« D’ici la fin de l’année prochaine, nous devrons avoir désengorgé tous les services d’urgence », a déclaré le président de la République dans une allocution qui visait avant tout à l’apaisement après la promulgation de la loi réformant les retraites. « Surréaliste ! », réagit Patrick Pelloux, président de l’Association des urgentistes de France (Amuf). « Nous ne savons pas d’où sort cette annonce. La dernière concertation remonte à la semaine dernière. Le ministère de la Santé nous a alors demandé si nous étions d’accord pour modifier le code de la santé publique afin d’autoriser les urgentistes à réaliser des accouchements dans les zones où les maternités vont fermer. Là aussi c’était surréaliste… » Pour le président de l’Amuf, un début d’explication serait à rechercher dans la volonté de l’exécutif de promouvoir (à l’excès) la e-santé. « Si vous avez un problème, vous appelez le service d’accès aux soins (SAS). Dans le schéma de pensée du président de la République, le médecin est éloigné du patient. De plus en plus d’actes sont délégués aux pharmaciens, aux kinés, aux infirmiers… et nous arriverons, doucement vers sûrement, vers l’automatisation totale. Vous taperez 1 ou 2 et la machine vous dira si vous êtes malade… », s’agace Patrick Pelloux qui pointe également « une méconnaissance totale du dossier. Le sujet n’est pas de désengorger les urgences mais de défendre et de promouvoir un système de santé qui permette d’être bien soigné ».
« Tous les maillons de la chaîne sont cassés »
Même réaction d’incompréhension du côté de Mathias Wargon, chef de service des urgences adultes et du Smur de l’hôpital Delafontaine, en Seine-Saint-Denis. « Je n’y crois pas. C’est un effet d’annonce politique. J’ajoute que notre situation est loin d’être spécifique car de nombreux pays sont confrontés à un engorgement de leurs services d’urgence : Grande-Bretagne, Québec, Etats-Unis, Italie, Australie… » Une situation qui s’explique par l’absence de solutions en ville, et parfois même à l’hôpital. « Nous attendons toujours une réforme de fond du système de santé, pas juste quelques pansements. Aujourd’hui, tous les maillons de la chaîne sont cassés. Je connais François Braun. Il pense que le SAS va permettre de réguler l’arrivée aux urgences. Si j’approuve la partie « conseils » du dispositif, je suis très « rétrograde » sur la téléconsultation car nous avons besoin d’examiner nos patients. C’est en ville qu’il faut trouver des solutions. Par ailleurs, notre ministre connaît mal nos problématiques. Actuellement, les durées de séjour s’allongent car l’hôpital, dont l’organisation est loin d’être optimale, ne fonctionne finalement que cinq jours sur sept ».
Un système « à bout de souffle »
Et le constat n’est guère plus optimiste du côté de la « jeune génération ». Kevin Morlet de Villepin, administrateur Champagne-Ardenne de l’Association des jeunes médecins urgentistes, parle lui aussi d’un système « à bout de souffle. Rien de plus à commenter, ni à ajouter. Ne reste qu’à espérer toujours plus de saintes vocations dans ce sacerdoce médical où ne demeureront bientôt que les âmes les plus charitables d’entre nous, celles prêtes à se renier elles-mêmes et leur famille pour un engagement total sans aucune contrepartie pour la population et pour leur pays », conclut-il.
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