Les 750 millions d'euros posés sur la table par Agnès Buzyn n’ont pas suffi à calmer la grogne aux urgences. Au contraire, dès le lendemain des annonces de l'exécutif, la grève a été reconduite à l'unanimité par le collectif inter-urgences. Fort de 250 services mobilisés partout en France, ce dernier veut désormais étendre le mouvement au reste de l'hôpital et fait un appel du pied très net aux médecins pour se mettre en grève.
À Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) mardi 10 septembre, lors de l'assemblée générale du collectif qui a consacré la poursuite du mouvement, les quelques praticiens hospitaliers (PH) présents ont été interpellés (parfois vivement) par les paramédicaux présents. Ceux-ci exhortent les médecins à rejoindre la grève. Exemple frappant, à peine le Dr Renaud Péquignot, vice-président de l'intersyndicale Action praticiens hôpital (APH) avait-il pris le micro qu'une voix s'échappait de l'amphithéâtre pour le couper. « On est en grève depuis des mois, certains se sont déplacés de loin pour venir aujourd'hui, maintenant on a besoin d'un appel clair de votre part, on a besoin de savoir si vous êtes avec nous », vitupérait Mélanie, infirmière au CHU d'Angers (Maine-et-Loire), sous les applaudissements de la salle.
Visiblement étonné de cet accueil, le Dr Péquignot s'est défendu en expliquant « qu'il est difficile de mettre les médecins en grève » et qu'il ne pouvait pas se prononcer sans consulter d'abord toutes les structures qui composent l'intersyndicale. « Je vais faire tout mon possible pour qu'on se mette en grève », a-t-il finalement lâché, récoltant lui aussi les applaudissements de l'auditoire.
Action praticiens hôpital divisé
Reste à savoir s’il sera entendu par ses camarades syndicalistes. La question sera discutée lors d'un prochain conseil d'administration de l'intersyndicale prévu jeudi 12 septembre. Mais la partie n'est pas gagnée d'avance tant sont grandes les divergences de position au sein de la centrale syndicale APH. D'un côté, le Dr François Braun, président de SAMU-Urgences de France (SUDF) se réjouit d'un plan pour les urgences « plutôt bien fait » et affirme que SUDF n'appellera pas à la grève. De l'autre, le SNPHARe (syndicat qui regroupait à ses débuts des anesthésistes très engagés), également membre de la centrale, fait monter la pression en affirmant que « sans perspective d’un meilleur avenir, le mouvement de grève des urgences risque de s’étendre rapidement aux personnels médicaux, dans tout l’hôpital ».
Le même jour, l'Association des médecins urgentistes de France (AMUF), se réunira, elle aussi, pour décider de la position à adopter. « L'AMUF soutient le mouvement depuis le départ mais n'a pas appelé à la grève jusqu'à présent pour ne pas nuire à la visibilité des personnels paramédicaux », assure pour le moment son porte-parole, le Dr Christophe Prudhomme. Seul le Syndicat national des médecins hospitaliers-FO (SNMH-FO) s'est déclaré « favorable à la grève des médecins ». Son président, le Dr Olivier Varnet, se dit « solidaire à 100 % des revendications du collectif ».
À l'Intersyndicat national des PH (INPH) aussi la prudence est de mise. Sa présidente, le Dr Rachel Bocher, se dit mécontente des mesures proposées, qu'elle qualifie de « pastille sur une rustine ». Elle tance aussi la méthode du gouvernement, jugeant n'avoir pas été concertée en amont. Pour autant, la psychiatre veut « éviter d'être l'agitée du bocal » pour plutôt « faire partie de la concertation ». La grève n'est donc pas à l'ordre du jour à l'INPH même si « elle fait partie des possibilités ». Le syndicat devrait prendre une décision dans les semaines à venir.
Chez les jeunes, la question mobilise moins. Les urgences seront à l'ordre du jour du prochain conseil d'administration de l'Intersyndicat national des internes (ISNI), indique simplement son président Antoine Reydellet alors que son homologue de l'Association nationale des étudiants en médecine de France (ANEMF) assure laisser la question aux syndicats de seniors.
Les médecins de l'AP-HP s'engagent
C'est finalement à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) que les médecins s'engagent le plus. Le jour de son assemblée générale, le collectif inter-urgences a reçu deux soutiens de poids dans la capitale. Le premier est issu de la Collégiale des psychiatres de l'AP-HP (qui représente la spécialité dans le CHU) qui réclame « des actions immédiates et concrètes de revalorisation des statuts des personnels » et des mesures spécifiques pour les urgences psychiatriques. Le second provient directement de la commission médicale d'établissement (CME) de l'AP-HP qui a voté à l'unanimité une motion de soutien aux demandes de services d'urgences. La CME demande « que les mesures annoncées pour répondre à la crise des urgences soient intégralement financées sans être imputées au budget actuel des hôpitaux ».
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