LE QUOTIDIEN : Quelle est votre recette pour une CPTS bien réussie ?
Dr RAPHAËL ROGEZ : Mettre tout le monde autour de la table, créer une fédération d'URPS pluridisciplinaire et ne pas laisser le terrain se débrouiller tout seul ! En Centre-Val de Loire, des professionnels de santé libéraux (médecins, pharmaciens, infirmiers, kinés) ont exprimé dès 2012 leur souhait de travailler ensemble à des projets de territoire. Nous avons donc décidé de les accompagner dans leur création de communautés. En se fondant sur les données de l’assurance-maladie, nous avons délimité chaque territoire correspondant aux trajectoires de consommation de soins des patients des médecins libéraux, que ce soit aux urgences ou en consultation hospitalière. Nous avons ensuite élaboré une cartographie. Ce travail en amont a facilité la démarche des porteurs de projet des CPTS sur le territoire. Normalement, une CPTS réclame six ans de travail. Dans notre région, la dernière est sortie de terre en un an. Aujourd'hui, nous avons quatre CPTS qui ont contractualisé avec l’ARS et six en cours de finalisation. D’ici un an et demi, nous serons en mesure de mailler toute la région de 25 à 30 communautés, à raison de quatre à cinq par département.
Quelle est la nature des projets de santé des communautés ?
Il existe des projets propres à chaque structure, selon les envies des professionnels de santé et les besoins de la population. Cela va de l’obésité de l’enfant au dépistage du trouble cognitif. Il y a aussi des projets communs portant sur l’organisation de la réponse aux soins non programmés, le lien ville-hôpital, la coordination avec les autres professionnels de santé et le déploiement des outils de communication.
Dans quelle mesure l'URPS s'investit financièrement ?
Pour décharger les porteurs de projets des démarches administratives – dont se plaignent les médecins – nous avons dégagé un budget spécifique de 300 000 euros annuel pour salarier sept coordinateurs à temps plein au service des communautés. Ces personnes sont chargées de trouver les lieux de réunion, envoyer les invitations, faire les comptes rendus, etc. Une fois le contrat avec l’ARS signé, la CPTS devient autonome. Si elle souhaite salarier à son tour le coordonnateur pour assurer le fonctionnement de sa structure, elle devra le rémunérer avec les aides financières allouées par l’ARS, de l’ordre de 50 000 euros.
Avez-vous identifié des difficultés ?
La première difficulté est de trouver des personnes compétentes susceptibles de comprendre le monde de la santé. La deuxième est la multiplicité des acteurs. Réunir les professionnels de santé, les hôpitaux ou encore le médico-social réclame une certaine énergie. La troisième concerne la relation entre le médico-social et les autres partenaires, qui n’ont pas toujours l’habitude de travailler ensemble.
On m'interroge parfois sur le risque de concurrence au sein d'une communauté mais ici, la question ne se pose pas. Le Centre-Val de Loire est la dernière région française en termes de densité médicale. Ici, tout le monde meurt d’une suractivité. Les professionnels sont donc plutôt contents de réduire leur temps de travail. Prenons l’exemple d’un territoire où une CPTS lance une action de dépistage de la bronchopneumopathie chronique. Ce qui peut être un frein, ce sont les individualités. Or, dans une CPTS, les médecins autant que les pharmaciens font souffler dans le spiromètre. Mais tout le monde n’est pas obligé d’adhérer au principe de communauté.
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