Face aux prises de position récurrentes et tranchées de son collègue de l’Intérieur Bruno Retailleau sur la réforme de l’aide médicale d’État (AME), la ministre de la Santé Geneviève Darrieussecq a fini par sortir du bois en défendant avec force le dispositif existant, vendredi 4 octobre au micro de France info. « Pas question de toucher à l’AME, a-t-elle tranché. C’est ma position depuis longtemps. Le rapport récent de Claude Evin et Patrick Stefanini dit très simplement que l’AME est un dispositif utile, bien géré et contrôlé par l’Assurance-maladie de façon très stricte. Je veux que tout le monde soit rassuré. »
La ministre a sorti sa casquette de médecin généraliste et d’allergologue pour expliquer l’intérêt de conserver en l’état cette aide aux étrangers en situation irrégulière, y compris pour des raisons sanitaires, alors que Bruno Retailleau avait affirmé qu’il souhaitait la réviser « pour faire baisser l’immigration » – propos ayant provoqué un tollé dans le monde de la santé.
Ne pas créer de « fantasmes »
« Moi je suis médecin, et je parle de médecine et de santé publique, a encore insisté la ministre de la Santé, comme pour marquer son territoire sur un sujet qui divise au gouvernement. L'aide médicale d'État, c'est aussi une assurance sur la santé des Français pour éviter certaines contagions. On en fait un totem… Il ne faut pas avoir de tabou avec ce sujet, mais il ne faut pas créer des fantasmes. »
Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau avait également laissé entendre, quelques jours plus tôt, qu'il ne « s'interdisait pas de prendre, notamment par la voie réglementaire, un certain nombre de dispositions » sur l’AME. Mais là encore, la ministre de la Santé a recadré le débat : s’appuyant une fois de plus sur le rapport Evin-Stefanini, qu’elle a « lu attentivement », Geneviève Darrieussecq a précisé qu’une éventuelle réforme du panier de soins dans cet esprit signifiait quelques « petits arrêtés pour enlever deux lignes » au dispositif actuel, arrêtés « qui n’[auraient] aucune incidence sur l’AME » telle qu’on la connaît.
Michel Barnier entre deux eaux
Mercredi 2 octobre sur France 2, le Premier ministre Michel Barnier avait ménagé la chèvre et le chou – et donc ses deux ministres – en estimant qu'il était possible de « mieux gérer » l'AME et qu'il fallait « voir calmement les choses pour que ceux qui y ont droit puissent la recevoir ».
En 2024, l'AME a représenté pour l’État une enveloppe de 1,2 milliard d'euros, soit seulement 0,5 % des dépenses de santé prévues dans le budget de la Sécu. L’AME intègre le remboursement de soins médicaux et dentaires, les médicaments remboursés, les frais d'analyses et d'hospitalisation, certaines vaccinations et dépistages, la contraception et l'IVG. Fin 2023, on comptait 466 000 bénéficiaires.
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