À chaque nouvelle vague épidémique, le système de santé français bute sur le nombre de lits de réanimation disponibles. Alors que de nombreuses enquêtes ont été publiées, la Cour des comptes livre la synthèse la plus complète. Et ouvre de nouvelles pistes. D’entrée de jeu, les magistrats de la Cour reconnaissent comment le sujet a été un point aveugle des politiques d’évaluation. Circulez, il n’y a rien à voir ! Aucun rapport n’était donc disponible avant la crise sanitaire.
Au-delà de la comparaison avec l’Allemagne qui s’avère délicate du fait d’instruments de mesure différents des deux côtés du Rhin (voir Décision & Stratégie Santé N° 320 numéro exceptionnel avril 2020) l’augmentation du nombre de lits de réanimation et de soins critiques n’a pas suivi la croissance démographique. « Pour la réanimation, cette progression de 0,17 % par an s’avère dix fois plus faible que celle des effectifs des personnes âgées (+1,7 % par an) qui constituent pourtant près des deux tiers des malades hospitalisés dans ce secteur », note le rapport. De fait les établissements hospitaliers n’étaient par armés pour affronter le tsunami du printemps dernier. Le taux d’équipement en lits de réanimation était de 37/100 000 habitants de plus de 65 ans au 1er janvier 2020. Il s’élevait encore à 44/100 000 habitants en 2013. Dès lors selon le calcul effectué par les magistrats, avec les ratios de 2013, la France aurait compté 5 949 lits de réanimation adultes au lieu des 5 080 recensés avant la crise.
Mais la dénonciation d’un manque évident de ressources financières est le principal enseignement de l’enquête menée par les magistrats de la Cour. Avec comme principale conclusion l’appel à une réforme du financement. « L’ouverture d’un lit en réanimation médicale génère actuellement un déficit de 115 000 euros par an », peut-on lire dans le rapport. Comment en est-on arrivé-là ? Par un effet ciseau classique. Sur la période 2014-2019, les tarifs des groupes homogènes de malades (GHM) le plus souvent associés à un séjour en réanimation ont reculé en moyenne de 9 %. La baisse a même été plus forte pour la prise en charge de la détresse respiratoire (-12,3 %) et les bronchopneumopathies chroniques surinfectées (-10,8 %.).
Dans le même temps, les charges ont continué à progresser de manière significative avec une hausse de +7 % en réanimation et +9 % pour les unités de surveillance continue ou de soins intensifs. Comment dans ce contexte envisager la création de nouveaux lits par les directions hospitalières en l’absence d’alternative de prise en charge ? Autre conséquence de la tarification inadaptée, au lieu de réserver un volant de lits pour accueillir les urgences, le taux d’occupation est proche au quotidien des 100 %. D’où l’exigence d’une réforme qui permettrait aux soignants de répondre aux besoins épidémiologiques. En attendant, le ministère des Solidarités et de la Santé n’a pas jugé utile de répondre aux remarques de la Cour.
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