Grand âge

Cash Investigation épingle à son tour les Ehpad, plus de transparence réclamée par les députés

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Publié le 03/03/2022

Dans une enquête diffusée sur France 2 mardi 1er mars, l'équipe de Cash investigation alerte, à son tour, sur les conditions de vie des résidents d'Ehpad privés, notamment ceux du groupe Korian. Entre maltraitances et pression vis-à-vis du personnel pour maximiser les profits, le quotidien dépeint dans ces structures se révèle peu reluisant…

Crédit photo : BURGER/PHANIE

Personnel non diplômé, repas rationnés, effectifs insuffisants : après le séisme provoqué par le livre « Les Fossoyeurs » sur le « système Orpea », le magazine « Cash investigation » de France 2 s'est attaqué à son tour aux Ehpad à but lucratif, avec une enquête diffusée mardi soir, centrée cette fois sur le groupe Korian.

Préparé depuis un an et demi, ce reportage devait initialement être diffusé au printemps, mais la chaîne a avancé sa diffusion pour mieux s'inscrire dans l'actualité, marquée par les révélations du livre de Victor Castanet.

Maximiser les bénéfices

Comme dans « Les Fossoyeurs », Élise Lucet et l'équipe de « Cash » expliquent avoir voulu « révéler les méthodes » des groupes d'Ehpad privés « pour maximiser leurs bénéfices, souvent au détriment du bien-être des résidents et des conditions de travail de leurs salariés ».

Dans le livre comme dans « Cash », « les questions soulevées se rejoignent, notamment autour des coûts qu'on cherche constamment à baisser », a expliqué à l'AFP la réalisatrice de l'enquête, Marie Maurice.

La journaliste s'est fait embaucher pendant trois jours dans un Ehpad Korian en tant qu'auxiliaire de vie, mais a été affectée à l'équipe des aide-soignantes, alors qu'elle n'a pas de diplôme pour exercer cette profession. Dans le reportage est dépeint le quotidien harassant de salariés débordés.

Deux anciens directeurs d'Ehpad affirment aussi que le groupe Korian soumet ses cadres à une pression constante pour qu'ils réduisent les coûts et maximisent le bénéfice de l'entreprise.

Pas de croutons dans la soupe

Selon des documents internes à Korian, que les journalistes de Cash se sont procurés, la politique de réduction des coûts allait si loin que la direction avait même donné pour instruction de supprimer les croûtons dans la soupe des résidents.

Ces documents montrent également que la direction de l'entreprise veille à ne remplacer que partiellement le personnel soignant lorsqu'il prend ses congés, et qu'elle transmet de fausses déclarations aux autorités de tutelle quant à ses effectifs, afin de maximiser ses dotations publiques, affirment les journalistes de Cash.

Interrogée par Elise Lucet, Mme Boissard a réfuté toutes ces accusations. Le reportage s'apparente à un « réquisitoire » qui contient des « choses parfaitement trompeuses », a-t-elle soutenu.

Pénurie de personnels

La plupart des difficultés rencontrées dans les établissements de Korian sont dues à une « grave pénurie de personnels formés et qualifiés », a souligné la directrice générale, réfutant toute tricherie dans les déclarations du groupe sur ses effectifs.

Dans un long communiqué publié après la diffusion de l'émission, Korian a également démenti « formellement » tout rationnement dans l'alimentation des résidents. La suppression alléguée des croûtons dans la soupe ne correspond « absolument pas à la politique de l'entreprise », affirme Korian, qui dénonce la présentation « totalement tronquée » d'un document interne. Pour appuyer ses dires, l'entreprise a même publié les copieux menus servis à ses résidents pour les fêtes des grands-mères 2021 et 2022. 

Des députés réclament plus de transparence

Parallèlement, plusieurs députés de la commission des affaires sociales ont publié, ce mercredi, le bilan de deux missions sur les maisons de retraite médicalisées.

Plusieurs propositions en émanent notamment celle d'augmenter le ratio de soignant par résident afin d'accorder « une heure trente » quotidienne par personne âgée.

Une autre proposition, qui n'a pas fait consensus au sein de la commission, consiste à en finir avec les Ehpad à but lucratif, qui représente 20 % des capacités d'hébergement.

Sur le long terme, le rapport sur « l'Ehpad de demain » a évoqué la transition des établissements à but lucratif vers des sociétés dites à mission, mettant au même niveau rentabilité et finalités sociales.

Les membres de la commission ayant travaillé sur les deux missions ont approuvé une révision du cahier des charges sur l'aménagement des chambres, l'ouverture d'hébergements temporaires après une hospitalisation et le changement du nom des Ehpad en « maisons collectives pour seniors ».

Les membres de la commission ont annoncé leur objectif d'inclure leurs propositions dans le prochain projet de loi de financement de la Sécurité sociale.

Avec AFP.


Source : lequotidiendumedecin.fr