Télésuivi des patients sous thérapies orales

Un quart d’effets secondaires sévères en moins

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Publié le 30/06/2020
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Programme de télémonitoring, CAPRI, améliore le suivi clinique de patients traités par thérapies anticancéreuses orales. Sélectionnée pour les « Highlights of the Day », l’étude montre une diminution significative des effets secondaires, du nombre et de la durée des hospitalisations liées aux toxicités.
Le patient transmet les données liées à son traitement via un portail web ou une application mobile

Le patient transmet les données liées à son traitement via un portail web ou une application mobile
Crédit photo : phanie

Le télésuivi des patients sous anticancéreux a déjà été l’objet de plusieurs études à l’ASCO : en 2017 avec l'essai du Pr Ethan Basch (1) et en 2018 avec l’application MoovCare dans le cancer du poumon (2). Dans les deux cas, une amélioration en survie globale des patients suivis était observée. Cette année, le programme CAPRI développé par Gustave Roussy depuis 2015 entérine l’intérêt du télésuivi en cancérologie (3).

L’interface numérique CAPRI permet au patient et au personnel soignant extérieur de partager les informations relatives à la prise en charge. Le patient peut aussi transmettre les données liées à son traitement à deux infirmières de coordination qui assurent pendant un mois et demi un suivi hebdomadaire de son état général, ensuite peu à peu espacé. « Dans 75 % des cas, les interventions ont pu être gérées par les infirmières, sans recours à l’oncologue référent », précise le Dr Olivier Mir (Gustave Roussy). Un arbre décisionnel leur permet de définir la conduite à tenir à chaque alerte.

Plus de 600 patients évalués

« 609 patients adultes, commençant un nouveau traitement oral pour tous types de cancers solides, ont été inclus dans l’étude de phase III randomisée, entre 2016 et 2019 », explique le Dr Mir. Parmi eux, 41 % avaient plus de 65 ans (14 % > 75 ans) et 47 % étaient au moins en troisième ligne métastatique (39 % sous chimiothérapies orales, 61 % sous thérapies ciblées). Après 6 mois de suivi, la dose intensité relative (critère principal) s’est révélée significativement plus élevée avec le programme CAPRI que dans le groupe suivi standard (93,4 % vs 89,4 % ; p = 0,04). « CAPRI permet une diminution de 25 % des effets indésirables (EI) de grade ≥ 3 (27,6 % vs. 36,9 %) », s’enthousiasme le Pr Fabrice Barlesi, directeur médical de Gustave Roussy. Il réduit aussi significativement le nombre (23 % vs 32 %) et la durée des hospitalisations (2,82 vs 4,44 jours), ainsi que la proportion de patients admis aux urgences (15,1 % vs 22 %). « CAPRI améliore l’expérience patient et augmente le recours aux soins de support (consultation douleur, nutrition) », ajoute le Dr Mir. Même si l’étude ne rapporte pas de données en termes de survie, elle met en évidence un meilleur suivi qualitatif du traitement et une prise en charge plus précoce des EI et des symptômes. 

Vers CAPRI-Covid et CAPRI-2

Environ 250 patients bénéficient encore de ce dispositif en routine pour leur traitement oral ou une atteinte par le SARS-CoV-2. En effet, une application CAPRI-Covid a été mise en place face à la crise sanitaire. Les résultats relatifs au suivi de cette période Covid-19 pourraient être divulgués en septembre au congrès européen de cancérologie (ESMO). De plus, un essai CAPRI-2 serait envisagé afin de pousser l’analyse par type de cancers, de traitements oraux ou avec l’hormonothérapie au long cours. D’autre part, une demande de remboursement du dispositif auprès de la HAS serait envisagée.

D’après la conférence de presse de Gustave Roussy, le 27 mai 2020
(1) Basch E. et al. JAMA. 2017 Jul 11;318(2):197-198.
(2) Denis F. et al. JAMA. 2019;321(3):306-307.
(3) Mir O. et al. J Clin Oncol 38: 2020 (suppl; abstr 2000)

Karelle Goutorbe

Source : Le Quotidien du médecin