Alors que les conclusions des deux rapports de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) sur les mesures estivales de la mission Braun sont déjà sur le bureau du ministre et devraient être publiées prochainement, l'intersyndicale Action Praticiens Hôpital (APH) a rendu publique sa propre évaluation, en fin de semaine dernière.
« Notre enquête démontre que ce qui aurait pu enfin être un carrosse pour les praticiens n'a été que citrouille, ironise la Dr Anne Geffroy-Wernet, secrétaire générale d'Avenir Hospitalier, membre d'APH. Les mesures nées dans le cadre de la mission flash avaient donné une petite lueur d'espoir pour les médecins qui assurent la continuité et la permanence des soins, dévolue en très grande majorité à l'hôpital public ». Dès le début de l'été, APH avait fait part de ses inquiétudes à ce sujet.
Des craintes confirmées car, dans les faits, l'enquête de l'intersyndicale – à laquelle ont répondu 2 050 médecins dont 93 % de PH (58 % en CH et 38 % en CHU, le reste en CHS) – met en lumière qu' « entre le ministère et les praticiens, l'information s'est perdue, et finalement, aucun praticien n'a l'assurance que les arrêtés publiés en début d'été seront appliqués ». APH balaye aussi devant sa porte car l'information sur les majorations exceptionnelles estivales est parvenue aux médecins par les syndicats pour « 47 % seulement ». Mais c'est mieux que les hôpitaux qui ont été la source de l'information pour à peine 24 % des répondants vs 28 % la presse et 25 % les collègues.
Cafouillages estivaux
Ainsi, pour le temps de travail additionnel (TTA) au-delà de 48 heures, 46 % des PH dont celui-ci est payé ne savaient pas au moment de l'enquête si le doublement de la rémunération pendant l'été – conformément à l'arrêté du 29 juin 2022 – leur serait appliqué. Et pour la majoration de 50 % du montant des gardes, 52 % des praticiens qui en réalisent ne savaient pas non plus s'ils en bénéficieront…
Plus grave, sur les 83 % des répondants du panel qui font du TTA et qui sont au courant des modalités, seuls les deux tiers (68 %) disent que la majoration leur sera appliquée en totalité et 11 % « partiellement ». Les raisons des refus opposés aux praticiens sont, selon eux, que les heures supplémentaires n'existent pas pour eux, que le médecin fait du TTA en dehors du service des urgences ou du Samu ou encore que le TTA est une activité indépendante de la permanence de soins. Faux, répond APH qui s'interroge « grandement sur la gestion des ressources humaines par certaines directions hospitalières ».
Quant aux gardes, assumées par la quasi-totalité des répondants du panel, 64 % des praticiens qui étaient au courant des modalités affirment que la majoration estivale leur sera bien payée pour toutes les gardes et 6 % pour certaines gardes.
Point positif pour le gouvernement : en dépit de ces cafouillages estivaux, 80 % des praticiens interrogés estiment que la valorisation du temps de travail additionnel est une bonne mesure. Et concernant le tarif (640 euros brut pour dix heures), 46 % des sondés trouvent que le montant « valorise correctement l'effort pour travailler au-delà des obligations de services » quand 20 % le juge insuffisant. Idem pour les majorations de gardes, 69 % des praticiens voudraient que la mesure soit pérennisée.
Oublis à réparer
Les mesures estivales issues de la mission Braun avaient, en revanche, fait l'impasse sur la question de la revalorisation des astreintes. C'est un oubli qui doit être réparé, selon 94 % des sondés.
Au final, la séquence laisse un goût amer aux PH. « Malgré une communication assez bien orchestrée au plus haut niveau de l'État, qui aurait pu donner un peu d'espoir aux soutiers de la santé que nous sommes, le silence désespérant des ARS et de certaines directions hospitalières sur la mise en place de ces mesures est ahurissant », conclut APH. L'intersyndicale craint déjà que, faute d'informations, tous les praticiens ne perçoivent pas les majorations qui leur reviennent, comme au moment des primes Covid.
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