Salle d’attente, cabinet de consultation… tout est flambant neuf dans les locaux du cabinet médical abrité au rez-de-chaussée du 164 avenue du Général de Gaulle à Champigny-sur-Marne (Val-de-Marne). À l’extérieur, si la façade affiche bien « cabinet médical - Sami », les plaques pour l’instant vides, trahissent l’aspect relativement récent de ce lieu. Car même si les généralistes qui vont venir consulter ici ne sont que de passage, ils auront quand même bien le droit à leur plaque en devanture.
La municipalité a fait refaire les locaux de ce qui était auparavant une ancienne annexe de sa mairie pour accueillir, entre autres, un projet de pépinière de santé. De quoi s’agit-il ? De cabinets où des généralistes désirant s’installer sur la commune viennent consulter de manière transitoire avant de rejoindre leur lieu d’installation permanent dans la ville.
Inauguré en mars dernier, le lieu accueille pour l’instant deux généralistes le Dr Rihab Bounemeur (photo) et le Dr Nadia Kasi-Aoul. Toutes deux, avec le Dr Noémie Viomesnil, ont prévu de s’installer dans un cabinet de groupe à Champigny. Mais les travaux de leur futur lieu d’exercice ont pris du retard, en attendant elles consultent donc dans les cabinets mis à disposition par la mairie.
« Il y a beaucoup d’opérations immobilières dans la ville mais parfois les délais sont longs, certains médecins qui avaient besoin de s’installer plus ou moins rapidement finissaient par aller ailleurs, c’est dommage. L’idée d’installation transitoire à donc émerger », explique le Dr Frédéric Villebrun, médecin généraliste dans un des centres de santé de la ville et co-directeur de la CPTS de Champigny qui a porté le projet avec la collectivité.
Affiner son projet et démarrer une patientèle
Avant de mettre les pieds dans leurs propres cabinets, cette période au sein de la pépinière leur permet notamment de commencer à se constituer une patientèle. À l’image du Dr Bounemeur, il s’agira de sa première installation et auparavant elle avait principalement exercé dans le 77.
« Je vais pouvoir prendre des urgences, des patients sans médecin traitant, mais aussi me familiariser avec la population de la commune », souligne-t-elle. Pour le moment elle a prévu d’exercer deux jours et demi dans la pépinière.
Pour l’instant, elle essaie surtout de faire fonctionner son imprimante et de rendre opérationnel son matériel informatique. Car l’équipement informatique est le seul matériel à prendre en charge soi-même par les médecins qui viennent exercer ici. Le reste est fourni, la municipalité s'est occupé de la rénovation des locaux et les met à disposition à un loyer modéré, l’électricité ou internet sont aussi fournis par la ville. Au niveau du bail, c’est une « convention d’occupation précaire », qui est signée, ce qui permet aux généralistes de quitter les lieux sans les préavis qui s’appliquent d’habitude.
« Nous ne signons pas réellement de contrat à proprement parler avec les médecins, explique Geneviève Carpe, adjoint au maire de Champigny, chargée de la santé et de la prévention. Mais nous avons en quelque sorte une charte morale avec eux dans laquelle ils s’engagent à s’installer sur la commune ».
Car au-delà de situations comme celles des Drs Bounemeur et Kasi-Aoul, l’idée n’est pas simplement d’offrir un refuge à des MG en attente de locaux mais aussi de jouer un vrai rôle d’incubateur à l’image de ce qui se fait pour les pépinières de start-up par exemple. Deux autres généralistes actuellement intéressés pour intégrer la pépinière réfléchissent par exemple à un projet de MSP.
« L’idée c’est d’être incubateur de projet, pas seulement d’offrir des locaux. Nous voulons les accompagner, dans le prolongement des permanences d’aide à l’installation proposées par la CPTS, pour qu’il y ait un travail de maturation de leur projet de santé », explique le Dr Villebrun. « Et en même temps, en commençant à travailler ils peuvent capitaliser sur ce temps-là pour se familiariser avec le tissu local », ajoute-t-il.
