DE NOTRE CORRESPONDANTE
DANS LA CHAMBRE D’HÔPITAL, le moniteur de l’électrocardiogramme lance un signal. Arrêt cardiaque. Aussitôt, un étudiant en seconde année d’internat se précipite au chevet du malade et entame la prise en charge. « Vous m’entendez ? », interroge le futur médecin qui constate, au clignement des yeux, que le patient est conscient. Le souffle est saccadé. L’interne réclame du monde pour réaliser un massage cardiaque. Plusieurs blouses blanches se relaient sur le torse du malade, tandis que les autres membres de l’équipe assurent les gestes d’urgence.
Moment de stress dans la chambre. Finalement, le cœur du patient repart. Le malade a pu être sauvé.
Cachée derrière une vitre sans tain, Mercé Jourdain, professeur de réanimation, a suivi toute l’opération en temps réel et analysé les gestes des soignants. Elle vient les féliciter pour leur prise en charge. Un sans-faute. Soulagement chez les étudiants, rassurés d’avoir « sauvé » leur patient… Même s’ils savaient que l’homme allongé dans ce lit d’hôpital n’était qu’un robot, un mannequin rempli d’électronique et doté de fonctions organiques. Monsieur METI, comme on l’appelle dans les rangs de la fac, saigne, urine, et même parle ! Et si les gestes effectués par l’équipe n’avaient pas été appropriés, le malade serait « décédé », les capteurs glissés dans le mannequin ayant détecté d’éventuelles erreurs…
Le tout premier HPS.
Arrivé à Lille voilà dix ans, METI a été le tout premier HPS (Human Patient Simulateur) introduit dans une faculté française. Son prix explique en partie sa faible diffusion : cette merveille technologique coûte plus de 150 000 euros. Il n’en existe qu’un autre en France, à Paris.
Précurseur, METI a été rejoint progressivement par une « famille » de robots plus ou moins élaborés : quelques mannequins simples et six mannequins haute-fidélité de dernière génération dotés d’une respiration, d’un système vasculaire et nerveux les rendant extrêmement réalistes. Aujourd’hui, c’est un véritable centre de simulation médicale qu’abrite le pôle Recherche de la Faculté de Médecine de Lille. Baptisé PRESAGE (plate-forme de recherche et d’enseignement par simulation pour l’apprentissage des attitudes et des gestes), cet espace permet à tous les étudiants en médecine de s’essayer aux gestes médicaux, depuis les plus simples comme la suture d’une plaie ou la prise de sang, jusqu’aux actes plus complexes.
Dès la deuxième année, chaque étudiant bénéficie de quatre séances de simulation d’une durée de deux heures. Cette formation organisée juste avant le premier stage en hôpital permet au futur praticien d’expérimenter deux gestes simples et deux examens cliniques. À partir de la troisième année, les séances s’articulent autour de jeux de rôle avec un scénario de prise en charge. Chaque intervention est débriefée par l’enseignant. Pour les internes, la simulation peut aller jusqu’à la gestion d’une équipe au bloc opératoire, avec tout le personnel paramédical qui gravite autour des médecins. L’univers hospitalier est reproduit à l’identique avec les mêmes chariots d’urgence, le même matériel…
« Au niveau pédagogique, cette plate-forme de simulation est un véritable apport pour l’enseignement de la médecine. Elle s’imposait également sur le plan éthique, insiste Didier Gosset, doyen de la Faculté de médecine. La société a évolué, et aujourd’hui il n’est plus acceptable de faire pratiquer le même geste successivement par dix étudiants sur un patient. Des générations de médecins ont été formées de cette manière mais aujourd’hui, on ne tolère plus ces pratiques. La simulation offre également une meilleure sécurité : un médecin est bien mieux préparé s’il a répété le même geste des dizaines de fois avant de le faire sur un vrai patient. Sa performance s’en trouve améliorée. On peut d’ailleurs imaginer qu’à l’avenir, les compagnies d’assurance module leurs primes en fonction du nombre d’heures passées sur simulateur, comme cela se pratique déjà aux États-Unis. »
Charge émotionnelle.
Les étudiants, en tout cas, apprécient cette mise en situation. « Les stages sont devenus très spécialisés et selon le service dans lequel nous exerçons, il existe de nombreux gestes que nous ne pratiquons jamais. La simulation nous permet de pratiquer, dans des conditions proches de la réalité, confie Maxence Gaillard, étudiant en troisième année. J’ai appris cette semaine à faire une ponction lombaire sur un mannequin. C’est un geste délicat, et je serai moins stressé lorsque je devrai le faire sur un vrai malade. »
« La plate-forme reproduit exactement les conditions réelles d’exercice et en réanimation, par exemple, la charge émotionnelle est aussi forte que dans un vrai service, explique le Pr Mercé Jourdain, directrice de la plate-forme PRESAGE. Il n’est pas rare qu’un étudiant s’effondre en larmes lorsqu’il n’a pas réussi à sauver son "patient". L’échec est ressenti aussi douloureusement que face à un vrai malade. »
PRESAGE peut également être utilisée dans le cadre de la FMC. Récemment, des médecins urgentistes confirmés ont eu droit à un scénario bâti sur mesure pour la prise en charge d’un polytraumatisé. D’autres scenarii avec jeux de rôle ont été mis en place pour préparer une équipe au prélèvement d’organes. Des mises en situation qui permettent aux praticiens d’être moins désemparés face à des cas complexes.
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