SELON LES DÉCLARATIONS fiscales 2008 issues des AGA, qui portent sur des effectifs significatifs (14 000 généralistes, 1 400 psychiatres, 1 100 radiologues, 1 100 cardiologues, 1 000 ophtalmologues, 900 anesthésistes…), l’exercice 2008 des revenus des médecins libéraux laissera un goût plutôt amer à la profession : piètre cru pour les généralistes dont le revenu s’inscrit un léger recul, morosité pour la plupart des cliniciens et résultats meilleurs mais disparates pour les spécialités techniques (+12 % pour les néphrologues ou les anapaths, +5,1 % pour les gastro-entérologues, +4 % pour les ophtalmos ou les chirurgiens généraux, +3 % pour les radiologues, +1,5 % pour les anesthésistes.). État des lieux et analyse.
• Médecins généralistes : - 700 euros en moyenne !
Pour les généralistes, c’est la fin d’un cycle ascendant. Après la forte hausse des revenus en 2002 (15 %) et 2 003 (8 %), suivie d’une baisse en 2004, les médecins de famille avaient connu trois années de progression modérée de leur bénéfice imposable en 2005 (3,9 %), 2 006 (2,4 %) et 2 007 (4,4 %), sous l’effet de revalorisations tarifaires (C, forfait ALD, majorations) et d’une activité soutenue. La tendance s’inverse puisqu’il n’y a plus ni effet prix ni effet volume pour tirer les revenus à la hausse (dans une année où l’inflation atteint encore 2,8 %).
La dernière revalorisation de la consultation (à 22 euros) remonte en effet au 1er juillet 2007 (elle n’impacte donc que partiellement les comptes 2 008) puisque la deuxième augmentation de un euro qui avait été envisagée dans la convention pour juin 2008… n’est jamais intervenue, les pouvoirs publics estimant que l’engagement des médecins dans la maîtrise médicalisée n’était pas à la hauteur des objectifs. Ni l’extension de la PDS aux samedis, ni le bonus de 20 % dans les zones fragiles, qui n’a profité qu’à moins de 700 généralistes, n’ont permis de doper les revenus.
Le gel tarifaire de l’acte de référence se ressent d’autant plus que l’activité généraliste (C+V) est en repli sur l’exercice 2 008. Autre fait marquant qui grignote les marges : la hausse des charges (personnel, taxes diverses, loyers, charges sociales…). En 2008, le résultat imposable du généraliste ne représente plus que 58,4 % de l’ensemble de ses recettes (honoraires). L’année précédente, le généraliste conservait 59,40 euros de bénéfice sur 100 euros de chiffre d’affaires. Résultat : le généraliste adhérent à une AGA de l’UNAPL (1) a déclaré 80 300 euros pour 2008 contre 81 000 euros l’année précédente, soit 700 euros de moins. Du coup, le généraliste (spécialiste de médecine générale) cède à nouveau du terrain dans l’échelle des revenus des médecins (voir tableau), dépassé par le neurologue, et affichant un bénéfice moyen toujours deux fois moindre que celui du chirurgien ou du néphrologue.
Les disparités de revenus entre généralistes restent marquées, du simple au triple : lorsque le quart le plus fortuné émarge à 131 000 euros (au niveau de l’ophtalmologue), le quart le moins bien rémunéré n’inscrit que 38 900 euros sur sa feuille de paie (moins que le remplaçant). Le nouveau CAPI « au mérite » (contrat d’amélioration des pratiques individuelles), qui semble rencontrer un certain succès, permettra-t-il aux revenus généralistes de retrouver le chemin de la hausse en 2009 ? L’activité clinique bondira-t-elle à la faveur d’une épidémie de grippe ? Réponse dans les prochains mois.
• Médecins spécialistes : fortunes diverses
L’exercice 2008 a plutôt souri aux spécialités techniques, moins aux spécialités cliniques.
En 2007, neuf des 25 spécialités de notre liste avaient essuyé une baisse de revenus. Elles ne sont plus que quatre à subir des pertes en 2008 dont trois disciplines cliniques (-0,4 % pour les psychiatres, -2,3 % pour les rhumatologues et -2,7 % pour pédiatres) et une spécialité technique (-2,5 % pour les chirurgiens urologues). Bon nombre de « cliniciens » affichent un bénéfice qui stagne ou progresse très faiblement : ORL, gynécologues médicaux, pneumologues, dermatologues…
D’une manière générale, les « techniciens » tirent mieux leur épingle du jeu à l’instar des néphrologues (+12,4 %), anapaths (+12 %), stomatologues (+5,6 %) ou gastroentérologues (+5,1 %). « Plusieurs facteurs permettent de comprendre ces résultats, avance le Dr Olivier Aynaud, secrétaire général de l’UNAPL. Il y a d’abord la nouvelle classification commune des actes médicaux (CCAM) qui favorise les actes techniques alors que le nombre de consultations demeure relativement stable ». Le creusement de revenus entre les spécialités techniques et cliniques s’explique en partie par l’entrée en application de la deuxième étape de la CCAM technique au1er janvier 2008.
Selon le Dr Aynaud, la tension démographique a également dopé les revenus de certaines spécialités comme la chirurgie ou l’ophtalmologie. Et « le vieillissement de la population entraîne également une plus forte activité chez certains professionnels comme les néphrologues », ajoute le secrétaire général de l’UNAPL. La hausse des charges sociales (personnel, impôts, loyers…) a amputé le bénéfice. La plupart des spécialités perdantes ou stagnantes ont vu les charges sociales prendre une part croissante dans leur déclaration fiscale.
Malgré cet exercice 2 008 peu faste, le Dr Aynaud relativise la situation des médecins par rapport à d’autres professions libérales. « Depuis le début de la crise, le secteur santé qui bénéficie d’un financement socialisé souffre quand même moins que le monde juridique ou les architectes ou de très nombreux sont repoussés ou annulés ».
(1) Pour les généralistes, les résultats fiscaux issus des AGA sont toujours un peu supérieurs à la moyenne de l’ensemble des omnipraticiens incluant les MEP.
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