Le temps que ces médecins peuvent passer dans la pépinière est souple et adapté à chacun, mais l’idée est malgré tout que « l’incubation » ne dure pas plus de deux ans, pour que les installations se concrétisent.
Améliorer l'accès aux soins
Car comme beaucoup de municipalités d’Île-de-France, Champigny-sur-Marne compte entre autres sur ce projet pour apporter des solutions aux difficultés d’accès aux soins et de démographie médicale.
Sur la commune de 78 000 habitants, il y a aujourd’hui une quarantaine de généralistes libéraux et 12 généralistes salariés dans les centres de santé. « Nous avons réussi à stabiliser le nombre de médecins, mais en réalité on compense les départs », explique le Dr Jean-Noël Lepront (photo), généraliste dans la MSP de Champigny-Le Plant et co-directeur de la CPTS. « Il y a 15 ans il y avait deux fois plus de médecins libéraux », ajoute-t-il.
La municipalité essaie donc de travailler avec les médecins du secteur, ainsi que l’ARS et le Conseil régional qui ont participé financièrement au projet, pour mobiliser le maximum de solutions sur le territoire.
Comme l’explique Geneviève Carpe, beaucoup de nouvelles constructions sont en cours à Champigny-sur-Marne, « et pour chaque construction nouvelle, les bas d’immeuble sont dédiés à des professionnels de santé », explique-t-elle.
La commune est en zone d’intervention prioritaire et compte aussi plusieurs quartiers prioritaires de la ville (QPV) et trois zones franches urbaines (ZFU).
Soins non programmés et permanence des soins
Au-delà de la pépinière, le lieu a donc aussi été pensé pour offrir aux campinois, une offre globale en matière d’accès aux soins de premier recours.
Les locaux abritent donc aussi le Sami (service d’accueil médical initial), nom des sites de gardes fixes pour la permanence des soins ambulatoires dans le Val-de-Marne.
À Champigny, le Sami existe depuis 2004 mais il était situé dans un autre quartier de la ville. « Il était dans un endroit très enclavé, où il n’était pas pratique de se garer notamment », explique Mme Carpe.
Et en plus du Sami ouvert sur les horaires de PDSA, en journée depuis janvier a également ouvert le Cami (cabinet d’accueil médical initial), de 15 h 30 à 19 h 30 il propose une solution à la prise en charge des soins non programmés en journée. Les patients peuvent être adressés par le SAS, mais un numéro local a aussi été mis en place pour la population de Champigny via l’application Entr’Actes.
« Il y a un respect du parcours de soins, explique le Dr Lepront, Une réponse à la demande de prise en charge est donnée dans les 4 heures, pour les deux premières il y a une priorité au médecin traitant du patient, s’il existe, ensuite la demande est adressée à l’ensemble de la communauté. Mais le médecin traitant reçoit une notification et une fiche de synthèse est remplie par le médecin qui voit le patient et transmis au médecin traitant », détaille-t-il.
200 consultations par mois
38 médecins de Champigny sont inscrits sur Entr’actes. Au Cami, 5 ou 6 médecins se relaient sur les plages de consultation, parmi eux des médecins adjoints ou assistants notamment mais aussi un retraité.
« Ce qui est intéressant c’est que nous avons une adaptabilité pour augmenter la ligne de garde si besoin, explique le Dr Villebrun. Mais nous ne voulions pas exister qu’en temps de crise car il était important de fidéliser les médecins et même en période creuse nous avons malgré tout 7 à 8 patients par jour ».
« Il y a environ 200 consultations par mois, complète le Dr Lepront. La moitié est orientée par le SAS, l’autre par Entr’Actes et environ la moitié n’a pas de médecin traitant ».
Pour ces patients, proposer une prise en charge des soins non programmés localement était important. « C’est la prise en charge la plus adaptée car avec ce dispositif ils restent dans le circuit du territoire, il ne s’agit pas d’une téléconsultation déconnectée », avance le Dr Villebrun.
« Et les retours de la population sont excellents, souligne Geneviève Carpe, ils sont ravis qu’on leur propose ce type de prise en charge ».
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