La rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP) est dans son viseur depuis ses origines.
Dans un court ouvrage, le Dr Dominique Dupagne, agitateur d'idées et médecin influent sur les réseaux sociaux, condamne la dictature de la qualité dans le monde de l'entreprise, mais aussi depuis quelques années dans la sphère sanitaire.
Cette démarche qui a d'abord consisté, au début des années 1990, à accréditer les cliniques et les hôpitaux, puis à évaluer les pratiques professionnelles (EPP) des médecins libéraux, aurait perdu tout son sens dès lors qu'elle a été utilisée comme un « outil normatif et sclérosant », affirme le généraliste parisien.
Pire, la démarche qualité n'aurait pour autre finalité, selon le Dr Dupagne, que d'assujettir les médecins. « C'est un merveilleux outil de domination, permettant à des contrôleurs dépourvus de compétences techniques d'exercer leur autorité sur des employés qualifiés et expérimentés », argumente le médecin autoproclamé « essayiste et expert en e-santé ». Le Dr Dupagne regrette que l'approche originelle ait été abandonnée au prétexte qu'elle était trop onéreuse. « La démarche qualité peut conduire au meilleur comme au pire ; dévoyée, elle peut devenir toxique », assure-t-il.
Indicateurs fragiles
Dominique Dupagne estime que l'assurance-maladie a même réussi une prouesse en « réintroduisant le taylorisme dans le système de santé français » avec le contrat d'amélioration des pratiques individuelles (CAPI) puis la fameuse ROSP.
La prime sur objectifs qui est calculée chaque année par la CNAM selon les résultats obtenus par le médecin sur des indicateurs chiffrés (taux de génériques, suivi de maladies chroniques, dépistage, vaccination…) « désespère ceux qui font du bon travail », affirme le généraliste.
Ce système assurerait au contraire « la fortune des escrocs tant les indicateurs sont faciles à manipuler ». Il cite l'exemple d'un médecin qui récoltait les bons de vaccination en pharmacie, les conservait au cabinet, vaccinait les patients volontaires et jetait à la poubelle les produits inutilisés. Or l'assurance-maladie établit la réalité de la vaccination à partir du seul retrait du vaccin en pharmacie.
Dénonçant « l'effet nul sur la qualité mais coûteux » des systèmes de rémunération à la performance, le médecin appelle ses confrères à « résister » à la « domination déguisée en démarche qualité ». Il souhaite également faire bouger les lignes du côté de la CNAM. Dominique Dupagne a adressé un exemplaire de son ouvrage au directeur de l'assurance-maladie, qui va négocier ce jeudi les pistes pour... aménager la ROSP dans la future convention médicale.
« Qualité, mon Q ! », éditeur Books on demand, 122 pages, 7,50 euros
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