Henri, 58 ans consulte avec le bilan suivant : LDLcholestérol 1,82 g/l, HDL 0,38 g/l, triglycérides 1,8 g/l, cholestérol total 2,56 g/l, glycémie à jeun 5,7 mmol/l. Henri ne fume pas, il pèse 85 kilos pour 1,75m. Il a pris 5 kilos depuis 2 ans, il va dorénavant à son travail en voiture depuis sa promotion, sa pression artérielle est à 142 /83. Il a déjà pris des statines en raison d’une hyperLDLémie, qu’il a arrêtées de lui même. Sur le plan alimentaire s’il essaie de faire attention durant la semaine, mais le week-end il n’y arrive pas. Tour de taille : 98 cm. Henri pense que son bilan est normal, malgré les chiffres signalés par des étoiles des résultats de laboratoire.
Quelles sont les anomalies de ce bilan ?
Le LDL cholestérol de Henri et les triglycérides sont élevés, le HDL est trop bas, sa pression artérielle est au dessus de la normale, la glycémie à jeun également. Le tour de taille est de 98 cm. Il est supérieur à la norme de 94 cm de l’International Diabetes Federation (IDF), mais inférieur à la norme de 102 cm de la AHA (American Heart Association). Henri présente tous les éléments du syndrome métabolique, en outre il est devenu sédentaire. Sur le plan familial il n’existe pas d’accident cardiovasculaire précoce.
Henri ne sait pas que son risque cardiovasculaire est augmenté, il considère qu’il va bien même s’il sait qu’il a pris du poids, mais avec l’âge… et comme beaucoup de personnes il minore son risque. Il n’a pas compris la notion de risque cardiovasculaire. Il pense en effet que puisqu’il n’a pas eu d’accident cardiaque avec l’arrêt des statines, il conclue qu’il n’a pas besoin de traitement. Pourtant, il est bien établi que le syndrome métabolique et son cumul de facteurs de risque est associé à un risque cardiovasculaire élevé (1,2, 4).
Les recommandations 2005 de l’Afssaps distinguent (4):
- les patients à haut risque (antécédent personnel cardiovasculaire quel qu’il soit, diabète à risque, ou score de Framingham ≥ 20 %) dont le LDL-cholestérol doit être < 1,0 g/L ;
- les patients à moindre risque dont l’objectif de LDL-cholestérol s’échelonne de 2,20 g/L à 1,30 g/L selon qu’ils n’ont aucun FRCV ou ≥ 3FRCV. Henri fait partie de cette catégorie.
Doit-on prescrire des statines ?
Les recommandations de l’Afssaps de 2005 précisent, que la prise en charge du syndrome métabolique fait appel à des mesures diététiques et à l’activité physique et qu’aucun médicament n’a d’indication spécifique dans le traitement du syndrome métabolique. La stratégie thérapeutique consiste à prendre en charge individuellement chaque facteur de risque.
Les mesures diététiques ayant échoué, il est recommandé de prescrire des statines à ce patient avec un objectif de 1.3 g/L (correspondant à 3 facteurs de risque : âge, hypertension et HDL bas). Cette prescription est nécessairement associée à des propositions de diététique et d’hygiène de vie. Elles doivent être expliquées soigneusement, ce qui demande du temps. Elles doivent également être réalistes, c’est-à-dire adaptées au patient, pour ne pas être ressenties comme des restrictions habituellement vouées à l’échec. Elles doivent recevoir l’agrément du patient. En pratique il est nécessaire de fixer un objectif à la fois et de revoir le patient au bout de 6 mois. Dans le cadre de cette observation, le patient est conscient de sa prise de poids qu’il relie au changement de son mode de vie (sédentarité). Il paraît réaliste de proposer à Henri de ne plus prendre sa voiture pour qu’il recommence à marcher deux fois 12 minutes par jour pour se rendre au travail. Cette proposition d’augmentation de l’activité physique devrait lui faire perdre quelques kilos, normaliser la pression artérielle, la glycémie. On propose à ce patient de le revoir après 6 mois, pour un nouveau bilan. Enfin, on peut également proposer à Henri de limiter sa consommation de boisson alcoolisée le week-end afin de diminuer son poids et les triglycérides. Le bilan effectué deux ans auparavant était normal, Henri comprend ainsi très bien qu’il est possible de le normaliser par la mise en œuvre des conseils peu contraignants qui lui sont proposés.
Sur le plan de la diététique, il est utile de proposer à Henri de réduire sa consommation de fromage à une fois par jour. Jusqu’à présent il en consommait à midi et le soir. Par ailleurs, il faut insister sur des conseils de base simples : la nécessité de ne pas faire la cuisine au beure, limiter la consommation de charcuterie grasse, remplacer le lait entier par du lait demi-écrémé. Henri est également d’accord pour utiliser son vélo d’appartement le week-end (deux fois 30 minutes) ou de commencer à faire du jogging. Il est prudent de réaliser un bilan cardiaque avant la reprise de cette activité physique (6).
Quelle statine prescrire ?
La maitrise médicalisée des dépenses de santé, arrêtée dans la convention médicale signée entre l’Uncam et les syndicats représentatifs de médecins, impose/recommande au médecin de prescrire en priorités des statines génériques (4, 5). Les recommandations de l’Afssaps préconisent de débuter les statines par les doses les plus faibles surtout en prévention primaire.
Étude et pratique
HTA : quelle PA cible chez les patients à haut risque cardiovasculaire ?
Mise au point
Troubles psychiatriques : quand évoquer une maladie neurodégénérative ?
Étude et pratique
Complications de FA, l’insuffisance cardiaque plus fréquente que l’AVC
Cas clinique
L’ictus amnésique idiopathique