Comme tous les ans, la Cour des comptes publie son rapport annuel sur les politiques publiques. Une courte partie du rapport s'attaque à la situation des finances publiques. Le reste des 700 pages s'intéresse cette année à l'action publique en faveur de l'adaptation au changement climatique.
Sécu : la branche maladie lestée de 10 milliards de déficit par an
Durant la période 2023-2027, la seule branche maladie de la Sécurité sociale devrait rester « très déficitaire à un niveau proche de 10 milliards d’euros » pour chaque exercice, alerte la Cour des comptes. Les hauts magistrats exhortent l’État à prendre des mesures de redressement pour ramener les comptes « à l’équilibre à l’horizon 2027 ». « C’est d’autant plus indispensable que les effets du vieillissement de la population, déjà perceptibles, s’accroîtront et exerceront une pression croissante sur les branches maladie, vieillesse et autonomie », insiste la rue Cambon. Du côté des dépenses de santé, la Cour rappelle que le respect des « objectifs ambitieux » [de l’Ondam] votés chaque année dans le budget de la Sécurité sociale (LFSS) « nécessitera la réalisation d’économies importantes pour l’Assurance-maladie, au moins égales chaque année à celles prévues pour 2024 », soit 3,5 milliards d’euros.
Recherche publique : peut mieux faire
Certes, la recherche publique française « rayonne » sur le plan international dans les sciences du climat (observation de la Terre, services climatiques, etc.). Elle est présente entre le 4e et 5e rang mondial des publications (6e sur le plan scientifique général). Mais la Cour relève des fragilités dans la recherche pour atténuer les effets du réchauffement : le pays pointe entre le 10e et le 11e rang seulement. Elle préconise de rééquilibrer les moyens en faveur de la santé, pour réduire par exemple les risques infectieux aggravés par le climat, et de l'urbanisme, pour concevoir des bâtiments plus adaptés.
Vague de chaleur : un risque sanitaire insuffisamment maîtrisé
Le nombre de décès enregistrés pendant les vagues de chaleur des étés 2020 et 2022 en France (2 000 et 2 800 décès) a montré que « le risque sanitaire est toujours insuffisamment maîtrisé », juge la Cour. L’analyse de l’effet des vagues de chaleur de l’été 2022 à l’échelle de 35 pays européens et de 543 millions habitants a mis en évidence un risque de décès plus élevé chez les femmes (56 % des décès globalement), les hommes comptant plus de victimes de 0 à 79 ans, les femmes après 80 ans. La Cour constate aussi une mortalité nettement plus forte en été dans les pays proches de la Méditerranée, ce qui l’idée reçue de « l’accoutumance culturelle et physiologique » des pays et populations du sud de l’Europe aux vagues de chaleur. Lorsque la période de canicule est supérieure à trois jours, les passages aux urgences augmentent de 5 à 10 % sur toutes les tranches d’âge ; lorsque sa durée dépasse sept jours, ils augmentent de 15 % pour les enfants de moins de deux ans. Durant l’été 2022, le nombre de passages aux urgences attribuables aux vagues de chaleur a été estimé à 200 000, ce qui représente 3,4 % d’augmentation et un coût supplémentaire pour l’assurance-maladie évalué à 54 millions d’euros. En Ehpad, plus la vague de chaleur dure, plus l’impact est fort : l’augmentation des décès atteint 18 % pour les vagues de chaleur supérieures à sept jours.
Finances publiques : une trajectoire fragile et des économies peu documentées
La Cour des comptes a jugé que la trajectoire de déficit public présentée par le gouvernement dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 était « peu ambitieuse ». La juridiction reproche notamment au gouvernement d'entériner un déficit croissant de la Sécurité sociale (à 17,2 milliards d'euros, contre 8,7 actuellement). Mais cette trajectoire est aussi jugée « fragile », car elle ne comprend « aucune marge de manœuvre en cas de scénario moins favorable » que les hypothèses « optimistes » sur lesquelles s'appuie le gouvernement.
La Cour des Comptes estime également qu'au moins 50 milliards d'euros d'économies seront nécessaires d'ici 2027 pour faire repasser le déficit public sous les 3 % du PIB. Elle reproche au gouvernement que ces efforts soient « non documentés et renvoyés à la période 2025-2027 ». Ces économies seront « d'autant plus difficiles » que la hausse des charges d'intérêts et de nombreuses lois de programmation sectorielle (Défense, Justice, Intérieur, Recherche) orientent déjà la dépense publique « à la hausse », outre les futures dépenses sur la transition écologique.
L'adaptation au changement climatique pas chiffrée
La Cour regrette par ailleurs « l'absence de chiffrages exhaustifs et cohérents pour l'ensemble des acteurs publics » des dépenses qui seront nécessaires pour adapter la France au changement climatique. « L'évaluation des coûts actuels et futurs de l'adaptation est lacunaire, voire inexistante, faute de données suffisantes mais également parfois d'objectifs clairs », déplorent les magistrats, sommant l'État de jouer « correctement son rôle de stratège ».
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