparavant au mollet droit par un chat errant, et il présente un érythème et une hyperthermie à 38 °C.
Nous connaissons bien ce patient, qui présente comme antécédents personnels :
- un diabète de type 2 découvert il y a trois ans, traité par un biguanide. Il est actuellement bien équilibré avec une HbA1C à 5,9 %,
- une coronaropathie découverte l’année précédente (pose de deux stents) avec un traitement comportant : antiagrégant plaquettaire (association clopidogrel et aspirine), statine (atorvastatine) et β-bloquant (aténolol).
Cliniquement, nous retrouvons un érythème sur une grande partie de la jambe droite du patient mais aussi les traces de crocs du chat à l’origine de la lésion observée.
En parallèle, nous mettons en évidence la présence d’adénopathies inguinales.
Compte tenu de l’interrogatoire du patient et de la lésion, nous pouvons avancer que ce patient présente une pasteurellose, diagnostic confirmé suite à la réalisation d’un prélèvement au niveau d’une zone avec écoulement de pus.
INTRODUCTION
La pasteurellose est une infection cutanée due à un coccobacille gram négatif de la famille des Pasteurellaceae, identifiée en 1877 par Louis Pasteur. Quatre espèces sont responsables de pathologies chez l’Homme, Pasteurella multocida étant celle qui est, dans la grande majorité des cas, identifiée lors de morsures par un chat ou un chien (cette bactérie fait partie de la flore commensale de ces animaux).
Sur un plan épidémiologique, cette infection bactérienne est fréquente (incidence comprise entre 100 et 500 cas/100 000 habitants). On retrouve Pasteurella multocida dans 50 à 80 % des cas lors des morsures d’un patient par un chat, et dans environ 25 % des cas lors des morsures par un chien.
SYMPTOMATOLOGIE
L’incubation de cette infection cutanée est relativement brève : entre 3 et 6 heures.
La main est la partie du corps la plus souvent exposée à cette affection.
Le patient présente le plus souvent des manifestations cliniques en rapport avec une dermohypodermite aiguë qui est mise en évidence dans les 24 à 48 heures après la morsure : érythème de la zone infectée, œdème, écoulement sérosanglant (40 % des cas) ou purulent (cela est plus rare).
On objective dans certains cas une lymphangite (20 % des cas), des adénopathies satellites (10 % des cas), mais aussi une douleur souvent intense. Un train fébrile est objectivé dans 20 % des cas.
DIAGNOSTIC ET COMPLICATIONS$
Le plus souvent, le diagnostic est clinique (disproportion entre douleur et importance de la plaie, survenue brutale du tableau clinique). Mais, en cas de doute, il est possible d’effectuer une recherche bactériologique suite à un prélèvement au niveau de la plaie ou après avoir effectué des hémocultures.
Si l’infection cutanée n’est pas prise en compte, elle peut évoluer en donnant une arthrite septique, un abcès (cette évolution est le plus souvent observée chez un patient ayant une immunodépression, un diabète, un alcoolisme chronique…).
Il est également possible d’objectiver certaines complications (elles ne sont que rarement secondaires à une morsure par un animal mais plutôt dues à des contaminations par voie aéroportée ou orale) dès lors que cette bactérie devient invasive : méningite, endocardite, infections abdominales ou oculaires.
PRISE EN CHARGE
Dans un premier temps, il est important de laver et désinfecter la plaie. Tout tissu dévitalisé doit être éliminé. Secondairement, un traitement par de l’amoxicilline associée ou non à de l’acide clavulanique doit être effectué par voie orale ou intraveineuse si l’infection est importante. En cas d’allergie aux pénicillines, il est possible d’administrer une céphalosporine de troisième génération ou une tétracycline. Le traitement doit être administré sur une durée de sept jours, sauf si le patient présente une bactériémie car, dans ce cas, la durée du traitement sera prolongée de sept jours.
Enfin, il est également important de s’assurer que le patient est à jour de sa vaccination antitétanique.
Dr Pierre Francès (médecin généraliste à Banyuls-sur-Mer), Tara Chalaye (interne en médecine générale à Montpellier), Carla Lapointe et Julie Schneider (externes à Montpellier)
BIBLIOGRAPHIE
1. Pham HC, Toutous-Trellu L. Morsure de chat et pasteurellose cutanée. Médecine et Hygiène 2004 ; 62 : 498-500.
2. Mokni M, Dupin N, Del Giudice P. Dermatologie infectieuse. Ed Elsevier Masson 2014.
3. INRS. Pasteurellose. Pasteurella spp parmi lesquelles les espèces pathogènes pour l’homme sont multocida essentiellement, dagmatis, canis, stomatis. Novembre 2016.
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