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L’entorse de cheville sort de l’immobilisme

Publié le 04/06/2010
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Les entorses de cheville constituent la pathologie la plus fréquente en matière de traumatologie de l'appareil locomoteur. Elles représentent 5 000 cas traités par jour au Royaume-Uni, 23 000 cas aux Etats-Unis et 6 000 cas par jour en France. En janvier 2000, l’Anaes publiait des recommandations sur la prise en charge des entorses de cheville (1). Elles préconisent l’application du protocole RICE (Rest = repos, Ice = glace, C = compression, E = élévation) où il est conseillé l'arrêt immédiat de l'activité. Dans un deuxième temps une contention ou immobilisation temporaire est réalisée afin de limiter la douleur et surtout l'oedème de la cheville. Un glaçage soigneux en protégeant la peau et une élévation sont également effectués. La prise en charge médicale qui s’ensuit est généralement passive passive, avec repos, glaçage, compression, protection, surélévation et beaucoup de services d’urgence recommandent la mise en décharge à l’aide de béquilles, alors que d’autres préfèrent encore l’immobilisation par résine pendant deux semaines.

Une étude réalisée au Royaume Uni et parue dans un récent BMJ a comparé deux types d’approche des entorses bénignes de la cheville (2). 101 patienst consulatnt aux urgences pour une entorse aiguë de la cheville de grade 1 ou 2 ont été randomisés en deux groupes : l’un pratiquant une intervention précoce avec des exercices dès la première semaine, un autre gropupe traités de manière conventionnelle.

Les deux groupes ont reçu la première semaine des conseils à répéter trois fois par jour de glaçage de la zone traumatisée et de compressions. La prescription d’une contention et d’antalgiques n’était pas systématique.

Deux groupes de patients ont reçu au départ les mêmes conseils classiques de prise en charge. Le groupe « actif » réalisait des exercices de rééducation, à raison de 20 minutes 3 fois par jour et pratiquait la reprise rapide de l’appui, alors que dans l’autre groupe, ces exercices n’étaient commencés qu’une semaine plus tard.

L’amélioration fonctionnelle s’est avérée plus rapide dans le groupe actif avec une aptitude à marcher plus longtemps, à monter davantage de marches d’escaliers, ou à pouvoir réaliser sur une plus longue durée, des activités physiques de faible intensité. L’avantage s’est maintenu pendant les deux premières semaines.

Il existe toutefois quelques bémols dans ces résultats inattendus. La mobilisation immédiate ne semble avoir aucune action sur la douleur ni sur l’œdème et ne modifie pas le pronostic au long cours puisqu’à 16 semaines tous les participants récupèrent la même capacité fonctionnelle et les rechutes à distance sont identiques.

Pour expliquer leurs résultats, les auteurs s’appuient sur le concept de Freeman, selon lequel une lésion articulaire provoque un trouble de la proprioception responsable d’un retard à la récupération fonctionnelle. Ils avancent aussi la notion d’inhibition musculaire arthrogène secondaire au traumatisme que la reprise immédiate d’exercices pourrait combattre en favorisant la « réactivation » musculaire de la cheville.

1- Anaes. Réeducation de l’entorse externe de la cheville. Janvier 2000. Service des recommandations et références professionnelles

2- Chris M Bleakley, Sea´n R O’Connor et al. Affect of accelerated rehabilitation on function after ankle sprain : randomised controlled trial. BMJ 2010;340:c1964

doi:10.1136/bmj.c1964

Dr Linda Sitruk

Source : lequotidiendumedecin.fr