Après les députés, les sénateurs ! Malgré la gronde de milliers de médecins à Paris plus tôt dans la journée, le Sénat a adopté mardi 14 février en première lecture le texte de la majorité présidentielle à l’Assemblée nationale, dont Stéphanie Rist est la rapporteure. De nombreux sénateurs ont dénoncé l’empressement du gouvernement, alors que les négociations conventionnelles entre les libéraux et la Cnam ne sont pas encore terminées.
Cette proposition de loi, visant à lutter contre les déserts médicaux, prévoit d’élargir les missions des infirmiers en pratique avancée (IPA). Ils seraient en outre autorisés à réaliser certaines prescriptions de soins et de médicaments. Les patients pourraient se rendre chez ces soignants sans passer par un médecin, mais toujours dans le cadre d'un exercice coordonné. La proposition de loi permet également un accès direct aux kinésithérapeutes et orthophonistes exerçant dans des établissements de santé.
Braun défend le texte
François Braun a répondu aux accusations de certains sénateurs, en défendant le texte de la majorité présidentielle : « les IPA sont des infirmières qui ont trois ans de formation, quatre ans d’exercice et deux ans de formation complémentaire, ce qui est loin d’être négligeable. Pour autant, elles ne remplaceront jamais le médecin généraliste. Les IPA ne sont pas là pour remplacer, mais donner une solution complémentaire dans l’organisation de notre système de soin. Par contre ce n’est pas un emplâtre sur une jambe de bois, je suis désolé. »
Les sénateurs ont finalement donné leur feu vert à ces dispositions – 199 voix pour et 14 contre – mais en les encadrant, de sorte à « garantir la sécurité des soins » et « conserver le rôle central du médecin dans la coordination et le suivi des patients ». Corinne Imbert (Les Républicains) a obtenu que le dispositif soit validé par un décret en Conseil d’État après avis de l’Académie de médecine, de la Haute Autorité de santé et des organisations professionnelles concernées.
Libérer du temps médical
« L’objectif n’est en aucun cas de mettre de côté le médecin généraliste », a assuré devant les sénateurs la ministre déléguée chargée de l'Organisation territoriale et des Professions de santé, Agnès Firmin Le Bodo, alors que les médecins libéraux manifestaient le jour même contre ce texte et pour réclamer de meilleurs tarifs. Il s'agit pour le gouvernement « de libérer du temps médical et de faciliter l'accès à la santé », a-t-elle poursuivi.
« Ne nous berçons pas de chimères, ce texte oppose à un problème structurel des réponses parcellaires et ne permettra pas de résoudre les graves difficultés auxquelles certains de nos concitoyens sont confrontés », a mis en garde de son côté la rapporteure Corinne Imbert.
Pénaliser les patients poseurs de lapins ?
Les sénateurs ont également introduit un article ouvrant la voie à une indemnisation des rendez-vous non honorés chez les professionnels de santé, et à une pénalisation financière des patients indélicats. Cette initiative a fait débat, notamment sur la responsabilité des plateformes de rendez-vous. Le ministre de la Santé l'a jugée « prématurée », tandis que la gauche a estimé qu'elle risquait de précariser davantage les patients les plus fragiles. Pour Corinne Imbert, « il ne s'agit pas de stigmatiser », mais « au moins de mettre sur la table » le problème.
À noter aussi : avec l'assentiment du ministre, le Sénat a supprimé la possibilité pour le kinésithérapeute de prescrire une activité physique adaptée (APA).
La gauche s'est abstenue sur l'ensemble de la proposition de loi, Bernard Jomier (PS) reprochant au gouvernement « de cristalliser des oppositions entre professions de santé là où il faut plus de coopération ». Députés et sénateurs vont maintenant tenter de s'accorder sur un texte commun en commission mixte paritaire (CMP).
(Avec AFP)
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