LIVRES - Les romans de l’hiver

Une fiction ancrée dans le réel

Publié le 10/01/2012
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EN NOMBRE, les premiers romans font un bon score, puisqu’on en dénombre 55, avec des signatures à dominante masculine – 33 romanciers et 22 romancières –, dont la plus jeune a nom Chloé Colpin et seulement 19 ans, tandis que le doyen, Georges Chelly, compte 76 printemps. La solitude et le deuil sont des thèmes qui reviennent sous ces jeunes plumes.

Parmi les auteurs connus, reconnus et incontournables, Philippe Besson raconte dans « Un garçon sans séduction » (Julliard) la rencontre improbable, dans la liesse de l’élection de Barak Obama, à Los Angeles, d’une serveuse quarantenaire sur le point de se suicider et d’un homme dont le fils adolescent vient de se donner la mort.

Jean-Yves Cendrey, auteur d’une quinzaine de livres, et notamment des « Jouets vivants », publié après qu’il a eu le courage d’accuser l’instituteur du village de Cormeilles où il vivait (il est marié à la romancière Marie Ndiaye, avec qui il a trois enfants) de pédophilie sur de nombreux élèves, situe « Mélancolie vandale » (Actes Sud) à Berlin, où il vit actuellement. À travers les errances d’une héroïne désabusée, il rend un hommage grinçant à la ville, laminant les mythologies de la défunte RDA comme les illusions de l’Allemagne nouvelle.

Loin de la saga de « la Bicyclette bleue » et autres romans à succès, Régine Deforges renoue dans « Toutes les femmes s’appellent Marie » (Hugo & Cie) avec le « roman d’engagement », sur le sujet tabou de la sexualité des handicapés. Quand l’adolescence transforme, radicalement et dangereusement, selon la morale des bien-pensants, la relation d’une mère, jeune et veuve, et de son fils, handicapé mental.

Prix Goncourt en 2007 pour « Alabama Song », Gilles Leroy donne, avec « Dormir avec ceux qu’on aime » (Mercure de France), un roman d’amour et d’errance dont les personnages sont l’écrivain-narrateur et un jeune homme rencontré à Bucarest, qui doivent composer avec la différence d’âge, la distance géographique, des emplois du temps inconciliables, la confusion des sentiments.

Écrits intimistes.

Deux autres écrits intimistes ont pour thème la foi. Prix Femina pour « Jours de colère » et prix Goncourt des lycéens pour « Magnus », Sylvie Germain poursuit sa réflexion commencée dans « le Monde sans vous », qui était une méditation sur l’absence des défunts qui nous laisse « sans voix », en se demandant dans « Rendez-vous nomades » (Albin Michel) si ce silence n’est pas la condition pour se mettre à l’écoute d’un écho de cet « absolu du Loin » vers lequel sont partis les défunts.

Loin de ses documents politiques, Franz-Olivier Giesbert – Grand prix du roman de l’Académie française pour « l’Affreux » et prix Interallié pour « la Souille » – explique, dans « Dieu, ma mère et moi » (Gallimard), qu’il est chrétien et fier de l’être mais qu’il est un « nouveau croyant », qui transforme sa foi tout le temps.

D’autres « confessions » naissent sous la plume de François Weyergans, sept ans après son dernier livre, « Trois jours chez ma mère », qui lui a valu le Goncourt, et dix ans après « la Démence du boxeur », prix Renaudot. « Mémoire pleine » (Julliard) est une histoire d’amour très actuelle, dans laquelle les textos jouent un grand rôle, entre un écrivain français quinquagénaire et une jeune comédienne rencontrée à Montréal.

Quant au romancier et éditeur né à Alger, Louis Gardel, couronné, entre autres par l’Académie française pour « Fort Saganne », il raconte, dans « le Scénariste » (Stock), la romance entre un auteur devenu scénariste par le fait du hasard – pour lui la vie n’est pas sérieuse, seul ce qu’il invente est sérieux – et une jeune provinciale venue travailler dans l’édition à Paris.

Faits-divers et faits d’histoire.

Plusieurs romanciers se sont attardés sur un fait-divers pour en faire un livre. Ainsi de Régis Jauffret – qui a reçu le prix Femina pour « Asiles de fous » après le prix Décembre pour « Univers, univers » –, qui, après avoir écrit « Sévère » sur l’assassinat du banquier Stern par sa maîtresse Cécile Brossard, revient dans « Claustria », (Seuil) sur l’affaire Fritzl, dévoilée en 2008, une Autrichienne qui est restée emprisonnée pendant vingt-quatre ans dans la cave insonorisée de son père, qui lui a fait sept enfants.

Membre de l’Académie française depuis 2001, Frédéric Vitoux montre dans « Jours inquiets dans l’Île Saint-Louis » (Fayard) comment l’existence d’un paisible retraité est bouleversée après qu’il a été témoin d’une agression perpétrée en pleine rue par un inconnu.

La géopolitique mène de plus en plus à la fiction, comme en témoigne « l’Inconnue de Birobidjan » (Robert Laffont), un roman dans lequel Marek Halter effectue un retour sur le maccarthysme et l’Union soviétique. Ou, plus près de nous, « Kamal Jann » (Albin Michel), où le héros imaginé par Dominique Eddé, un avocat de Manhattan, est sollicité par la CIA, qui lui demande de rejoindre les services secrets occidentaux contre le pouvoir syrien. Ou encore « la Bombe des mollahs » (Rocher), un roman d’espionnage de Paul Fauray dans lequel interviennent la Syrie, l’Iran, Israël et la Turquie, fondé sur des opérations clandestines qui auraient été réellement menées par les services spéciaux français.

Et puis, ni fait-divers ni fait d’histoire, la présidence de Nicolas Sarkozy est à nouveau la cible de Patrick Rambaud, qui, dans « Cinquième chronique du règne de Nicolas Ier » (Grasset), revient sur l’épisode de la Libye et sur la naissance de sa fille, Giulia.

MARTINE FRENEUIL

Source : Le Quotidien du Médecin: 9062